« Il connaît le secteur comme sa poche il y a peu de chance de le retrouver »
Le chant des oiseaux et le bruit des hélicoptères. À Gréolières, petit village habituellement tranquille du haut pays grassois, le ballet des quatre hélicoptères de la gendarmerie nationale ne s’arrête pas depuis dimanche soir. Et devait continuer la nuit dernière. Mais en dépit d’un dispositif de recherches important (près de 200 militaires venus de la région, du Vaucluse et de Paris), les habitants se montraient, hier, sceptiques sur un dénouement rapide.
« Ils vont avoir du mal à le retrouver. Il connaît le secteur comme sa poche. Il chasse là depuis qu’il est tout petit, prédit une résidante qui prend le frais dans une ruelle de ce village de 600 habitants. En tout cas c’est bien triste pour la jeune femme et sa fille. Triste aussi pour les familles. »
Des riverains confinés
Depuis dimanche soir, le village est le siège de la gendarmerie. Hier, au fil de la journée, il est devenu celui de la presse locale et nationale. Des conférences de presse s’y sont tenues dans la matinée. Devant la mairie, avec le premier magistrat, tout d’abord. Marc Malfatto décrit « une famille honorable et un jeune Gréolois de 33 ans, enfant du pays, renfermé, solitaire », cependant « serviable et travailleur. » Plus tard, toujours devant la mairie, face aux caméras et micros qui se tendent, c’est le colonel Nasser Boualam, commandant du groupement de gendarmerie départementale des Alpes-Maritimes, qui fait le point sur les moyens mis en oeuvre. Il évoque« un individu dangereux » car potentiellement en possession d’une arme de poing et d’une arme longue. Pendant ce temps, les recherches se poursuivent dans un très vaste périmètre entre Gréolières et Andon de part et d’autre de la route de Laval (route départementale 79). Une dizaine de kilomètres dans une vallée encaissée et bouclée par les gendarmes. Mais le ballet des hélicoptères est vain. La journée s’étire dans le bruit récurrent des rotors sans annonce d’évolution de la situation.
Les résidents du quartier de Laval, voisins de la maison familiale du Gréolois en fuite, sont toujours assignés à résidence. « J’ai vu un berger qui n’a pas pu rentrer chez lui nourrir ses moutons. Il était bien embêté », raconte un habitant. Dans le même ordre d’idées, l’un des restaurants du village n’a pas pu ouvrir comme prévu : ses propriétaires étant « confinés » à leur domicile dans le secteur bouclé.
« Coup de folie meurtrière »
Ailleurs dans le village, la vie a cependant suivi son cours. À l’heure de l’apéro, dans les ruelles fraîches de Gréolières, quelques habitants prennent un verre devant chez eux. Évelyne et Gérald connaissent bien les parents de Marc Floris. « Mais leur fils unique, on ne le voit jamais. Il est assez solitaire. » Un peu plus loin, ce sont Pierre et Bruno qui n’ont pas bien dormi à cause des hélicoptères. Ils évoquent Marc Floris et sa famille de chasseurs. Eux aussi l’imaginent déjà loin.
À l’heure du déjeuner, le restaurant Le Relais, pourtant fermé en ce lundi, a tout de même ouvert pour nourrir la cohorte de journalistes. C’est là que sont venus s’attabler en famille, Jean-Marc et Raphaël, qui connaissent eux aussi ce gars du village
« très gentil, sans problème »,
plus jeune qu’eux, mais ayant fréquenté l’école de Gréolières, puis le collège du Rouret.
« Il est conducteur de chantier chez Eiffage, il est très bon dans ce qu’il fait, paraîtil » , croit savoir Raphaël, tandis que les deux hommes sont interviewés eux aussi par les différents médias. Plus loin un autre Gréolois s’interroge : « Il a trimballé son arme de Gréolières au Plan-de-la Tour et n’a pas cogité. C’est incroyable ! »
Si beaucoup de Gréolois l’imaginent introuvable, car connaissant mieux que beaucoup le secteur, d’autres espèrent qu’il se rendra. Lors de la dernière conférence de presse de la journée, hier soir en présence cette fois de Bernard Gonzalez, préfet des Alpes-Maritimes, le colonel Boualam évoque « un coup de folie meurtrière » et le redit : «Le dispositif mis en place comme pour tous les forcenés, est H24, et durera le temps qu’il faudra. Nous l’encourageons à se livrer. »
Hier, vers 20 heures, la relève de gendarmes arrivait au village pour continuer les recherches dans un secteur hyper compliqué, boisé, et percé de 90 grottes... offrant autant de cachettes.