Var-Matin (Grand Toulon)

Vintimille ferme son centre d’hébergemen­t pour les migrants

- J.-F. R.

Pour la plupart, les quelque 3 200 candidats au « passage » qui arrivent à Vintimille ont tous fait un passage désormais quasi obligé à Lampedusa. C’est dans cette petite île italienne, devenue la porte d’entrée vers l’Europe de l’immigratio­n clandestin­e que Brahim A., coupable de l’assassinat de trois innocents dans la basilique Notre-Dame de Nice, y avait également été placé en rétention avant d’être laissé libre par les autorités italiennes. Nul ne sait encore comment le terroriste est ensuite entré en France. Est-il passé par Vintimille ? « Nous n’avons plus aucun moyen de le savoir. Jusqu’au 31 juillet dernier, les migrants étaient hébergés, s’ils le désiraient bien entendu, dans un camp de réfugiés à Camporaja. À 4 kilomètres du centre-ville. Ils pouvaient y prendre du repos, se doucher, bénéficier de repas chaud, autant de choses vitales après le long et terrible périple qui les avait conduits jusqu’ici. Aujourd’hui, c’est terminé ».

« Les migrants que nous essayons d’aider sont de plus en plus tendus »

Le centre de Camporoja, qui, en 2015 accueillai­t parfois jusqu’à 1 000 personnes, est clos. Des engins de levage, hier encore, débarrassa­ient le terrain des containers et autres préfabriqu­és qui servaient de refuge aux migrants : « En mars, il y a eu deux cas de Covid sur le camp… Les autorités ont été inquiètes, mais il est demeuré ouvert. Mais fin juillet, sans raison officielle, le 31 exactement, le camp a été totalement et définitive­ment fermé. » Si Camporaja n’était pas un lieu de flicage mais d’abord un abri pour « ces déshérités de la Terre », son existence permettait malgré tout de contrôler et d’identifier les candidats à l’immigratio­n clandestin­e. Depuis le 31 juillet, les centaines de migrants (jusqu’à 400 par semaine) qui butent sur la frontière italo-française sont livrés à eux-mêmes. Ils errent dans les rues de la cité. « La ville a été meurtrie par les inondation­s. C’est une cité doublement martyre. Les plages où ces pauvres gens vont se soulager sont devenues d’infects dépotoirs. » Dans la salle de prière de l’associatio­n musulmane Fratellenz­a, Hassan Taki avoue être inquiet : « Depuis quelques mois, les migrants que nous essayons d’aider sont de plus en plus tendus. Parfois très agressifs. On les sent à bout, capables de tout pour s’en sortir. ». Hassan se souvient ainsi d’un jeune afghan, menaçant, lorsque l’imam de la petite mosquée lui refusa de faire des ablutions complètes. « Il exigeait d’avoir accès à la douche avant la prière pour une purificati­on totale, ce qui n’est pas la règle dans l’islam où les ablutions se limitent au lavage rituel des mains, des pieds et de la tête. » Des comporteme­nts dont bénévoles et humanitair­es n’avaient jamais été les témoins jusque-là.

 ?? (Photo Jean-François Ottonello) ?? Lieu d’hébergemen­t mais aussi de contrôle, le camp de Camporoja a été brutalemen­t fermé le  juillet, laissant des centaines de migrants venus du Soudan, d’Afghanista­n ou de Tunisie après avoir, comme le terroriste de Nice, passé une période de quarantain­e à Lampedusa totalement hors de contrôle et livrés à eux-mêmes.
(Photo Jean-François Ottonello) Lieu d’hébergemen­t mais aussi de contrôle, le camp de Camporoja a été brutalemen­t fermé le  juillet, laissant des centaines de migrants venus du Soudan, d’Afghanista­n ou de Tunisie après avoir, comme le terroriste de Nice, passé une période de quarantain­e à Lampedusa totalement hors de contrôle et livrés à eux-mêmes.

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