Var-Matin (Grand Toulon)

Vingt-cinq ans de recherches pour l’orange parfaite

Après avoir testé des variétés du monde entier dans la campagne hyéroise, ce fils de viticulteu­r est l’un des rares dans le Var à cultiver des oranges douces. Suite de notre série sur les agrumes

- S. M.

Disons-le tout de go : André Fille ne nous laissera pas pénétrer dans son orangeraie pour photograph­ier les fruits en pleine maturité. D’un naturel précaution­neux, il ne veut pas attirer les maraudeurs pour avoir déjà subi des vols de récolte. Autre élément, il ne saurait inciter la concurrenc­e à lui couper l’herbe sous le pied. Voilà vingt-cinq ans que ce Hyérois teste des variétés d’orange du monde entier dans sa campagne. Tout juste saura-t-on que les deux qu’il a retenues sont de type Navel qui, contrairem­ent aux Thomson, est muni d’un second fruit à l’apex, comparable à un nombril humain (navel, en anglais). Depuis cinq ans, ces deux variétés lui permettent de produire de novembre à mars. Confiées à des grossistes, ses oranges douces sont aussi vendues au Domaine du Moulin sur la route de l’Ayguade. « J’ai été contacté par des grossistes de Rungis, mais je ne donne pas suite pour l’instant, même si les volumes ne me font pas peur. Je ne travaille pas à moins de 150 ou 200 kg par commande ».

La passion du vin, l’orange et l’olive

André Fille est passé à l’orange par filiation. Quelques-uns parmi ses aïeux s’occupaient des orangeraie­s dans le secteur du Park Hôtel, dont le fameux jardin du Roy qui fournissai­t la cour à Versailles. En ce temps, son patronyme s’écrivait Filhe, d’où le nom du domaine viticole Filhéa qu’il dirige, sur la route de La Crau. « J’ai toujours gardé le rêve de créer une cave comme mon père, tout comme j’ai conservé la passion de l’orange et de l’olive » qu’il cultive sur deux hectares à la Moutonne.

« Dans le milieu agricole, tout le monde me connaît ! », sourit-il. Après sept ans d’études (maîtrise de biochimie, licence de biologie et physiologi­e végétale) achevées à l’école d’agronomie de Montpellie­r, André Fille a créé un laboratoir­e de recherche in vitro appliqué aux plantes. Il a ensuite exercé à la tête de sa société de vente de plants et semences de fleurs pendant trente ans, au marché aux fleurs d’Hyères puis à la Moutonne. Avant donc de tomber dans la vigne et les agrumes, des oranges à 80 %, mais aussi des pamplemous­ses rouges et des mandarines, mûres de Noël à février.

Cueillies, lavées à la main et vendues

« Une orange est fraîche quand son pédoncule reste vert, explique-t-il. Chez nous, les fruits ne sont pas placés en chambre froide. À peine cueillies et lavées à la main, les oranges sont vendues ». Une culture sans pesticide ni fongicide visant à stériliser la peau en prévention des moisissure­s de Penicilliu­ms. Détenteur d’un certificat phytosanit­aire, André Fille ne prétend pas à l’appellatio­n bio. « J’ai déjà un contrôle par an, ça me suffit », glisse-t-il. Expliquant qu’Hyères fut le berceau d’implantati­on des oranges navel, « une ville d’orangers avant d’être une ville de palmiers », il se réjouit de voir les bigaradier­s perdurer dans les rues de la ville, dans les quartiers Godillot et de la gare, notamment. Ces arbres portent des oranges amères, c’est toute la différence avec la production dont André Fille garde jalousemen­t la recette.

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(Photo S. M.) André Fille, du domaine Filhéa, perpétue la tradition de culture des oranges à Hyères.

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