Trump durcit le ton
Le Président a remplacé au pied levé la ministre de la Justice par intérim opposée au texte tandis que Barack Obama s’est dit « bouleversé » par la « mobilisation »
La mobilisation contre le décret anti-immigration ne s’apaise pas: après les manifestations et l’indignation dans nombre de capitales, le président américain Donald Trump est confronté à une fronde au sein de l’appareil d’Etat, à laquelle il a choisi de répondre avec fermeté. Après avoir limogé avec fracas lundi soir la ministre par intérim de la Justice [lire ci-contre], le président républicain s’en est pris, hier, avec véhémence à ses opposants démocrates au Congrès, les accusant de paralyser le fonctionnement gouvernemental en tardant à confirmer ses candidats. « Il devraient avoir honte ! Pas surprenant que [Washington] D.C. ne fonctionne pas ! », a-t-il tweeté avec la volonté évidente de galvaniser sa base électorale.
Un impact sur la sécurité intérieure ?
La Maison-Blanche défend son décret au nom de la nécessité d’empêcher l’entrée aux Etats-Unis de « terroristes islamiques radicaux ». «Cela n’a rien à voir avec la religion, il s’agit de terrorisme et de la sécurité de notre pays », martèle le président américain. Mais la fronde ne vient pas seulement des rangs démocrates. Dans une lettre ouverte, plusieurs dizaines d’anciens conseillers de Barack
Obama et George W. Bush ont estimé que ce décret envoyait «le mauvais message à la communauté musulmane dans le pays et de par le monde » : l’idée que le gouvernement américain est « en guerre contre eux » sur la base de leur religion. Les signataires se disent convaincus que cette décision aura « un impact négatif à long terme » sur la sécurité nationale des Etats-Unis. Par ailleurs, des diplomates américains
ont protesté contre le décret en utilisant un canal officiel dit de dissidence. « Soit ils acceptent le programme, soit ils s’en vont », arépondu la Maison Blanche en guise d’ultimatum.
Obama sort de son silence
L’ancien président démocrate Barack Obama est sorti de son silence, se disant, par la voix de son porteparole, encouragé par « le niveau de mobilisation » à travers les EtatsUnis. M. Obama avait promis de se tenir à l’écart du débat politique sauf si « les valeurs fondamentales » de l’Amérique étaient menacées. Dix jours après son départ de la Maison-Blanche, il a jugé que c’était le cas. Au-delà des Etats-Unis, la vague d’indignation n’a pas faibli. Le président du Conseil européen Donald Tusk a dénoncé les déclarations « inquiétantes » de l’administration Trump qui « rendent notre avenir hautement imprévisible ». La nouvelle administration « semble mettre en cause les 70 dernières années de politique étrangère américaine », a-t-il mis en garde dans une missive envoyée aux chefs d’Etat et de gouvernement de 27 pays de l’UE (sans le Royaume-Uni).
Pétition anti-Trump en Grande-Bretagne
Le vice-Premier ministre turc Numan Kurtulmus a appelé, hier, le président Trump à réévaluer son décret motivé par « l’islamophobie, les sentiments anti-immigration et la xénophobie croissants en Occident ». Les députés britanniques débattront le 20 février de la pétition, qui a recueilli près de 1,7 million de signatures, réclamant que la visite d’Etat de Donald Trump soit ramenée au rang de simple visite officielle.