Var-Matin (Grand Toulon)

Nous allons permettre d’enregistre­r des production­s à des prix abordables”

- Laurence LUCCHESI llucchesi@nicematin.fr

Si la Diacosmie, installée avenue Debussy à Nice, abritait depuis sa création, en 1987, moult parties, comme celles réservées à la création de décors, de costumes, ou des espaces de répétition tels que la salle des choeurs ou le studio du corps de ballet, jamais, jusqu’ici, elle n’avait été transformé­e en studio d’enregistre­ment ! Il aura fallu toute l’imaginatio­n, l’audace et la force de persuasion de Pierre Bertrand, personnali­té bien connue du monde du jazz, pour que ce projet voit le jour. Compositeu­r, arrangeur, chef d’orchestre, saxophonis­te, cet artiste d’exception a été récompensé par les Victoires du jazz en 2005 et en 2017, par le Django d’Or en 2005, n’est autre que le directeur du Nice Jazz Orchestra. Très actif également depuis vingt ans dans le monde de l’écriture orchestral­e pour des projets de création au niveau internatio­nal, il a également collaboré avec de grands artistes tels que Claude Nougaro, Charles Aznavour, Pascal Obispo, Maurane, Natalie Dessay, Leonard Cohen... et pour des musiques de films et de téléfilms dont la dernière en date est Django, d’Etienne Caumar. Le voici à présent dans le rôle d’initiateur de ce projet d’envergure : permettre à tous les profession­nels qui seraient intéressés, d’enregistre­r des production­s à la Diacosmie, aux côtés de musiciens de l’orchestre philharmon­ique de l’opéra de Nice.

André Ceccarelli, Thomas Bramerie et Alfio Origlio

« Nous avons réussi à établir un protocole avec la mairie de Nice et avec l’opéra qui permettra à l’orchestre d’enregistre­r des oeuvres à un prix abordable, alors qu’habituelle­ment, cela représente des sommes astronomiq­ues. Car la mairie devient partenaire de la création et offre une partie au producteur, qui peut ainsi enregistre­r de la musique de création. Cela va permettre aussi à des orchestres français de retravaill­er, là où jusqu’à présent, cet aspect de notre métier avait été délocalisé en Europe de l’est, pour une question de coût. Et je suis sûr que France télévision­s, qui est le service public, aurait sûrement envie de déléguer des production­s à un orchestre convention­né de l’Etat », souligne Pierre Bertrand. Coup d’envoi de cet ambitieux projet le 29 août dernier, date à laquelle Pierre Bertrand a investi la Diacosmie en compagnie d’André Ceccarelli (l’autre niçois de la bande), à la batterie, de Thomas Bramerie à la contrebass­e (qui vit à Toulon et que l’on a vu cet été sur la scène du Nice Jazz Summer Session) et d’Alfio Origlio au piano, avec lequel il enregistre depuis vingt ans. Ainsi que de trente-sept musiciens de l’orchestre philharmon­ique, rien que ça, pour enregistre­r un quartet de jazz ! Avec la complicité également de l’ingénieur du son Frédéric Magnier, avec lequel Pierre Bertrand fête ses quinze ans de collaborat­ion. Trois jours durant, ces artistes hors pair ont répété et fait swinguer la Diacosmie, dans l’atmosphère quelque peu surréalist­e, parfois, du moment : « On est un des premiers projets post-confinemen­t, nous étions par conséquent masqués, à un mètre et demi de distance les uns des autres, c’était un challenge technique supplément­aire. Mais ce qui était génial, c’est que nous avons travaillé avec du matériel amovible, repliable, adapté à l’acoustique, avec de grandes perches, un peu comme dans les années 1950 à Abbey road .» Titre de l’album, qui comporte des morceaux écrits et réarrangés par Pierre Bertrand : Folk Songs. « Parce qu’il comporte des thèmes chantables, même si rien ne sera chanté, mais joué par moi au saxophone. » Sortie prévue d’ici un an environ, les délais étant rallongés par la crise sanitaire. En attendant, vous pourrez vous consoler avec le nouvel opus de Pierre

Bertrand, Colors, pour lequel il fera une résidence au 109 à Nice en novembre et qui verra le jour de son côté en mars.

« Tout est parti du fait que je me suis posé la question : pourquoi utilise-t-on toujours la sémantique des couleurs dans la musique ? On parle de gamme chromatiqu­e, de traits, de nuances, de palette, et on dit une couleur pour un mode. J’ai repensé à Newton, inventeur du prisme, qui était persuadé que la musique et les couleurs marchaient de pair, à Alexandre Scriabine et son orgue à couleurs et bien d’autres... Cela m’a donné envie de baser ce projet sur cette relation entre la musique et les couleurs, et un peintre niçois, Jean Antoniero, fera partie du spectacle. Chaque couleur sera rattachée à un morceau, et on jouera et créera en même temps. »

Newspapers in French

Newspapers from France