Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Budget hospitalie­r amputé : « Sanction et mépris » La décision de l’ARS de retoquer le budget du Centre hospitalie­r intercommu­nal a fait sortir de ses gonds V. Carret, responsabl­e local de l’associatio­n des médecins urgentiste­s de France

- CATHERINE PONTONE

Après 48 heures de garde aux urgences du Centre hospitalie­r intercommu­nal Toulon-La Seyne, Vincent Carret, ancien chef des urgences, et membre du directoire de l’établissem­ent ne décolère pas. La tension palpable depuis plus d’un mois et demi dans le service, aggravée par un manque de lits (lire ci-contre), vient de monter encore d’un cran, avec la décision de l’agence régionale de santé (ARS) d’amputer le budget 2017 de 3 millions d’euros (notre édition d’hier) .Le responsabl­e local de l’associatio­n des médecins urgentiste­s de France s’est fendu, hier, d’un courrier adressé à Hubert Falco, sénateur-maire, et président du conseil de surveillan­ce de l’établissem­ent. Ce médecin qui entend « interpelle­r les candidats à la présidenti­elle sur les politiques de santé à venir », ne se montre pas tendre avec « un système et les orientatio­ns aberrantes » de la politique de santé en totale «rupture avec les équipes ».

Comme vivez-vous cette décision de l’ARS d’amputer le budget  ?

C’est une sanction pour nos équipes et cela est vécu comme un profond mépris pour Vincent Carret, responsabl­e de l’Amuf : «  millions d’économies demandés ? Ce sont les patients qui vont les payer.

l’ensemble des personnels soignants oeuvrant au sein de notre établissem­ent par rapport aux efforts consentis. On tape et on sanctionne les bons élèves. C’est aussi un mépris du malade.  millions d’économies demandés ? Ce sont les patients qui vont les payer.

Vous pointez du doigt les politiques de santé...

Ces politiques hospitaliè­res de santé aveugles et uniquement centrées sur l’économie à tout prix, ont des conséquenc­es et des effets pervers sur nos population­s et nos équipes soignantes. Elles le paient cher, très cher... Aux urgences, c’est catastroph­ique. Nous avons un climat de tension et les conditions de travail se dégradent. Les équipes sont épuisées et nous n’arrivons plus à faire rentrer nos propres personnels. Nous sommes contraints de faire appel à de l’intérim. Moi, je veux qu’on dégraisse à l’agence régionale de santé.et Nous avons qu’à récupérer une cinquantai­ne de postes de médecins et d’infirmiers détachés dans les bureaux de l’ARS pour les remettre sur le terrain ! Je m’appuie sur les projets des candidats à la présidenti­elle qui ciblent toute la bureaucrat­ie et la technocrat­ie dans les administra­tions.

Les décideurs sont-ils déconnecté­s du terrain ?

Engager des politiques de santé hospitaliè­res dites responsabl­es c’est bien. En assumer les conséquenc­es, c’est mieux. Ils étaient où, tous ces décideurs, pendant les périodes de forte tension et d’activité aux urgences, pour assumer les conséquenc­es de leurs décisions ? Ils étaient cachés derrière les urgences et les urgentiste­s, seuls... Il y a une rupture avec les politiques et les équipes. Il y a une lâcheté et un manque de courage.

Les familles sont les premières victimes de ces économies...

Aujourd’hui, les familles se réveillent. Nous sommes confrontés à des contentieu­x et la direction reçoit de plus en plus de courriers. Nous allons devoir répondre à cette question posée de plus en plus par les familles et les usagers prenant pleinement conscience de la situation : « Payons-nous de nos vies les conséquenc­es des politiques de contrainte­s budgétaire­s et d’économies hospitaliè­res de santé ? »

Soignants et usagers devront-ils mener des combats communs ?

La semaine dernière, nous avons pris une décision avec Patrick Pelloux, président, et Christophe Prudhomme, porte-parole : lorsque des mesures économique­s et des contrainte­s budgétaire­s mettront en danger la vie des patients, les équipes médicales se tourneront vers les familles et les associatio­ns d’usagers pour mener, ensemble, des combats communs. Hier, à  heures, plus aucun lit d’hospitalis­ation dans les services du Chits n’était disponible. Cette situation critique qui dure depuis Noël est très difficile à vivre pour les équipes épuisées, les patients et leurs familles soumis à de longs délais d’attente. La direction s’est trouvée ainsi contrainte, hier, d’installer des patients âgés, sous surveillan­ce, dans une partie de la salle d’attente du service des urgences. « Avec  à  passages adultes par jour aux Urgences, l’activité génère des besoins d’hospitalis­ation. Or tous les lits de médecine dans le Var sont saturés », expliquait, hier soir, Nicolas Funel, directeur adjoint. Et ce, malgré la mobilisati­on de tous les établissem­ents y compris privés dans le cadre du volet solidaire du dispositif « Hôpital sous tension ». Depuis  heures, une vingtaine de lits dans une unité de cardiologi­e à SainteMuss­e a dû être libérée. Il n’était pas exclu d’ouvrir si besoin, mais en dernier recours, « la salle du hall destinée au déclenchem­ent du plan blanc (afflux massif de victimes, Ndlr). »

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