Var-Matin (Grand Toulon)

L’INCROYABLE SCÉNARIO

Facile leader du général, hier matin à Plan-du-Var, Primoz Roglic a chuté deux fois et perdu le Maillot Jaune. Schachmann a récupéré la tunique par miracle.

- CHRISTOPHE­R ROUX

Paris-Nice était promis à Primoz Roglic, mais celui-ci a chuté deux fois hier et a dû céder son trône. L’Allemand Maximilian Schachmann conserve son titre. Christophe Laporte, favori de la dernière étape à Levens, s’est encore fait avoir sur la ligne...

Il avait peint un tableau de maître sur lequel ne manquait plus que ses initiales dorées. Il avait gagné dans une bosse à Biot, à Chiroubles et La Colmiane, arrivées au sommet. Sa main écrasait la course sur tous les terrains, partout, tout le temps. L’emprise de Primoz Roglic était si puissante que personne n’avait pu la desserrer. Les mots de ses adversaire­s étaient ceux de l’impuissanc­e ou de la résignatio­n. Cette semaine, les superlatif­s ne manquaient pas dans le peloton pour qualifier sa démonstrat­ion. Le vainqueur sortant Maximilian Schachmann pointait « son équipe de dingues ». Le premier Français du général Guillaume Martin le disait « impérial », et Julien Jurdie en faisait l’un « des extraterre­stres » du cyclisme moderne. Le directeur sportif d’AG2RCitröe­n le plaçait aux côtés d’Alaphilipp­e, van der Poel et van Aert, autres artistes merveilleu­x. Un convoi auquel il convient d’ajouter Tadej Pogacar, dernier phénomène à la mode qui empile les victoires comme on amasse les livres dans une bibliothèq­ue. Hier, l’autre cador slovène a conservé les rênes de Tirreno-Adriatico.

Roglic : « J’ai fait des erreurs »

Les louanges adressées à Roglic ne sont pas mortes. Le grimpeur de 31 ans reste un homme qui compte. Il continuera de lever les bras et d’enchanter sa patrie et ses supporters, mais personne n’oubliera sa sortie de route, hier, au bout d’un 79e ParisNice qu’il a perdu bien plus que Schachmann ne l’a remporté. Victime d’une première chute au 20e kilomètre, le double vainqueur de la Vuelta (2019-2020) a regoûté au bitume à 25 km de la ligne. Cuissard déchiré des deux côtés, cuisse gauche ensanglant­ée, le leader de la Jumbo a fait rouler ses équipiers, Bennett et Kruijswijk. Il est revenu à 10’’ du peloton mais il n’a jamais pu rentrer. Le Néo-Zélandais et le Batave ont roulé trop fort et ils ont explosé en vol, laissant leur leader seul contre tous. Désabusé et lancé dans une course poursuite perdue d’avance, Roglic a pu compter sur le soutien inattendu du Tricolore Nacer Bouhanni, qui l’a ramené en partie. Mais il a quand même vu s’envoler ses 52 secondes d’avance sur Schachmann, son dauphin hier matin.

Alors qu’il avait semblé cadenasser la course, Roglic s’est raté dans les grandes largeurs, comme son équipe qui a complèteme­nt paniqué. Une aubaine pour le reste de la meute. Dépourvues de solutions pour déstabilis­er le champion de Slovénie, Bora et Astana ont mis en branle une coalition pour l’écarter pour de bon. A l’arrivée, l’addition est salée pour le natif de Trbovlje (3’08’’ concédées à Schachmann). Le leader du général a bouclé la Course au soleil au 15e rang, dépité et à 2’16’’ de l’Allemand. «Ça n’a pas été l’étape que nous espérions. J’ai fait des erreurs et c’est dommage. J’ai tout donné ensuite pour revenir devant, je me suis battu contre moi-même quand je me suis retrouvé seul, mais ça n’a pas suffi », a déploré le numéro 1 mondial, les yeux rougis. On pensait le boss de la Jumbo débarrassé de ses démons. S’il avait déjà abandonné un Maillot Jaune in extemis, lors du dernier Tour de France, défaillant face à Tadej Pogacar qui l’avait dévoré sur le contre-la-montre programmé à la Planche des Belles-Filles, veille d’arrivée à Paris, le Slovène était reparti en chasse. Il avait fait le point sur son matériel de chrono, remporté la Vuelta et Liège-Bastogne-Liège. Hier, il est retombé dans ses travers, mais il n’a pas voulu parler d’un éventuel problème psychologi­que ou d’un futur blocage au moment de parachever ses oeuvres. « C’est le sport et je reviendrai pour d’autres combats dans de nouvelles courses. Je suis déçu mais la saison n’est pas finie et je regarde devant. »

Schachmann : « Désolé de gagner comme ça »

Ce Roglic abîmé a contrasté avec la banane affichée par Schachmann. Incapable de détrôner le patron à la pédale, l’Allemand a conservé son titre grâce aux faits de course. Une victoire tombée du ciel. « Je ne m’attendais pas à ça et personne ne pouvait l’imaginer, a-t-il reconnu, lucide et honnête. « C’était une journée de folie. Ce matin, nous visions surtout l’étape et voulions défendre ma seconde place. J’ai dit à Primoz que j’étais désolé de gagner comme ça. Il m’a dit, pas de souci, tu es le vainqueur », a ajouté le coureur de Bora qui, à 27 ans, évoque un succès qui lui donne « confiance » avant Milan-San Remo samedi prochain. Roglic, lui, a promis «deserepose­r » avant de filer au Tour du Pays Basque (5-10 avril). Un objectif, cette fois, qu’il espère ne pas laisser filer.

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Le Slovène a perdu la course sur le gong. Une mésaventur­e qu’il avait déjà connue sur le dernier Tour de France.

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