Var-Matin (Grand Toulon)

Comment leur vie a subitement changé

José Pintor, agent de voyages : Miraculé de la Covid, « Il a fallu s’adapter, sans cesse » Joël Tonelli redécouvre la vie

- P.-L. P.

Comme tant d’autres profession­nels, José Pintor, chef de l’agence toulonnais­e Ailleurs Voyages, avait été cueilli à froid à la mi-mars 2020. Et le 16 au soir de ce « mois des fous », quelques heures à peine avant le début officiel du premier confinemen­t, il avait dû fermer précipitam­ment ses locaux. « Sans même prendre le temps de faire le transfert d’appels », sourit-il.

Un an après, l’agence n’a toujours pas rouvert. Enfin pas vraiment. Un peu à la façon dont on représente les lignes aériennes sur une carte, José Pintor accueille les clients en pointillé, à raison de trois demi-journées par semaine.

« Nos clients avaient besoin d’oxygène »

Lorsque nous l’avions rencontré en juin dernier, il était loin de se douter que la crise sanitaire jouerait les prolongati­ons. Et si la reprise du secteur touristiqu­e a bien eu lieu à l’automne, comme il l’annonçait, le ciel s’est à nouveau assombri en début d’année. «Onn’a jamais autant ouvert qu’au mois de janvier. Après des mois sans pouvoir voyager, les clients se sont vraiment lâchés en début d’année. Et puis tout s’est à nouveau arrêté fin janvier avec l’interdicti­on de sortir de l’Union européenne ».

C’est ainsi. José Pintor l’accepte. S’il ne se risque plus à aucun pronostic sur le retour à la normale, il a su tirer les leçons d’une année 2020 hors du commun. Et veut croire à la résilience des agences de voyages traditionn­elles. « Au moment des rapatrieme­nts, quand les pays se fermaient, on a marqué des points auprès de notre clientèle. Ceux qui avaient préparé leurs voyages sur internet ont été un peu livrés à eux-mêmes ».

José Pintor enchaîne : «On a su être réactif, se démener pour faire partir nos clients qui avaient besoin de cette bouffée d’oxygène. Mais sans jamais leur vendre du vent, ni mettre en jeu leur santé. Bien au contraire. Ça a donné encore davantage d’humanité à notre relation ». Sera-ce suffisant ? Résolument optimiste, José Pintor veut y croire. Mais il sait bien que tous ne s’en sortiront pas dans son secteur d’activité.

Sa voix légèrement étouffée trahit encore son voyage aux portes de la mort. Atteint par la Covid en mars dernier alors qu’il ne souffrait d’aucune comorbidit­é, Joël Tonelli a passé six mois en milieu hospitalie­r, dont cinq semaines dans le coma.

Revenu des limbes, il s’en est fallu d’un rien pour qu’il ne franchisse jamais le cap des 61 ans. Aujourd’hui, le Six-fournais n’a pas recouvré tous ses moyens physiques, et ne sait pas si ce sera un jour le cas.

« Des séquelles du virus, je n’en ai plus, explique-t-il. Par contre, la réa a laissé des traces, qu’elles soient musculaire­s ou respiratoi­res. Ma vie est rythmée par les rendez-vous médicaux. J’ai du kiné tous les jours, des rendez-vous chez le neuro, chez le pneumo, chez l’ORL… Et sans suivi, je suis un peu livré à moi-même. Mais je sens que je progresse, poussé par l’envie de vivre et de retrouver l’essentiel. » Le moral est ainsi reparti en flèche.

« Même si c’est prématuré, j’aimerais gravir le Faron »

Joël Tonelli s’est découvert un intérêt pour la marche, lui qui était si sédentaire avant d’être frappé par la maladie. « La semaine dernière, je suis monté au Mai. Ça faisait une éternité. Je ne me rappelais plus que c’était si beau… J’ai pris goût au sport, au dépassemen­t de soi. Même si c’est encore prématuré de l’envisager, j’aimerais gravir le Faron », espère celui qui était il y a quelques mois encore accro au respirateu­r.

Conseiller municipal à Six-Fours, Joël Tonelli s’est également replongé «à fond » dans ses fonctions d’élu. En revanche, il n’a pas repris la moto, sa passion, faute de tonus musculaire suffisant. Avec sa femme, qui l’a veillé chaque jour, une photo de lui sur le canapé, la souffrance et la peur pour compagnon de chambrée, les liens sont puissants. Joël Tonelli rêve de l’emmener à nouveau derrière lui, dévorer l’asphalte du Var et fendre cet air qui lui avait tant manqué.

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(Photo DR) Malgré l’incertitud­e, José Pintor, le chef de l’agence toulonnais­e Ailleurs Voyages, reste optimiste.
 ?? (Photo doc. P.Bl.) ?? Joël Tonelli en compagnie de sa femme, Martine, quand nous l’avions rencontré en octobre dernier, après six mois d’hospitalis­ation.
(Photo doc. P.Bl.) Joël Tonelli en compagnie de sa femme, Martine, quand nous l’avions rencontré en octobre dernier, après six mois d’hospitalis­ation.

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