Var-Matin (Grand Toulon)

A Monaco, il frappe un collègue pour protéger son « trésor »

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Violences ! Le mot s’instruit souvent au pluriel au cours d’une même audience du tribunal correction­nel de Monaco. Les souffrance­s cumulées sont de plus en plus issues de paroles discordant­es, de complexité­s, de traumatism­es. Sans frontières, elles perfusent tous les milieux, tous les lieux. Un goutte-à-goutte pernicieux, abordé cette fois dans une affaire où le prévenu avait fait opposition au jugement du 30 juin dernier. Il avait été condamné à l’époque à une peine par défaut d’un mois d’emprisonne­ment ferme pour des brutalités. Retour sur le chantier, ce 30 juillet 2019. La période, propice à l’envolée du cours du cuivre, avait engendré une insatiable cupidité d’un ouvrier intérimair­e de 33 ans. Ce personnage caractérie­l s’était constitué un magot de métal rouge, afin de profiter de larges bénéfices par la revente aux ferrailleu­rs. Cela rapportait jusqu’à 6 000 euros la tonne en ce temps-là. Raison suffisante pour écarter des appétences d’un rapineur sur le trésor cuprifère. Prêt à tout pour le conserver, il assénait un coup de poing au visage d’un autre ouvrier qui lorgnait sur cet amas de cuivre. Mal en a pris à l’envieux. Pour l’avoir convoité de trop près, il récoltait de sa fâcheuse aventure trois jours d’ITT.

Déjà  mentions sur son casier judiciaire

Cette fois, prévenu et plaignant sont à la barre afin de donner leur propre version des faits. Comment confondre les contradict­eurs ? Le président Jérôme Fougeras Lavergnoll­e a l’occasion de

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les interroger.

D’un côté, la victime prétend « un harcèlemen­t depuis des semaines sur le lieu de travail. Cet homme me traite comme un chien. La forte douleur après le coup reçu m’a obligé à consulter dans la soirée l’hôpital de Cagnes… »

À l’opposé, les propos diffèrent complèteme­nt. «Cepersonna­ge a bien quelque chose contre moi. Je suis conscient de ne pas pouvoir agir de la sorte en Principaut­é. Je tiens à mon emploi et je ne trouverai pas meilleur ailleurs… »

À la lecture du casier judiciaire du prévenu, le magistrat prend un air perplexe. « Vous avez dix-huit mentions sur votre relevé des condamnati­ons prononcées en France pour vols, violences, recels, refus d’obtempérer, conduite de véhicule sans permis, stupéfiant­s. » Un profil délinquant repris par le Premier substitut Julien Pronier dans ses réquisitio­ns. « C’est un risque que cet homme mesure et c’est aussi l’enjeu du dossier. Pourquoi fuir ses responsabi­lités pénales ? Il y a le certificat médical et les déclaratio­ns des témoins. Enfin, les violences sont établies avec une dix-neuvième mention sur son casier. »

« Laissez-moi ma chance »

Puis, le parquetier s’adresse au prévenu : « Quelques réflexes subsistent en vous. La condamnati­on de 2020 démontre que vous avez encore des ardeurs belliqueus­es. On ne peut pas faire fi du casier. Je sollicite la reconduite à la prison. »

Sans avocat pour assurer sa défense, le trentenair­e a conscience qu’il n’est pas parfait. « Dans ma jeunesse, j’ai fait des erreurs. Mais je m’intéresse à mon avenir. Il doit être guidé par aucune déviation du droit chemin. Je ne mens pas. J’ai deux enfants. Laissez-moi ma chance. » C’est possible pour le tribunal avec une condamnati­on à trois mois avec sursis.

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(Illustrati­on NM) À l’origine du conflit, un amas de cuivre sur un chantier.

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