Une alliance et des circonstances
Après le renoncement de François Hollande, la défaite de Nicolas Sarkozy et la victoire inattendue de François Fillon à la primaire républicaine de novembre, l’alliance proposée par François Bayrou à Emmanuel Macron est le quatrième coup de théâtre de cette présidentielle qui, décidément prend tout le monde de court chaque matin. Donc, François Bayrou, après avoir entretenu le suspense, ne se présentera pas en . Un sacrifice, à n’en pas douter, pour cet homme que l’on sait « accro » ou « addict », comme il le dit lui-même, au combat présidentiel ? Sans doute. Mais aussi, et encore plus, la volonté, face à une situation politique qu’il juge «grave», de ne pas ajouter sa candidature à d’autres, de ne pas éparpiller l’offre électorale face aux Français qu’il décrit comme inquiets, déboussolés, déconcertés devant le «marécage» politique. «A situation exceptionnelle, a plaidé Bayrou, réponse exceptionnelle. » D’où l’offre d’alliance à Macron, offre que celui-ci a immédiatement acceptée. Certes, François Bayrou n’avait pas été tendre, au début de la campagne, pour Emmanuel Macron. Mais un intérêt commun les a rapprochés, qui a balayé tout le reste : la recherche d’une nouvelle offre politique. L’alliance qu’il a proposée à Macron n’est pas un ralliement, nuance : pas de « ticket » entre les deux hommes, mais la volonté revendiquée par François Bayrou et Emmanuel Macron de s’inscrire entre les camps, entre la gauche et la droite, le plus âgé appuyant le plus jeune, le plus expérimenté le plus novice. Pour quoi faire ? Pour enfin changer la donne politique française, figée dans ses combats gauche-droite qu’ils jugent tous deux dépassés, offrir enfin l’occasion au centre de courir ses chances – ce qui est, depuis les débuts de la vie politique du président du Modem, son rêve inatteignable. Et aussi pour lutter contre le danger que représente, à leurs yeux, un Front national au mieux de sa forme. L’accord, autant que l’on sache, n’est pas un tripatouillage électoraliste. Les conditions posées par François Bayrou à Emmanuel Macron lui tiennent à coeur depuis toujours : le président du Modem a toujours réclamé, depuis dix ans au moins, une loi de moralisation de la vie politique, ainsi que le retour au scrutin proportionnel aux futures législatives. François Hollande ne l’avait pas entendu en , Emmanuel Macron l’a entendu aujourd’hui. À moins de deux mois de la présidentielle, il s’agit, sans aucun doute, d’une nouvelle étape de la campagne. Emmanuel Macron traversait en ce moment quelques turbulences. Et pourtant, dans la même journée d’hier, il a vu venir à lui François Bayrou, et il a enregistré, presque au même moment, l’adhésion de l’écologiste François de Rugy, ministre de François Hollande, ancien candidat à la primaire de la gauche. Entre Benoît Hamon, candidat socialiste très à gauche, et François Fillon, candidat républicain très radical, se dégage donc un véritable espace politique qui pourrait donner de sérieuses chances de succès à Emmanuel Macron. N’allons pas trop vite. On verra dans les jours qui viennent si la nouvelle alliance change ou non la donne de la présidentielle.
« Ne pas éparpiller l’offre électorale face aux Français qu’il décrit comme inquiets, déboussolés, déconcertés. »