Var-Matin (La Seyne / Sanary)

ET UN JOUR...

En , un an après sa naissance à Nice, celui qui deviendra l’un des plus grands peintres français du mouvement « rococo » au XVIIIe siècle, Carle van Loo, échappe à une bombe tombée sur son berceau

- NELLY NUSSBAUM

Au début du XVIIIe siècle, Nice est au centre d’une guerre entre le duc de Savoie Victor-Amédée II et le roi de France Louis XIV, qui se disputent l’Espagne. C’est alors que le 15 février 1705 naît André Charles van Loo, aussi appelé Carle. Il est le second fils du peintre Louis-Abraham van Loo qui, après avoir quitté Paris, a voyagé en Provence et dans les états de Savoie avant de s’installer à Nice avec son épouse Marie Fossé et son premier-né Jean-Baptiste. La famille subit la guerre, mais rien n’annonçait ce qui allait se passer. En effet, André Charles n’a qu’un an lorsque, sur ordre de Louis XIV, le maréchal de Berwick bombarde la ville. Dès les premières salves, la mère couche l’enfant dans son berceau et demande à son frère, de 21 ans son aîné, de le descendre à la cave. Quelques minutes après, une bombe frappe la maison, traverse les plafonds, descend dans la cave et explose le petit berceau. Mais par le miracle de l’amour fraternel, le nourrisson n’y était plus. Jean-Baptiste l’avait pris dans ses bras pour l’empêcher de pleurer et, pressentan­t le danger, l’avait emporté sous la voûte d’une cave voisine.

« Ce diable de garçon finira mal »

C’est à ce frère que, sur son lit de mort à Nice le 13 mai 1712, Louis-Abraham van Loo, confie son dernier-né : «Sois son maître, fais qu’il devienne un van Loo.» Et son voeu fut exaucé. De retour à Aix-en-Provence, sa ville natale, Jean-Baptiste est pour Carle un maître patient, un frère généreux et surtout indulgent. Car, submergé par les passions de la première jeunesse, le jeune Carle n’est pas toujours un élève attentif, et se détourne facilement de son apprentiss­age dans l’atelier. Une indiscipli­ne qui fait dire à Jean-Baptiste, cette phrase reprise par les biographes : «Ce diable de garçon finira mal; il semble qu’il ait toujours dans le coeur la bombe qui a éclaté sur son berceau.» Au final, l’aîné a si bien instruit le cadet que son enseigneme­nt associé à celui des plus grandes académies de peinture, – Rome, Turin et Paris – ont fait de Carle l’un des plus grands peintres du XVIIIe siècle. Ce frère sauveur s’est éteint à Aix le 19 décembre 1745 avant de voir son protégé et disciple occuper le poste honorifiqu­e de premier peintre du roi Louis XV et devenir directeur de la prestigieu­se Académie de Rome en 1763. Carle fut sans aucun doute le plus célèbre et plus doué de la dynastie des van Loo. Il est mort à Paris d’un coup de sang – rupture d’anévrisme – soixante ans après avoir survécu à une bombe. Sources: Portraits des hommes et des femmes célèbres par la Société des gens de lettres. Édition Hérissant 1771 ; Vie de Carle Vanloo Par Michel François Dandré-Bardon 1765.

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(DR) Portrait de Carle van Loo () par le fils de son frère Jean-Baptiste. Exposé au château de Versailles.
 ?? (DR) ?? Portrait de Jean-Baptiste van Loo par Joseph Villevieil­le (-). Exposé en mairie d’Aix-en-Provence.
(DR) Portrait de Jean-Baptiste van Loo par Joseph Villevieil­le (-). Exposé en mairie d’Aix-en-Provence.
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(@Le Comté de Nice de Jacques Antier) Nice en , avec le château qui sera détruit ainsi que la ville nouvelle lors des bombardeme­nts ordonnés par Louis XIV entre  et .

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