Tendre la main
Les premiers mots du e Président des Etats-Unis, Joe Biden, ont été bien sûr pour célébrer la victoire de l’unité, qu’il a assuré vouloir incarner pendant les quatre futures années. Cet appel à l’union pourrait après tout paraître banale. Tous les Présidents, en Europe et ailleurs, n’ont-ils pas affiché, dans leur premier discours, sitôt annoncée leur victoire, la même volonté d’être au service de tous les citoyens et pas uniquement de ceux qui les avaient élus ? A ceci près que, dans la bouche de Biden, l’unité apparaît d’abord comme un défi. Un défi, parce que la campagne qui vient de se dérouler aux Etats-Unis a révélé une fracture beaucoup plus profonde encore qu’on ne le croyait, vue du Vieux Continent, qui pourtant s’y entend en matière de divisions. C’est que Donald Trump, avec ses qualités (il en a eu, si on en croit les millions d’électeurs qui ont voté pour lui) et ses défauts, n’a jamais cherché, pendant toute la durée de son mandat, la moindre concorde que ce soit entre ses amis et ses adversaires politiques. Au contraire, il a incarné vigoureusement, sans jamais se préoccuper du camp adverse, ce pour quoi il avait été élu : une Amérique seule face au monde tout entier, souveraine, prête à livrer toutes les guerres commerciales, – Chine, Corée, Europe –, pour sauvegarder l’emploi, dans tous les secteurs de l’économie américaine, même dans les industries du passé, comme le pétrole, parlant, lui si riche, d’enrichissement pour tous, une Amérique libérale, au point de ne pas vouloir opposer la moindre digue à la pandémie du coronavirus, une Amérique rurale enfin plus que citadine, et à ce titre profondément déchirée.
C’est de ce monde qu’hérite Joe Biden. Et ce ne sont pas les scènes, diffusées depuis une semaine par les télévisions du monde entier qui prouveront le contraire. On a pu observer au-delà des images, une sorte de haine entre deux Amérique, au point d’envisager, en cas de défaite de Trump, un véritable chaos. Voilà pourquoi le nouveau Président, redoutant que les Etats-Unis se désunissent, poussés dans cette voie par la brutalité de Donald Trump, a parlé, dès les premières minutes, de réconciliation. Il s’est posé avant tout en réunificateur. On ne peut, de ce point de vue, que lui souhaiter bonne chance, tant la gageure semble difficile après quatre années de batailles rangées entre républicains et démocrates. Sur les quatre priorités qu’il s’est fixées, la lutte contre le coronavirus, la reconstruction économique, l’égalité raciale et le changement climatique, il sera en effet difficile, mais nécessaire, de tendre la main aux républicains.
« Il s’est posé avant tout en réunificateur. »