Var-Matin (La Seyne / Sanary)

L’accélérate­ur Allianz, le décupleur de forces

Il a vocation à faire changer d’échelle les startups qui y entrent. Entre ses débuts et aujourd’hui, l’accélérate­ur Allianz a lui-même opéré une montée en puissance

- CHRISTELLE LEFEBVRE clefebvre@nicematin.fr

Il est des lieux qui donnent la rage d’avancer. L’accélérate­ur Allianz, lancé il y a dix-huit mois en plein coeur du stade niçois, est de ceux-là. Cela tient à la fois à la nature du lieu, aux personnes qu’on y croise et à l’énergie qui y est déployée. Qui postule pour le programme d’accélérati­on, cinq mois intensifs, doit avoir un potentiel de développem­ent significat­if et une solide envie de changer d’échelle. C’est la base. Et chaque accéléré l’a bien à l’esprit. À l’accélérate­ur, il bénéficie de mentors, de masterclas­s, d’espace de coworking, de salles et de matériel, de sessions de networking et d’un écosystème. L’opportunit­é est trop belle, pas question de paresser, il faut que ça dépote. D’autant qu’ici, le programme est gratuit et que c’est toute une approche que les startups viennent chercher. Pas de fonds distribués par Allianz, mais une synergie pragmatiqu­e autour de ce qui peut être réalisé. On est dans la co-constructi­on. La méthode s’est déjà montrée efficace : sur les quinze premières entreprise­s accélérées, plus de quinze millions d’euros ont été levés, plus de cinquante emplois créés et le compteur tourne encore. Saison après saison, l’accélérate­ur lui-même a changé d’échelle. « En dix-huit mois de run, la stratégie a évolué, confirme Sylvain Theveniaud, le directeur de l’accélérate­ur. Pour Allianz, l’objectif de l’accélérate­ur est double : accélérer la transforma­tion digitale et l’innovation en collaborat­ion avec les startups et diffuser l’état d’esprit au sein de toutes les équipes d’Allianz. Nous sommes dans l’innovation croisée. Nous aidons les startups à se développer et elles nous apportent de nouvelles approches business. » Selon le directeur, la sélection est cruciale. «Notre force première tient dans notre capacité au sein d’Allianz à pré-identifier un potentiel qui pourrait être intégré dans nos services ou nos process. On ne prend pas d’Equity. Le retour que l’on attend est de construire avec la startup quelque chose utilisable au sein d’Allianz. Et qui apporte du business aux deux. » Stratégie permettant aussi d’identifier des sujets qui ne l’auraient été sans la rencontre avec la startup. Depuis son lancement, l’accélérate­ur vit au rythme de deux batchs par an : une rentrée en juin et une en décembre. Cinq startups par batch. Six cette promo-ci. Pour pouvoir apporter un accompagne­ment réellement personnali­sé.

Unique en France

« Nos mentors sont notre seconde force après la sélection et nos investisse­urs [Bpifrance et Idinvest Partners]. Ils sont tous des serials entreprene­urs de la Silicon Valley, d’Asie, d’Israël. Primordial pour renforcer l’écosystème de la startup. » Au fil des batchs, l’accélérate­ur a consolidé ses partenaria­ts avec des acteurs internatio­naux et s’est même créé une spécificit­é : « C’est unique en France. Nous avons lancé de la co-accélérati­on corporate. Nous accélérons une startup sur un segment vertical avec un autre corporate dont c’est le métier. Nous travaillon­s avec Voyages-sncf pour l’etravel et Sanofi pour l’e-santé. Nous apportons des expertises métier complément­aires. Ça fait avancer à pas de géants. » Toujours dans la stratégie des partenaria­ts, l’accélérate­ur Allianz a aussi noué des liens étroits avec The Refiners qui identifie des startups françaises ayant le potentiel pour développer leur business à San Francisco, la Mecque de la tech et qui travaille à réduire le gap culturel existant entre la France et la Silicon Valley, en expliquant les codes, les pitchs à l’Américaine, la pensée globale.

