Var-Matin (Grand Toulon)

Le témoignage d’un Azuréen de  ans : « Le prix de l’amour, c’est , euros »

- AXELLE TRUQUET

« Lorsque j’ai appris que le texte était rejeté, j’ai eu l’impression que le sol se dérobait sous mes pieds. Oui, je l’avoue, j’en ai pleuré. » Mathieu (le prénom a été modifié), Azuréen de 35 ans, souffrant de plusieurs handicaps, est tombé des nues lorsqu’il a su que le calcul de l’AAH (Allocation adulte handicapé) ne serait toujours pas désolidari­sé des revenus du conjoint.

Il dénonce « une situation aberrante ». Pour bien comprendre, il raconte son histoire : « Ma maladie m’empêche de travailler ; je ne vis que de l’AAH soit 903,60 euros par mois. Déjà, avec cette somme, je peux vous assurer que les fins de mois sont très, très compliquée­s. Je ne sors jamais, je ne fais pas les magasins, je porte les mêmes vêtements depuis des années. »

« Une situation de dépendance totale »

« Et ma vie sentimenta­le est soumise à cette allocation. Le prix de l’amour, c’est 903,60 euros. Pourquoi ? Parce que si je me mets en couple, c’est-à-dire si je me marie, je me pacse ou simplement si je m’installe avec quelqu’un, je risque de perdre mes seuls revenus. Car à partir du moment où votre conjoint(e) gagne plus de 1020 euros nets par mois, votre allocation est réduite. Et elle est supprimée si l’autre perçoit plus de 2270 euros nets par mois. »

La problémati­que ne s’arrête pas à l’aspect purement financier. «À cause de ce système de calcul, un déséquilib­re s’installe dans le couple. Celui qui ne perçoit plus l’AAH doit demander de l’argent pour la moindre chose, le plaçant ainsi dans une situation de dépendance totale. On perd toute notre autonomie. Et l’autre doit porter la responsabi­lité du foyer. Dans les couples qui souffrent de cette mesure inique, il s’installe de la tension, voire de la violence. Certains sont à bout. Il y a des espaces de parole sur des sites internet dédiés : les témoignage­s montrent la détresse dans laquelle se trouvent beaucoup de bénéficiai­res de l’AAH. »

« Une question de justice et de dignité »

Mathieu évoque un autre aspect : « Si la personne souffrant de handicap vit chez ses parents, alors elle touche quand même son AAH. Pas si elle s’installe avec son conjoint. Cela signifie que, d’une part, elle ne peut pas prendre son indépendan­ce. Et d’autre part, que les parents ne peuvent pas voir leur enfant mener sa propre vie. Là encore, cela peut créer des tensions. »

Pour lui, « il faut absolument désolidari­ser le calcul de l’AAH des revenus du conjoint. C’est une question de justice et de dignité. »

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