Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Affaire Théo: l’exécutif craint une escalade de la violence

Il tente de montrer sa bonne foi et sa capacité à prendre la mesure de l’événement afin d’enrayer l’embrasemen­t après plusieurs nuits de violences dans les banlieues

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Hollande souhaite « que la justice passe », Le Roux veut se pencher sur le « lien police et population » : l’exécutif tentait, hier, sur le terrain, d’endiguer la vague d’incidents dans les banlieues, qui ont fait irruption dans la campagne présidenti­elle en réaction à l’affaire Théo. Hier soir, le ministère de l’Intérieur annonçait 245 interpella­tions dans l’Hexagone depuis le déclenchem­ent des violences urbaines. Elles ont débouché sur 236 gardes à vue dont 168 à Paris et dans les trois départemen­ts de la Petite couronne (Seine-Saint-Denis, Hautsde-Seine et Val-de-Marne). Quarante-huit d’entre elles ont été déférées devant la justice, débouchant sur quatorze incarcérat­ions.

Une nouvelle affaire ?

« Il faut que la justice passe », adéclaré le chef de l’Etat hier matin lors d’un déplacemen­t dans une mission locale d’Aubervilli­ers (Seine-Saint-Denis), à l’issue d’une nouvelle nuit de violences qui a débouché sur au moins 25 interpella­tions. « On ne peut pas accepter, à cause d’un drame que j’ai moi-même dénoncé, qu’il y ait de la casse », a ajouté François Hollande, qui s’était rendu la semaine dernière au chevet de Théo, jeune homme noir de 22 ans victime d’un viol présumé lors d’une interpella­tion le 2 février et toujours hospitalis­é. L’affaire Théo a cependant connu un nouveau développem­ent hier avec le témoignage à l’Obs d’un ami du jeune homme, Mohamed K.. Celui-ci affirme que l’un des policiers impliqués dans l’interpella­tion violente de Théo l’avait déjà passé à tabac une semaine plus tôt. « Immédiatem­ent informé, le ministre [de l’Intérieur Bruno Le Roux, ndlr] a saisi l’IGPN », la police des polices, selon l’Intérieur tandis que le parquet a ouvert une informatio­n judiciaire. Signe de la tension ambiante, une habitante a lancé sur le passage du président : « Police, violeurs, assassins. » « Il aurait dû venir avant» ,a,deson côté, estimé Nadia, 50 ans, mère de quatre enfants. « Il n’y a rien pour nos enfants ici. Les jeunes du 93 galèrent trop. » « Conscient » de venir en Seine-SaintDenis « dans un moment particulie­r », François Hollande a longuement plaidé en faveur du « respect », soulignant qu’il « n’y a pas de vie en commun, s’il n’y a pas de respect ». « Le respect, c’est celui qui est dû à ces jeunes quand ils sont contrôlés, lorsqu’ils sont eux-mêmes confrontés à des situations de violence », a-t-il poursuivi. Mais pour Sarah, une jeune fille qui faisait face au chef de l’Etat dans une table ronde consacrée à l’insertion profession­nelle des jeunes, « c’est la faute de la police » et «il faut dire la vérité : à chaque arrestatio­n, il y a toujours un policier qui lève la main sur la victime ». Depuis l’interpella­tion de Théo, les violences urbaines qui avaient éclaté à Aulnay-sous-Bois se sont étendues à la Seine-Saint-Denis comme à d’autres banlieues.

“S’amuser, piller, agresser”

En déplacemen­t à la mi-journée dans le départemen­t voisin du Vald’Oise pour évoquer le « lien police-population », le ministre de l’Intérieur Bruno Le Roux, a jugé que « ceux qui manifesten­t en cassant ne servent en rien les intérêts qu’ils prétendent mettre en avant ». Le ministre s’est rendu à Sarcelles puis à Villiers-le-Bel, où la mort de deux jeunes dans la collision de leur mini-moto avec une voiture de police en 2007 avait déclenché une nouvelle vague de violences urbaines après celles de 2005. L’exécutif craint une multiplica­tion des incidents dans les banlieues déshéritée­s, jusque-là pratiqueme­nt hors du champ des débats de la présidenti­elle. « En l’état je crois qu’ils se fichent pas mal du cas de Théo et [...] qu’en fait, c’est un prétexte utilisé pour pouvoir s’amuser, piller, agresser » ,a estimé la députée Front national du Vaucluse, Marion Maréchal-Le Pen. La veille, le FN avait déjà lancé une pétition en ligne « pour soutenir la police ».

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 ?? (Photo AFP) ?? Le ministre de l’Intérieur Bruno Le Roux a, dans un premier temps, qualifié le viol dont Théo dit avoir été victime de « tragique accident ». Mais il a déclaré, plus tard, que le terme était « inappropri­é ».
(Photo AFP) Le ministre de l’Intérieur Bruno Le Roux a, dans un premier temps, qualifié le viol dont Théo dit avoir été victime de « tragique accident ». Mais il a déclaré, plus tard, que le terme était « inappropri­é ».

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