« Toujours eu un coup d’avance »
Le Dr Clarisse Audigier-Valette, pneumologue, responsable de l’unité Covid-19, dresse un premier bilan de cette deuxième vague.
Comment avez-vous vécu ce second épisode ?
On a subi la première vague, pas la deuxième. On ne s’est jamais senti débordé. Nous étions beaucoup plus organisés, capables de passer d’un palier à l’autre dans un temps très restreint. On a toujours eu un coup d’avance, c’est mon impression. C’est rassurant.
Des difficultés ?
Le recrutement, car on n’a pas complètement déprogrammé les autres activités comme lors du premier confinement. Il a donc fallu trouver des gens pour absorber la surcharge de travail. On a su aussi faire plus de choses avec moins de personnels. Mais cela s’est fait, pour tous, au prix de gros efforts.
Vous connaissiez mieux la maladie. Qu’est-ce que ça a changé ?
La première fois, on hospitalisait tous les patients positifs, sans savoir comment ils allaient évoluer. Désormais on a appris à les sélectionner aux urgences, avec des critères très précis. Malgré ça, même en ne prenant que les cas sévères, on a eu plus de patients ! Mais on n’a pas eu à faire de choix faute de place.
La prise en charge a évolué ?
La possibilité de mettre les patients sous oxygène à très haut débit dans notre service a été déterminante. On a pu traiter plus de patients de cette façon et éviter de les intuber en réa parce que le service biomédical a fait un énorme boulot pour équiper des chambres. Normalement, seuls les réas et les blocs le sont. La consommation d’oxygène de l’hôpital a d’ailleurs fortement augmenté et témoigne du « pic » de cette deuxième vague. En temps normal, on consomme chaque jour % de notre réserve. On était passé à , % lors de la première vague. Cette fois-ci on est monté jusqu’à % lors du pic, les et novembre, avant de redescendre doucement autour de %.
Comment appréhendez les fêtes de fin d’année ?
On sent bien que ce n’est pas encore fini. Il faut que nous soyons prêts à avoir une activité Covid pérenne. La Covid va rester. On voit bien ce que ça donne aux États-Unis, après les fêtes de Thanksgiving, avec des gros mouvements de population et les repas de famille. Il faut garder la plus grande prudence. Et aérer ! Aérez souvent : avec les gestes barrières, c’est la clé pour éviter les transmissions par aérosols.
Une mise en garde ?
Faire un test deux jours avant le réveillon ne garantit pas qu’on pourra embrasser tout le monde en toute sécurité. Le résultat est valable à l’instant T. On peut se contaminer juste après ! En cas de signes cliniques, on reste chez soi. En famille, on continue de faire très attention. Sinon, il y aura des clusterse familiaux et une vague dès fin janvier.
Et vous serez prêts ?
Il faut apprendre à vivre avec la Covid. C’est ce qu’on fait au niveau hospitalier. On désarme petit à petit, mais on va créer une réserve sanitaire interne pour ne pas perdre le bénéfice des formations qui ont été mises en place. On sera encore plus à même de basculer rapidement en mode Covid. On est prêt pour la troisième vague…
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