L’Ukraine accuse Moscou de masser des troupes
Des responsables ukrainiens ont fait état de ces mouvements à la frontière orientale du pays. Washington met en garde la Russie.
Mouvements de troupes russes, mises en garde américaines, escalade des heurts armés : un regain de tensions autour du conflit dans l’est de l’Ukraine se dessine. Quelques éléments de réponses pour mieux comprendre.
Que sait-on sur des mouvements de troupes russes ?
L’Ukraine a accusé la Russie d’accumuler des milliers de militaires aux frontières Nord et Est, et en Crimée, péninsule annexée par Moscou en 2014.
Selon Kiev, Moscou peut, en outre, compter sur 28 000 combattants séparatistes et plus de 2 000 conseillers militaires et instructeurs russes dans les territoires sous contrôle rebelle dans l’est de l’Ukraine (Donbass), ainsi que sur 33 000 militaires en Crimée. Le renseignement militaire ukrainien a donc accusé les Russes de préparer « l’entrée » de ses « forces armées régulières » dans les territoires séparatistes « au motif d’y protéger » ses citoyens, la Russie ayant distribué des centaines de milliers de ses passeports dans ces régions.
Le Kremlin n’a pas démenti les mouvements de troupes, relevant que la Russie «déplace ses forces armées sur son territoire comme elle l’entend ». Il a nié de nouveau toute présence russe dans le Donbass.
Que recherchent Moscou et Kiev ?
Pour la Russie, entrent en ligne de compte des aspects dépassant l’Ukraine. La Russie considère la relation avec l’Occident à son plus bas, et semble déterminée à montrer ses muscles face au président américain Joe Biden, qui a qualifié son homologue russe Vladimir Poutine de «tueur» et a juré de lui faire « payer » l’ingérence dans les élections américaines.
« Les Russes montrent qu’ils n’ont peur de personne » , relève Oleksandr Lytvynenko, directeur de l’Institut national des études stratégiques. En outre, Moscou remet au passage « l’Ukraine à sa place ». Pour Kiev, insister sur la menace russe croissante est l’occasion de mobiliser ses soutiens occidentaux et notamment de voir Washington, après la présidence Trump, réaffirmer son alliance. Washington a répondu en plaçant ses forces en Europe en phase de surveillance renforcée contre une « crise imminente potentielle ».
Et les efforts de paix ?
Ces tensions interviennent après une trêve d’une durée record durant la deuxième moitié de 2020 en Ukraine. Mais depuis janvier, les heurts se sont multipliés entre séparatistes et forces ukrainiennes, chaque camp s’en rejetant la responsabilité. Vingt soldats ukrainiens sont morts en trois mois, contre 50 l’an passé.
En cause, la paralysie des pourparlers de paix réunissant l’Ukraine et la Russie sous médiation franco-allemande. Si les accords de paix de Minsk de 2015 issus de ces négociations à quatre ont considérablement réduit la violence, sur le fond aucun progrès n’a eu lieu.
Le dernier sommet en décembre 2019 à Paris n’a été suivi d’aucune avancée politique concrète. Aucune nouvelle rencontre n’est prévue.
Qu’en disent les Occidentaux ?
Washington n’est pas un acteur du processus de paix, mais ce sont les Américains qui ont multiplié ces derniers jours les contacts avec des responsables ukrainiens et russes.
Hier, le président américain Joe Biden s’est ainsi entretenu avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, pour la première fois depuis son investiture, promettant le soutien « indéfectible » de Washington à la souveraineté de Kiev «face à l’agression de la Russie ». Les Etats-Unis ont aussi évoqué le sujet avec les membres de l’Otan. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a rétorqué, hier, que Moscou prendrait
« toutes les mesures nécessaires » en cas d’ingérence militaire occidentale en Ukraine. A Paris, on souligne ne pas
« croire à une escalade », selon le secrétaire d’Etat aux Affaires européennes Clément Beaune. « Il y a visiblement des mouvements de troupes. On ne sait pas encore ce que cela veut dire. »