Après une vie de musique, elle sort son premier CD
Andrée Terreau, brillante musicienne de l’ensemble de guitares de la philarmonique de La Seyne, vient de sortir un album… après des dizaines d’années à jouer dans l’ombre
Évidemment, ça ne se demande pas. Mais la tentation était d’autant plus forte qu’on avait flairé la singularité. Alors, au risque de se montrer un poil inconvenant, on a quand même osé interroger Andrée Terreau sur son âge. « Je ne vous le dirai pas. Écrivez que j’ai plus de 60 ans, voilà… » Où comment évacuer dans un sourire malicieux et charmeur un fait tout de même peu banal : après une existence passée au service des armées (oui, oui), notre coquette retraitée seynoise, aujourd’hui Valettoise, vient de sortir son tout premier CD. Un disque sobrement intitulé Guitare récital ,où des interprétations de Bach, Satie, Villa Lobos et autres Sor, enregistrées au Studio 18, à Hyères, sont brillamment mis à l’honneur.
« Quand je joue, je suis transcendée »
Un coup de tête ? Loin s’en faut. « J’ai appris à jouer, enfant, au conservatoire d’Oran. Je suis ensuite passée par les conservatoires de Nice et de Marseille, où j’ai rencontré le grand René Bartoli, qui fut mon professeur. La guitare classique, c’est vraiment toute ma vie. » Toute sa vie… moins ce qu’il a fallu consacrer à ses obligations d’épouse et de mère, et au rouleau compresseur du quotidien. « Pour mon mari, aujourd’hui disparu, la musique ne pouvait pas être autre chose qu’un loisir. Il n’aurait pas compris que je m’y jette à corps perdu. » C’est donc à ses « deux ou trois » heures perdues quotidiennes qu’Andrée y consacre son talent et son énergie… pendant des décennies. Le reste du temps, la musicienne le passe comme personnel civil du ministère de la Défense, à la direction du commissariat de la Marine plus précisément. Là, elle fonde néanmoins une chorale, à quatre voix mixtes. Puis elle monte et dirige un temps la chorale du comité des fêtes d’Ollioules, qui deviendra, de fil en aiguille, Vox Cantaria, à La Seyne. Mais ce n’est que véritablement libérée du cadre de sa carrière professionnelle qu’Andrée Terreau se laisse envahir par son âme d’artiste. Également peintre talentueuse, elle fait aujourd’hui partie de l’ensemble de guitares de la philharmonique La Seynoise et multiplie les concerts. Son répertoire varie du latino au jazz en passant par le classique, évidemment. « Les Gavottes de Bach sont sublimes. Les variations sur l’air de la Flûte enchantée de Mozart, transcrites par Sor, c’est une merveille. Quand je joue ce répertoire, je suis transcendée. Je n’appartiens plus à ce monde, mais à un univers tellement immense… » Au point de vouloir aujourd’hui le faire découvrir au plus grand nombre. « Ça fait quelques années déjà que je donne des concerts privés, d’autres pour des fêtes, des occasions comme le Téléthon, ainsi que des cours à la demande. Mais ce CD, c’est véritablement une consécration, explique encore Andrée Terreau. Mon compagnon, m’a poussée. Il a eu raison. L’envie de partager était très forte. » Et elle n’est pas complètement assouvie. « Je ne veux pas m’arrêter là. Cet enregistrement était une expérience extraordinaire. J’ai très envie, désormais, de sortir un album avec mes compositions, dont une que j’ai dédiée à ma mère et qui s’appelle Splendeur éternelle. C’est grâce à elle et à ses encouragements que je suis devenue musicienne. » A quel âge, au fait? « J’avais 11 ans », nous répond Andrée pudiquement. Et – elle ne le savait pas encore – une vie de guitariste épanouie devant elle.