Var-Matin (Grand Toulon)

Tout sauf des manchots

Avec sa fusion entre le jazz et les influences électroniq­ues, le trio de Manchester s’est construit une belle notoriété. Il revient avec un live enregistré dans le mythique Studio 2 d’Abbey Road.

- JIMMY BOURSICOT jboursicot@nicematin.fr

Le mélange des genres commence toujours par hérisser le poil de ceux qui se présentent comme des « puristes ». Bien avant GoGo Penguin, d’autres artistes de la trempe de Miles Davis, John McLaughlin ou encore Stanley Clarke et Herbie Hancock avaient dû faire face aux critiques acerbes de gardiens du temple trop zélés. À la fin des années 1960, leur jazz-rock, ou jazz fusion, était considéré comme impur et quand même pas très sérieux.

De la baleine au hamster

Le temps a fait son oeuvre et le jazz-rock a fini par gagner ses lettres de noblesse et devenir l’une des formes d’expression du jazz. Actif depuis 2012, GoGo Penguin doit encore se coltiner ce type de débat. Jazz, pas jazz ? Fréquentab­le ou indigne ? « Il y a sûrement des gens qui pensent que notre musique est un outrage au catalogue

Blue Note », estimait le groupe anglais en 2018, dans une interview donnée au magazine azuréen Nouvelle Vague.

Rob Turner, le batteur, semblait en avoir assez de devoir s’appesantir sur la question, comme le relevait France Musique. « C’est un peu comme le mot ‘‘mammifère’’, qui désigne tout autant la baleine que le hamster. Les gens dépensent tellement d’énergie dans des discussion­s qui n’en finissent pas au sujet de ce qui est jazz ou non… L’important pour nous est d’écrire de la bonne musique, c’est là-dessus que nous préférons nous concentrer. »

Le feu et la glace

Autant inspiré par Esbjörn Svensson Trio et Erik Satie, que par Aphex Twin, Massive Attack ou encore Brian Eno, le trio formé par Rob Turner, Chris Illingwort­h (piano) et Nick Blacka (contrebass­e) a su trouver son propre style. Sur leur cinquième album, homonyme, sorti en juin dernier, les Mancuniens semblent même avoir atteint leur plénitude. Cérébrale mais pas pompeuse, leur musique allie le côté métronomiq­ue et très précis de la musique créée par ordinateur aux notes plus chaleureus­es héritées du jazz. Une recette qui permet à GoGo Penguin d’avancer dans un minimalism­e raffiné avant de basculer vers plus d’intensité. Avec ce troisième disque pour le label Blue Note (les précédents étaient édités par Gondwana) sous le bras, les Britanniqu­es avaient prévu de tourner partout dans le monde. Raté.

Concert sous cloche, pas sans saveur

Mais en guise de lot de consolatio­n, ils ont pu pousser les portes d’Abbey Road, à Londres, et de son mythique Studio Two. L’antre à l’acoustique magique où les Beatles ont enregistré une grande partie de leurs chansons. Le but de cette visite, le 29 octobre dernier, était de livrer une performanc­e live, diffusée sur Internet. « C’est un endroit vraiment spécial et on cherchait un endroit intime dans lequel nous pourrions retrouver l’excitation incomparab­le de la performanc­e live », a expliqué Chris Illingwort­h.

Pour Nick Blacka, il aurait été difficile de trouver meilleur point de chute : « Le Studio 2 est habité par les fantômes des musiciens incroyable­s qui s’y sont produits. Il a une atmosphère qui lui est propre. On ressent vraiment l’étendue du temps, tout ce qui s’est passé avant vous et ce qui continuera à se passer après vous. »

Ce qui ne devait être au départ qu’une session éphémère s’est transformé en EP. On y retrouve deux titres tirés d’anciens projets (Protest, issu de l’album Man Made Object, ainsi que Bardo, qui figurait sur l’EP Humdrum Star).

Pour le reste, que du neuf. Et même du très neuf, puisque le premier extrait présenté en vidéo, Petit_a, ne figurait que sur la version japonaise du disque Gogo Penguin .Puristes ou aventureux, les fans de jazz raffolent des collectors.

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GoGo Penguin Live from Studio . (Blue Note).  titres.

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