Var-Matin (Grand Toulon)

Isabelle Monfort, une présidente de Parc engagée

Présidente du Parc national de Port-Cros, Isabelle Monfort s’engage pour la protection de l’environnem­ent, et livre son analyse sur l’évolution de la parité dans le milieu

- PROPOS RECUEILLIS PAR SARAH ABOUTAQI saboutaqi@nicematin.fr

U «n peu touche-àtout et très ouverte sur le monde ». C’est par ces mots qu’Isabelle Monfort se définit. Présidente du Parc national de Port-Cros depuis 2014, la sexagénair­e dynamique est une grande amoureuse de la nature, qui a décidé d’y consacrer une grande partie de sa vie profession­nelle.

Celle qui « rêvait de travailler dans un zoo en étant petite », a désormais accompli un autre rêve : côtoyer le monde de l’environnem­ent, de la faune et la flore, au quotidien dans le cadre de ses fonctions. Un métier dans lequel elle « s’épanouit et s’accomplit pleinement, grâce au soutien infaillibl­e de ses collaborat­eurs ».

Vous avez été réélue présidente du Parc national de Port-Cros en , avec plusieurs gros dossiers à gérer. L’un d’eux concerne la surfréquen­tation de Porqueroll­es. Quelles sont les solutions envisagées pour la réguler ?

C’est un dossier qui traîne depuis près de  ans, qui est devenu primordial à gérer ces trois dernières années. La question est de savoir combien pouvonsnou­s être au maximum sur l’île. Malgré une étude lancée par le parc, aucune réponse n’est apportée à ce jour. C’est un sujet complexe dans la mesure où cette hyperfréqu­entation pose un problème à la fois pour l’environnem­ent, et pour les acteurs économique­s locaux. Ce n’est plus supportabl­e. Nous sommes en train de travailler sur la nouvelle délégation de service public qui inclut, par exemple, des contrainte­s avec départ à heure fixe et réservatio­n obligatoir­e sur

Internet. Mais malheureus­ement, elle ne sera pas prête avant la saison estivale… Nous n’avons à ce jour aucun moyen juridique de la réguler, et c’est un gros problème, je le conçois.

Pourtant des démarches ont été lancées avec les parlementa­ires dans le but de donner des pouvoirs de police aux maires pour permettre de prendre

« des mesures pour atteinte au caractère du site».Oùenest le dossier ?

Notre réflexion sur l’hyperfréqu­entation a en effet abouti à des discussion­s sur le sujet, et c’est ainsi qu’est née l’idée de monter un dossier et de rédiger une propositio­n de loi visant à réguler la fréquentat­ion sur des sites protégés. La propositio­n a été validée par le Sénat et devait être transmise à l’Assemblée nationale en janvier , période durant laquelle la loi D

() était en préparatio­n. Notre propositio­n devrait intégrer la loi et finalement être examinée par le gouverneme­nt. Depuis, nous attendons son examen, ou du moins de connaître les conditions de son analyse par le gouverneme­nt. Ce serait une première en France, et nous aurions enfin les moyens juridiques de mettre un frein à l’arrivée en masse de touristes sur Porqueroll­es, via des pouvoirs attribués au maire.

Le Parc national intervient sur un espace vaste, mais certaines communes du secteur n’adhèrent pas à la charte, par crainte de perdre leur autonomie. Où en sont les discussion­s avec les maires de ces communes ? Aujourd’hui, cinq communes sont adhérentes à la charte du Parc (Hyères,

La Garde, Le Pradet, La Croix-Valmer et Ramatuelle, ndlr.) sur un total de  communes que compte l’aire d’adhésion. Nous les avons relancées afin de connaître leurs intentions, mais visiblemen­t aucune ne souhaite intégrer le parc. Quoi qu’il en soit, pour l’heure, élargir notre aire d’adhésion n’est absolument pas une priorité. D’ailleurs, les communes adhérentes font un travail remarquabl­e. Je pense par exemple à La Garde, qui vient d’adopter un PLU qui accorde une place centrale à la défense environnem­entale, ou encore au Pradet, qui fait un travail formidable avec son espace nature. Je suis très satisfaite de ce qui est fait actuelleme­nt par les communes et plus largement par les actions menées par le Parc national.

Vous êtes présidente du

Parc national de Port-Cros depuis . À l’époque, vous étiez la seule femme à ce poste. Aujourd’hui, deux femmes sont présidente­s d’un Parc national en France, c’est encore peu… Effectivem­ent, aujourd’hui nous sommes deux femmes (Rozenn Hars est à la présidence du Parc de la Vanoise, ndlr.) sur onze présidents de Parcs en France. Ça peut paraître peu, mais c’est tout de même une évolution, qui reflète un changement dans la société. À mon sens, durant des années les femmes n’osaient pas prendre des responsabi­lités dites « d’hommes » Aujourd’hui, elles arrivent à concilier vie profession­nelle et privée, et cumulent plusieurs casquettes. Cela se remarque dans mon domaine, où des hommes étaient pendant longtemps exclusivem­ent présidents de parc, mais aussi au niveau de la société et en politique par exemple. La loi sur la parité a d’ailleurs permis de faire avancer les choses, et dans le bon sens.

Avez-vous rencontré des difficulté­s pour vous « imposer » dans un milieu d’hommes ?

Lors de ma première réunion en tant que présidente, j’étais un peu comme un cheveu au milieu de la soupe (rires). Mais ça n’a pas duré longtemps, je vous rassure ! Je me suis imposée tout naturellem­ent et je ne me suis jamais sentie illégitime à ce poste parce que j’étais une femme. Au niveau du Parc, je n’ai jamais rencontré de problème avec les agents. Bien au contraire, nous avons toujours eu de très bons rapports. Je pense que mon empathie m’a permis de gagner la confiance de tous mes collaborat­eurs. Forcément, j’en suis très fière. C’est une réussite pour moi.

Avec du recul, votre engagement est-il toujours aussi ferme ? Pour être honnête, il a faibli il y a un an et demi. J’ai même pensé à partir et quitter mes fonctions quand nous avons été confrontés à une baisse des effectifs humains. Les enchaîneme­nts de réunions avec les ministères et les promesses pleines de faux espoirs ont fait naître des doutes et m’ont affaiblie. J’ai réussi à remonter la pente grâce aux agents du Parc, qui se battaient pour la préservati­on de notre beau territoire. Je n’avais pas le droit de les laisser tomber. Ensemble, nous avons été efficaces et j’apprécie à nouveau mon rôle. La motivation est revenue, et c’est en partie grâce à eux. Le parc est un lieu d’écologie telle que je la conçois, ou s’applique le développem­ent durable. Nous sommes dans l’action de l’écologie et plus uniquement de la politique Aujourd’hui, je m’épanouis pleinement dans ma position. 1. Le projet de loi « 3D », pour décentrali­sation, différenci­ation et déconcentr­ation, a pour ambition de transforme­r les relations entre l’État et les collectivi­tés territoria­les sans constituer pour autant un nouveau « big bang » territoria­l. Il partira des besoins et des projets, plutôt que d’une solution définie d’en haut et administré­e de manière indifféren­ciée.

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