William Reich, président du tribunal de Commerce de Toulon

« Proposer une aide aux dirigeants en souffrance aiguë »

Vous avez décidé de prendre en charge la souffrance morale des dirigeants ?

Depuis quatre ans, nous avons mis en place un dispositif de prévention des difficultés. Nous sommes passés de trois dossiers la première année à la gestion de  dossiers. Mais aucune prise en charge n’existait pour aider des chefs d’entreprise en grande souffrance morale.

D’où l’adhésion à la charte Aide psychologique des entrepreneurs en souffrance aiguë (Apesa) ?

Cette initiative a été créée en  à l’initiative de Marc Binnié, greffier du tribunal de commerce de Saintes (en Charente-Maritime). Depuis, une équipe de quinze praticiens (addiction, médiation familiale…) s’investit pour soutenir des dirigeants en grande difficulté. En détresse peut-on dire. Nous comptons mettre en oeuvre la charte Apesa d’ici la fin de l’année . Nous travaillons au financement du dispositif. Étant précisé que la prise en charge du chef d’entreprise concerné sera totalement gratuite.

Les juges ne sont pas des psychologues. Qu’est-ce qui vous motive à intervenir sur l’aspect humain ?

Le lundi, je reçois dans mon bureau des chefs d’entreprise en rendezvous. Je me suis retrouvé face à des personnes à la tête de sociétés depuis plus de trente ans en pleurs. Ils n’y arrivaient plus. Ils allaient tout perdre. Leur boîte, leur famille, leur maison. On ne peut pas rester sans rien faire jusqu’à ce que le pire arrive parfois. Il faut toutefois faire attention, en tant que juges, à ne pas tenir compte de la souffrance morale dans nos décisions.

Le pire, c’est parfois le suicide…

Je me souviens d’une commerçante toulonnaise que nous avions reçue. L’objectif était de l’aider dans ses démarches. Son mal-être était immense. Elle a mis fin à ses jours. À la suite des inondations en région dracénoise et à La Londe, des entrepreneurs ont aussi craqué. Souvent, ce sont des hommes qui cachent à leur entourage leurs difficultés réelles.