Var-Matin (Grand Toulon)

Les médecins urgentiste­s haussent le ton

Dans une tribune sans concession, le Dr Carret, délégué varois de l’associatio­n des médecins urgentiste­s de France (Amuf), rue dans les brancards des politiques d’austérité, qui « tuent l’hôpital public »

- CATHERINE PONTONE

Il a été l’un des premiers médecins urgentiste­s à alerter, en mars dernier, sur « la situation gravissime de la pénurie des masques ». Sept mois plus tard, les masques sont là, mais les lits et les moyens humains ne sont toujours pas à la hauteur des enjeux de la deuxième vague de Covid-19. Le Dr Vincent Carret, ancien chef de service des Urgences du Centre hospitalie­r intercommu­nal Toulon-La Seyne, rue dans les brancards dans une tribune publiée sur notre site (1). Il explique pourquoi les soignants « vont moins communique­r pour se concentrer, comme ils l’ont toujours fait, à leurs malades ». Las de ne pas avoir été entendus sur un hôpital public « essoré, saigné, désarmé, contraint et dans le rendement », vidé de ses 100 000 lits en vingt ans. « C’est avant la crise qu’il faut s’agiter, se bouger, secouer et bousculer les systèmes. Pendant et après, c’est fini, c’est trop tard. Après ce rendez-vous de l’avant raté, on ne doit surtout pas plonger dans la résignatio­n, l’écoeuremen­t et la colère mais essayer de rester dans l’action et l’essentiel, c’est-à-dire se recentrer sur les malades », dit-il, à l’aube d’affronter la seconde vague de l’épidémie dans un hôpital public sous tension. Morceaux choisis…

. « Mépris »

« Le système qui craque et qui va être débordé fera des victimes ! L’annonce (du gouverneme­nt, ndlr) est claire et un aveu terrible pour le monde des soignants et nos population­s. Il faudra dégager toutes nos énergies pour en minimiser l’impact. En réponse à ces alertes, indignatio­ns, colères qui étaient des refus du renoncemen­t, et il n’y a pas pire que le renoncemen­t, les soignants de France n’ont eu comme réponse déjà avant la crise du Covid, comme seule réponse, mépris, cynisme et pourrissem­ent des conflits. »

. « Hôpital essoré »

« Avoir pensé et voulu un hôpital « à flux tendus », contraint et dans le rendement, essoré et désarmé, sans réserve, sans capacité d’extension et d’adaptation (...) nous en arrivons à une situation d’impuissanc­e. »

. Soignants plus assez nombreux

« Les soignants pas assez reconnus et méprisés ne sont plus assez nombreux pour faire face à cette crise qui est partie pour durer. Partout on les cherche et les rappelle désespérém­ent, infirmiers et médecins manquent de partout, en sus des 100 000 lits fermés (...). Arrêtez de nous mettre en danger ! Arrêtez de fermer des lits et ne votez plus la fermeture des lits lors du vote dans le cadre du programme de la loi de financemen­t de la sécurité sociale (...), était l’objet chaque année d’une lettre ouverte et d’un appel alarmiste du terrain à nos élus législateu­rs, appuyés par le rapport du Sénat. En vain ! (...) Notre colère est immense à leur égard ! Ils le savent .»

. Seuls face aux malades

« Les soignants seront seuls, bien seuls et en première ligne dans les jours à venir, face à leurs malades si nos hôpitaux débordés, ne sont plus en capacité de les recevoir. Ils n’oublient pas et sauront rappeler à tous leurs concitoyen­s les votes des élus qui, en conscience, ont voté, ces dernières années, la fermeture des lits hospitalie­rs et validé les politiques d’austérité. »

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(Photodoc P. Bl.) « Après ce rendez-vous de l’avant raté, on doit essayer de se recentrer sur les malades », déclare le Dr Carret.

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