L’école face au défi laïc
Jean-Pierre Obin est un ancien inspecteur général de l’Éducation nationale. Il veut « briser le silence qui règne sur la montée de l’islamisme dans l’école publique ». Son inquiétude s’appuie d’abord sur quelques statistiques : après les attentats de , % des enseignants affirment avoir été confrontés à des perturbateurs lors des moments de recueillement ; dans une enquête menée dans les Bouches-du-Rhône, % des collégiens musulmans ont déclaré préférer suivre la loi religieuse plutôt que celle de la République. Rien de très nouveau, note Jean-Pierre Obin, dont les alertes, au début des années , avaient alors été glissées sous le tapis : refus d’étudier certaines oeuvres, de serrer la main des femmes, de la mixité en cours de gym ou revendications touchant à l’alimentation. Plus rare est, heureusement, le sort de cette collégienne marseillaise « suppliciée par des garçons pour la punir de ses mauvaises moeurs supposées ». Mais, risibles ou dérangeantes, l’auteur empile page après page les dérives et les compromissions : une lecture des Trois petits cochons contestée par une maman musulmane, des fillettes de ans arrivant voilées en classe, les cours de natation séchés par les filles, ou ce professeur qui, en désespoir de cause, a fini par enseigner avec le Coran sur son bureau, pour faire face aux contestations permanentes de ses élèves.
Désarmement et couardise
Jean-Pierre Obin alarme : le phénomène prend de l’ampleur. Dans une école parisienne, % des mamans sont aujourd’hui voilées. Aucune ne l’était en . Et le sentiment religieux musulman croît chez les jeunes, ce qui pourrait faire de l’islam la première religion du pays dans quelques décennies. Pas un souci en soi, pour l’auteur, à condition que l’affirmation de la laïcité ne tremble pas. « Le populisme et l’islamisme se nourrissent l’un l’autre, à partir d’une grille de lecture commune qui consiste à ne pas faire de différence entre islam et islamisme », constate Obin. Homme « de gauche » assumé, il regrette que les accointances chrétiennes de la droite brouillent son discours et, plus encore, qu’une partie de la gauche ait basculé dans l’islamo-gauchisme :
« Les musulmans sont devenus, pour la gauche victimaire, le mythe de substitution des prolétaires. »
Malgré la fermeté affirmée par Jean-Michel Blanquer,
« ne plus faire semblant de ne rien voir », il voit encore trop de profs désarmés et de chefs d’établissement couards, par souci de paix sociale, face au défi de la laïcité. À défaut de baguette magique, lui plaide pour plus de mixité sociale, en fléchant des moyens adaptés, et une meilleure formation des enseignants à la laïcité mais aussi à la connaissance des religions, afin que l’école reste un sanctuaire et un outil d’émancipation. Parmi tant de bouquins qui font regretter les arbres abattus pour si peu, celui-ci, fouillé et sans manichéisme, vaut en tout cas la lecture. On vous le recommande.