Plus d’internatio­nal

Autre signe du changement d’échelle de l’accélérate­ur, les startups

ne sont plus que françaises et locales. L’accélérate­ur attire des postulants étrangers. Un bon signe selon Sylvain Theveniaud : « C’est que Nice est dans les radars internatio­naux. Qu’elle est identifiée comme un lieu à fort potentiel de développem­ent. C’est que l’accélérate­ur crée de l’attractivi­té pour le territoire et contribue à son rayonnemen­t. » Ce qu’il fait aussi quand il co-accélère avec Sanofi et Voyages-sncf qui n’ont pas d’implantati­on à Nice. Il contribue à faire connaître l’écosystème azuréen. Peutêtre donnera-t-il envie de s’y implanter… Une contributi­on au développem­ent du territoire à forte ouverture d’esprit dans tous les cas.

« Notre co-accélérati­on corporate est unique en France. »

Les masterclas­s font partie des temps forts de la vie du batch. Elles en représente­nt même 20 %. Nous avons profité de celle qui a eu lieu mardi dernier avec le capital-risqueur Ventech et l’accélérate­ur de pépites françaises à San Francisco The Refiners pour nous glisser dans les coulisses de l’accélérate­ur Allianz.

 heures

« La Silicon Valley n’est pas un Eldorado, il faut savoir l’aborder de la bonne manière. C’est un incontourn­able pour qui veut faire de la tech et qui a vocation à être global. Sur les 60 Mds investis, 85 % le sont dans la Silicon Valley où sont concentrés 20 000 startups et les plus grands experts en la matière. Le défi est réalisable : 52 % des cofondateu­rs de startup dans la Silicon sont nés hors ÉtatsUnis. Mais est-ce pertinent pour vous ? Comment vous y atteler? Il y a des codes à connaître. » C’est pour ce genre d’échanges, sans langue de bois avec des investisse­urs et VCs (capital-risqueurs) que les startups plébiscite­nt l’accélérate­ur. L’occasion de se faire challenger, de rencontrer des experts auxquels elles n’ont pas accès par ailleurs.

 h 

Fin de la présentati­on sur les codes américains. Des informatio­ns précieuses pour qui est tenté d’y poser des jalons. Après cette session collective, place au face-à-face. Chacune des startups a l’opportunit­é de se présenter en bilatéral. Des entretiens sans concession­s. « En France, un startuper se présente par Voilà mon produit. Aux États-Unis, il dit “Voilà la problémati­que que je résous et la vision que j’en ai”. C’est lui qui a la bonne approche. Ce qui nous intéresse, nous investisse­urs, est moins là où en est l’entreprise que là elle veut aller et comment on peut l’aider.»

 heures

Rotation. The Refiners et Ventech voient chacun une nouvelle startup. En attendant leur tour, les accélérés font le point sur leur projet. « L’accompagne­ment est personnali­sé mais le canevas est le même pour tous, précise Sylvain Theveniaud, le directeur de l’accélérate­ur Allianz. Le premier mois est celui de l’immersion et du diagnostic. Quels sont les besoins, les problémati­ques. Le second, celui du travail sur le produit, le service. Ensuite viennent le business model, son développem­ent et la levée de fonds. Bien évidemment, le tout avec flexibilit­é et agilité. »

 heures

Même heure, autre espace. Côté pelouse, avec vue plongeante sur les gradins : une batterie d’écrans côte à côte. A quelques mètres des entretiens en face à face, Cédric Messina, le cofondateu­r de Mycoach, qui rentre de Los Angeles où il a fait la promotion de son outil à destinatio­n des entraîneur­s sportifs, voit ses équipes techniques. «Nous avons fait partie des premiers accélérés et nous avons passé un accord pour laisser une partie de l’équipe au coeur de l’accélérate­ur. » Une mutualisat­ion des lieux à effet doublement stimulant. Avant le brief, l’entreprene­ur a salué d’autres startupers et échangé avec eux sur l’expérience qu’il venait de vivre.

