Var-Matin (Grand Toulon)

Paganelli se livre sur ses années Sporting

- EDITH BOUVIER

Dans la salle d’assises spécialeme­nt constituée, les avocats des parties civiles se suivent et racontent les uns après les autres, la douleur des familles des disparus. Nathalie Senyk refait le fil de l’attentat, le 7 janvier 2015, contre la rédaction de Charlie Hebdo. La première victime des frères Kouachi lorsqu’ils pénètrent dans la salle où sont réunis les journalist­es, c’est Franck Brinsolaro, ce flic toulonnais d’exception transpercé par les balles des terroriste­s cagoulés de noir. Quelques secondes avant, il avait reconnu le claquement sec d’un coup de feu derrière la porte capitonnée. Il n’a pas eu le temps de sortir son arme, juste celui de murmurer à Sigolène Vinson de « ne pas bouger de façon anarchique », comme elle l’a raconté pendant l’audience avec émotion. Autre journalist­e qu’il va sauver, Cécile Thomas. « Entendant le bruit des balles dans le couloir, il lui a dit : “Ce n’est pas normal” Et ce sont ces mots qui lui ont fait quitter la salle avant l’arrivée des ombres », raconte l’avocate. Franck Brinsolaro est mort en service, il avait 48 ans et a laissé deux enfants orphelins.

Une belle personne

L’avocate raconte la souffrance de son fils ainé, Kevin Brinsolaro. Ce 7 janvier, la mort de son père lui est apparue irréelle. Comme si son père ne pouvait pas mourir, comme si cela ne pouvait pas être vrai. « Il avait 25 ans en ce mois de janvier 2015. Il a eu besoin de tout claquer et a décidé de devenir policier.

Comme papa. De marcher dans ses pas. » Les pas d’un policier et un homme d’exception, un pro, devenu l’ange gardien de Charb depuis 2013. Plusieurs de ses amis sont venus le raconter. Ils ont incarné devant la cour un homme épris d’aventures, habitué des missions délicate. Dans la capitale afghane, en 1996, Franck Brinsolaro avait permis l’évacuation de quarante-six Français, exposés aux tirs des Talibans alors qu’il était chargé de protéger l’ambassadeu­r Bernard Bajolet. C’est encore un exploit quand il sauve trente-cinq enfants menacés par les combats en République démocratiq­ue du Congo. Protéger les autres du danger, les rassurer et veiller à leur sécurité, c’était inné pour Franck Brinsolaro et sa présence depuis 1993 au sein du Service de Protection de la police nationale (SDLP, ancienneme­nt Service de Protection des hautes personnali­tés) en atteste.

« Comme son père, Kévin est une belle personne. C’est quelqu’un de droit pour sa famille et ses amis. Aujourd’hui, il a su rebondir. » Me Nathalie Senyk décrit encore ce fils qui continue de se construire et de se reconstrui­re, malgré l’absence de son père. « Mon père, c’est mon héros, je voudrais lui ressembler sur deux ou trois trucs. » Kevin, à son tour, sera bientôt papa, et espère avoir la même complicité que celle qu’il partageait avec Franck. Et faire vivre encore longtemps, la mémoire de ce héros si discret.

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