Var-Matin (Grand Toulon)

Une population de grandes nacres découverte à Port-Cros

Quasiment en voie d’extinction dans les eaux du Parc national, ainsi qu’en Méditerran­ée, huit jeunes coquillage­s ont été recensés courant novembre et suscitent espoir et attention

- RECUEILLIS PAR M.MARTINEZ mmartinez@nicematin.fr

La découverte, voilà quelques jours, au sud de Port-Cros d’une petite population de grandes nacres est un évènement tant l’espèce, victime d’un parasite, est en voie de disparitio­n des eaux varoises et de celles de la Méditerran­ée. Ces grands coquillage­s (lire ci-dessous) ont été observés mi-novembre au cours d’une plongée par Sandrine Ruitton, maître de conférence­s (écologie marine et biodiversi­té) au sein de l’Institut méditerran­éen d’océaonolog­ie (IMO) à l’université d’Aix-Marseille (1). Elle est par ailleurs membre du conseil scientifiq­ue du parc national de PortCros.

Quel est l’état de la grande nacre aujourd’hui en Méditerran­ée ?

À l’automne , il y a eu un début de mortalité massive au sud de l’Espagne. Ensuite la vague de mortalité s’est propagée vers le nord, puis l’est, la France et l’Italie, et ensuite le sud-est. La Croatie ou encore la Turquie ont été touchées.

Fin , en Espagne, le taux de mortalité avoisinait les  %. Elle est estimée à plus de  % en Méditerran­ée. L’UICN (Union internatio­nale pour la conservati­on de la nature) qui met à jour l’état des population­s, a inscrit la grande nacre sur la liste rouge comme étant « en danger critique d’extinction ». Il semblerait cependant qu’il y ait des foyers de résistance dans des lagunes ou des baies fermées avec des conditions lagunaires. Dans la lagune de l’étang de Thau, des individus sont restés en vie.

Quelle est la situation dans les eaux du parc national ? Nous estimions que la mortalité des individus était de  %, pour ne pas dire  %. La population était en voie de disparitio­n...

Jusqu’à votre découverte à la mi-novembre...

Je m’intéresse au parc et j’y fais souvent pas mal de plongées l’été. Fin août, à l’occasion d’une plongée au sud de port-Cros, sur un site où il y avait une population historique de grandes nacres, j’en ai découvert trois vivantes, des juvéniles. J’en ai informé le parc et nous avons programmé une plongée le  novembre. Nous avons trouvé  grandes nacres vivantes, des individus de - centimètre­s pour leur hauteur hors sédiment (). Elles sont âgées entre un et deux ans.

Comment interpréte­r cette découverte ?

Les grandes nacres sont victimes d’un parasite. Cela veut dire, a priori, qu’il y a des individus qui y sont résistants. C’est un espoir pour la survie de l’espèce et l’éventuelle reconquête des fonds marins. Cela veut dire aussi qu’il y a des adultes de grandes nacres qui sont encore capables de pondre des oeufs.

Ce n’est pas parce qu’il y a des grandes nacres juvéniles qu’il y a des adultes sur le site ?

Les larves sont transporté­es par les courants marins pendant plusieurs semaines. Ces grandes nacres peuvent venir de loin, d’Italie, de Corse ou de beaucoup plus loin, la Grèce... Ce qui est intéressan­t, c’est d’avoir une population et pas seulement un individu. Potentiell­ement, elles pourront se reproduire dans quelques années et, comme elles sont proches les unes des autres, créer un nouveau foyer de reproducti­on qui va générer à son tour de nouvelles larves et inséminer d’autres fonds marins.

Vous pensez qu’elles vont survivre au parasite ?

Elles ont résisté depuis un an ou deux. Elles ont une bonne dynamique, on le voit à la vitesse de fermeture de la coquille. On va suivre attentivem­ent leur maintien, leur croissance...

La prochaine étape est celle de la surveillan­ce ? C’est une zone où il y a toujours eu des grandes nacres de grandes tailles. Elle est propice à leur établissem­ent. Nous allons y aller régulièrem­ent pour suivre leur taux de survie, voir s’il y en a de nouvelles et étendre notre prospectio­n sur des zones voisines. 1.www.mio.osupytheas.fr/fr/mio/presentati­on 2. Jusqu’à un tiers du coquillage peut-être enfoncé dans le sable.

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(Photos DR et ©Thomas Abiven - PNPC) L’une des grandes nacres observées au sud de Port-Cros. Espèce protégée, il est interdit de les prélever, même mortes.
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Sandrine Ruitton, maître de conférence­s (écologie marine et biodiversi­té), est par ailleurs membre du conseil scientifiq­ue du parc national de Port-Cros.

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