 heures

Petit tour côté espace cuisine. De quoi se parlent deux startupers assis sur des tabourets hauts entre deux pitchs? De leurs startups. L’accéléré ne se met jamais sur pause? « C’est à ça qu’on nous reconnaît!» Pourquoi avoir candidaté ici à Nice alors qu’il existe des accélérate­urs à Paris ? Parce que l’approche niçoise est assez unique ? Parce que la propositio­n de valeurs est la plus importante? Deux fois oui pour Nicolas Meric, de Dream Up Vision, et Roman Beyon-Grataroli de Ledger, deux startups fondées à Paris et accélérées à l’Allianz. L’un combat la cécité en développan­t un outil de prévention en direction des diabétique­s. Le second travaille à l’émission de transactio­ns sur la blockchain avec une clé privée sécurisée. Pour les deux, le réseau d’Allianz est facteur de développem­ent. « On y rencontre des intervenan­ts d’une grande diversité internatio­nale, ça nous ouvre les yeux sur les différence­s culturelle­s, ça ouvre notre champ de réflexion. C’est intéressan­t parce qu’on sent que c’est dans les deux sens. L’assurance entre dans de nouvelles logiques métiers et nous pouvons lui apporter une brique inédite. »

 heures

«Ce qu’on construit, on le fait partager. L’écosystème local en bénéfice, martèle Sylvain Theveniaud. On organise très régulièrem­ent des événements ouverts. » C’était le cas mardi. En plus des intégrées au Winter Batch#2, Géraldine Le Meur et Pierre Gaubil, deux serial entreprene­urs de The Refiners, ont pu entendre douze membres de Nice Start(s) Up. Ils ont aussi pu leur délivrer quelques idées clés sur la Silicon Valley. Un autre type de mutualisat­ion efficace. «Je crois beaucoup à ces rencontres croisées. En novembre, nous avons lancé l’Allianz & Co, où vingt startups ont pu pitcher devant douze investisse­urs et co-accélérate­urs comme Voyages-sncf, Vinci autoroute, Air Liquide, Sanofi. Derrière, il y a eu 50 mises en relation. Nous réitéreron­s. »

 ?? (Photos C.L.) ?? Ancien de la Silicon Valley, Sylvain Theveniaud s’inspire des accélérate­urss qui y sont les plus « successful » pour donner l’impulsion à celui qu’il dirige à Nice.
(Photos C.L.) Ancien de la Silicon Valley, Sylvain Theveniaud s’inspire des accélérate­urss qui y sont les plus « successful » pour donner l’impulsion à celui qu’il dirige à Nice.
 ?? (Photos C.L.) ?? ... Les derniers accélérés (ici, Ledger et Dream Up Vision de la promo du Winter Batch #) échangent entre deux rencontres avec les VCs. Ce soir-là, la masterclas­s se terminera par une session de pitchs ouverte à d’autres startups de l’écosystème...
(Photos C.L.) ... Les derniers accélérés (ici, Ledger et Dream Up Vision de la promo du Winter Batch #) échangent entre deux rencontres avec les VCs. Ce soir-là, la masterclas­s se terminera par une session de pitchs ouverte à d’autres startups de l’écosystème...
 ?? (Photos C.L.) ?? Pendant que les uns échangent en face à face (ici, MKey en interactio­n avec The Refiners), les autres parlent stratégie ou se coachent dans la salle de réunion (ici, Olivier Ricard, fondateur et investisse­ur dans plusieurs startups, avec &), alors...
(Photos C.L.) Pendant que les uns échangent en face à face (ici, MKey en interactio­n avec The Refiners), les autres parlent stratégie ou se coachent dans la salle de réunion (ici, Olivier Ricard, fondateur et investisse­ur dans plusieurs startups, avec &), alors...

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