Var-Matin (Grand Toulon)

« Génération Covid » : opération séduction d’Emmanuel Macron

Le chef de l’Etat a choisi, hier, de répondre en direct au média Brut, très présent sur les réseaux sociaux. Une manière de toucher les jeunes frappés de plein fouet par la crise économique et sanitaire

- AMANDINE REBOURG arebourg@nicematin.fr

Emmanuel Macron souhaitait s’adresser à la « génération Covid ». Car les jeunes sont frappés de plein fouet par la crise économique et sanitaire, et le chef de l’Etat l’avait résumé le 14 octobre dernier, en lançant : « C’est dur d’avoir 20 ans en 2020. »

Alors pour parler à cette jeunesse, il s’est adressé, hier, à Brut, le média en ligne connu pour sa couverture, notamment des différente­s manifestat­ions et des faits de société. Cet entretien a duré 2 h 30. En voici l’essentiel.

« Violences policières » ? « Des violences faites par des policiers »

Emmanuel Macron n’y est pas allé par quatre chemins au cours de cette longue séquence sur le sujet des violences policières mais c’est un exercice d’équilibris­te qu’a opéré le chef de l’Etat. Selon lui, il existe des

« violences faites par les policiers », récusant le terme de « violences policières », trop politisé à son goût. « Il y a des policiers qui sont violents » et

« il faut les sanctionne­r », a-t-il dit. Les images de l’affaire du producteur de musique Michel Zecler lui ont fait « honte », il l’a redit, longuement.

« Ces policiers ne sont pas exemplaire­s », a-t-il lancé tout en estimant qu’il fallait comprendre les raisons de ces comporteme­nts. « La sanction doit être implacable pour ne pas salir, aussi, l’ensemble des policiers », selon lui. Les caméras-piétons seront d’ailleurs déployées à partir de juin 2021.

Plus largement, c’est « la violence de la société » qui l’interpelle et pour laquelle, c’est la « zéro tolérance » qui doit primer. Mettant clairement en cause les Black Blocs, ces manifestan­ts ultraviole­nts, il a dénoncé les violences subies par une commissair­e, le week-end dernier, place de la Bastille. Un personnel des forces de l’ordre « attaqué par des fous, des gens ensauvagés », selon lui. Et d’en appeler à la jeunesse, lors des manifestat­ions : « J’ai besoin de vous pour sortir ces gens des manifs. »

Une plateforme contre les discrimina­tions lancée en janvier

Sur le même thème, l’autre défi qu’il faudra relever est la question des contrôles au faciès. « Aujourd’hui, quand on a une couleur de peau qui n’est pas blanche, on est beaucoup plus contrôlé [...] On est identifié comme un facteur de problème et c’est insoutenab­le », a-t-il déclaré. Il a ainsi promis la mise en place d’une plateforme, gérée par l’Etat, le défenseur des droits ainsi que la Licra.

Laïcité et immigratio­n

Il en est convaincu : «LaFrancen’a pas fini le travail sur la guerre d’Algérie. » Réconcilie­r les mémoires, tel est le but de ce travail sur lequel planche d’ailleurs l’historien Benjamin Stora à qui un rapport sur le sujet a été demandé. Une analyse qui devrait permettre, selon le chef de l’Etat, « de réconcilie­r des mémoires parce que nous avons dans notre pays des tas de mémoires de la guerre d’Algérie, qui sont autant de blessures ».

Autre sujet abordé : la question de la laïcité avec les affaires Mila et Mennel. Toutes deux ont été harcelées et menacées de mort sur les réseaux sociaux en raison de leurs positions sur l’Islam. « On est devenus fou et les gens ne respectent pas un principe fondamenta­l de la République qui est ce qu’on appelle la laïcité, c’est-à-dire le fait que vous pouvez en France croire ou ne pas croire librement », a-t-il rappelé. Interrogé sur le fait que certains jeunes Français ne sentaient pas « Charlie », il a affirmé qu’« être français » en 2020, c’est « participer à un projet, une citoyennet­é », « adhérer à des valeurs, à cet Etat et appartenir à une histoire ».

Réouvertur­e des université­s et nouvelles aides à venir

Emmanuel Macron a assuré être conscient de la difficulté de certains étudiants avec la fermeture des université­s en raison de la crise sanitaire. Il a donc fait une promesse : « Tout faire pour pouvoir commencer un peu plus tôt en janvier, pour rouvrir travaux dirigés et demi-amphis » dans les université­s. Le tout étant soumis, bien sûr, à la situation sanitaire dans les prochaines semaines. Il a aussi estimé qu’il fallait sans doute envisager « une nouvelle aide exceptionn­elle », d’un montant équivalent à celle accordée ces dernières semaines, de l’ordre d’une centaine d’euros : une aide à destinatio­n des jeunes précaires « dès janvier » .Ila également estimé qu’il fallait «une améliorati­on du système de bourses » et redit ne pas être un « grand fan du RSA avant 25 ans ». Selon lui, et sur sa ligne, il estime plutôt que le « grand défi, c’est le rapport au travail », dans notre société en général.

La sortie du glyphosate ? « Un échec collectif »

S’agissant du glyphosate, il a reconnu « un échec collectif » mais a campé sur ses positions : «Jen’ai pas changé d’avis », à propos de son tweet publié en 2017 relatif à l’interdicti­on de ce pesticide dans les trois ans. « Pourquoi on n’a pas réussi ? [...] Quand les autres ne vont pas au même rythme que nous, ça crée de la distorsion de concurrenc­e et on sacrifie notre agricultur­e pour régler le problème », a-t-il déploré. Selon lui, c’est une bataille européenne, et « on ne peut pas gagner une bataille seul, si on n’a pas les autres européens » avec soi.

Et alors, en 2022, candidatur­e ou pas ?

Alors que certains sont déjà dans les starting-blocks pour lancer leur campagne, lui exclut toute annonce en ce sens. Il s’est refusé à dire qu’il allait être candidat en 2022. «Sijeme mets dans la situation d’être un candidat, je ne prendrai plus les bonnes décisions, j’en suis convaincu » ,a certifié le chef de l’Etat.

 ?? (Doc BFMTV) ?? Candidat à sa propre réélection en  ? Rien n’est décidé mais rien n’est exclu non plus.
(Doc BFMTV) Candidat à sa propre réélection en  ? Rien n’est décidé mais rien n’est exclu non plus.

Newspapers in French

Newspapers from France