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L’avenir de l’aéroport de Toulon-Hyères est-il menacé ? La directrice répond aux polémiques
Marches sur les aéroports pour demander la réduction du trafic aérien. Déclarations polémiques de certains élus clairement hostiles à ce mode de transport. Volonté de promouvoir le rail au détriment du ciel… L’avion est dans le collimateur de nombre de personnes préoccupées par les questions environnementales. Les aéroports de Province, sont-ils condamnés ? Laurence Erbs, la directrice de l’aéroport de Toulon-Hyères, plateforme gérée par Vinci Airports, nous répond.
Quel est l’impact de la crise sanitaire sur le trafic de l’aéroport ? Avant tout, je tiens à préciser que, malgré le confinement, synonyme d’arrêt de tous les vols réguliers, l’aéroport de Toulon-Hyères n’a jamais fermé. Il a continué à assurer sa mission de service public. Ce qui a permis d’accueillir des malades de la Covid- et de transporter des personnels soignants vers les hôpitaux de l’Est de la France submergés par l’épidémie. Mais l’impact de la crise sanitaire est très important : sur les neuf premiers mois de l’année, avec passagers, on a enregistré une baisse du nombre de passagers de %!
La saison estivale, qui a plutôt été bonne, n’a donc pas suffi ? Le trafic a repris très progressivement à partir du juin. D’abord avec deux vols quotidiens sur Paris/Charles-de-Gaulle (Orly étant fermé). Ça s’est accéléré en juillet-août et, très vite, on a atteint sur Paris % de l’offre proposée pendant l’été , avec un taux de remplissage des avions très honorable. L’aéroport s’est donc montré résiliant et attractif d’un point de vue touristique. Mais avec l’arrivée de la seconde vague et les incertitudes que cela génère, on a beaucoup moins de seniors que d’habitude en septembre et le trafic professionnel est également en baisse.
Justement, avec la Covid, les entreprises ont dû se réorganiser. Ne craignezvous pas que cette baisse du trafic professionnel soit définitive ? C’est difficile à estimer. On est encore dans la crise – on le voit avec les nouvelles restrictions – et il faudra plusieurs années sans doute pour s’en remettre, pour retrouver un trafic similaire à celui d’avant l’épidémie. On parle d’un retour à la normale à l’horizon . Pour en revenir au trafic professionnel, il représente l’hiver un peu plus de % des passagers transitant par notre aéroport ( % l’été). Dans l’impossibilité de faire voyager leurs salariés, les entreprises ont effectivement revu leur façon de travailler, en recourant notamment à la vidéo conférence. Mais le monde du travail a encore besoin de mobilité. Le déplacement en avion reste nécessaire.
Le discours ambiant n’est pourtant pas favorable au transport aérien. La façon de voyager va sans doute changer. Il faudra nous adapter. C’est vrai : on assiste à une montée en puissance des discours écologistes. Mais on n’a pas attendu pour travailler sur ces questions et mener une politique environnementale. Je rappelle que depuis , l’aéroport de ToulonHyères est certifié ISO pour son engagement en matière de gestion écoresponsable. Une réflexion que nous menons avec les compagnies aériennes, les avionneurs… Si le transport aérien ne représente que , % des émissions de CO, c’est aussi grâce à l’apparition de moteurs plus économes en carburant.
La volonté de supprimer les lignes intérieures dont les trajets pourraient être réalisés en train en moins de h ne vous inquiète pas? Pas le moins du monde. L’aéroport de ToulonHyères, situé dans le département le plus touristique de France, a sa raison d’être. Les voyageurs transportés par avion sont autant de gens en moins sur les autoroutes. Et puis prenons l’exemple de Brest, ville avec laquelle nous assurons deux allersretours par semaine, l’avion reste quasiment l’unique solution. Comme pour toute la frange ouest de la France d’ailleurs. Même pour rallier Paris, qui se trouve à plus de quatre heures en train, l’avion a du sens. Il est utile pour rapprocher les gens, les familles, les professionnels.
Lorsque vous entendez David Belliard, adjoint à la mairie de Paris, dire : « il faudra trouver un autre modèle que l’avion pour se rendre aux Antilles », vous ne redoutez pas le poids des élus écologistes à l’avenir ? Que ce soit la Métropole Toulon Provence Méditerranée, le comité régional de tourisme, l’agence Var Tourisme, ou encore la Marine nationale avec qui nous partageons les pistes… toutes ces institutions locales savent très bien que l’aéroport de Toulon-Hyères constitue une porte d’entrée sur les territoires varois. Les discussions que nous menons avec ces différents partenaires (auxquels il faut ajouter les entreprises emblématiques de la région), à chaque fois que l’on réfléchit à l’ouverture de nouvelles lignes, se passent très bien. Il n’y a pas de raison que ça change. Je précise que nous n’avons pas pour ambition un développement massif de l’aéroport qui doit rester à taille humaine. Lorsqu’on réfléchit à de nouvelles destinations, c’est qu’on estime qu’elles ont du sens avec la dynamique locale.
La société aussi s’est emparée des questions environnementales. Comment ça se passe avec les riverains de l’aéroport ? Très bien, là encore grâce au dialogue. La signature en de la charte de qualité de l’environnement sonore en est la preuve. À partir du moment où chaque partie essaye de comprendre les contraintes, les préoccupations des autres, on arrive à avancer, à vivre ensemble. Ces questions environnementales de plus en plus prégnantes dans la société, nous les avons prises en compte lors de la récente réfection des pistes. Des exemples parmi d’autres : pour éviter une noria de camions, nous avons conservé les déblais sur le site. tonnes d’enrobé ont par ailleurs été retraitées. Des décanteurs ont été installés pour récupérer les eaux de ruissellement potentiellement polluées par les hydrocarbures.
‘‘ Malgré le confinement, l’aéroport n’a jamais fermé ”