Var-Matin (La Seyne / Sanary)

« Il faut savoir s’entourer »

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Bpifrance est à l’origine de l’enquête « Vaincre les solitudes du dirigeant ». Pourquoi ce choix?

Cette étude, initiée par Bpifrance Le Lab notre think tank interne, s’inscrit dans la volonté d’accompagne­r le chef d’entreprise dans l’évolution de sa société. Avec la conviction que les dirigeants (de la PME vers les TPI) doivent s’entourer et accepter de se faire accompagne­r pour franchir des caps de croissance . L’étude s’est déroulée avec le soutien d’Olivier Torrès, économiste spécialisé dans la santé du dirigeant.

Cette étude a permis à des milliers de chefs d’entreprise de s’exprimer...

Un questionna­ire comprenant une trentaine de questions a été adressé à   dirigeants et   réponses ont été traitées. Soit un taux de réponse de  %, ce qui est plutôt important. Une trentaine d’entre eux a été vue en entretien, lors de face à face.

Aborder des sujets plus personnels n’a-t-il pas été un frein ?

Il y avait des appréhensi­ons parfois à parler de l’intime, de leur vie privée mais, au final, ils ont trouvé intéressan­t qu’une banque s’intéresse à eux au-delà des bilans, des résultats. Nous étions plus dans le côté humain. sentent très isolés. La proximité est forte entre l’isolement et le burn-out. Nous avons ensuite analysé les facteurs qui amplifient le sentiment d’isolement et déterminé des bonnes pratiques.

En quoi consistent ces bonnes pratiques ?

Avoir un second chip, une personne de confiance à qui l’on peut déléguer, qui peut suppléer en cas d’absence. La gouvernanc­e de l’entreprise est une arme anti-solitude. Il faut savoir organiser la gouvernanc­e, s’entourer, responsabi­liser les collaborat­eurs, mettre en place un comité directeur. Réfléchir seul est le pire.

Comment les sondés rompent-ils le sentiment d’isolement ?

 % ne font rien. La moitié des dirigeants appartienn­ent à un réseau d’entreprene­urs et  % ont recours à du conseil externe. On constate aussi des implicatio­ns dans des associatio­ns, voire en politique. Des groupement­s comme le Centre des jeunes dirigeants d’entreprise (CJD) ont une approche humaniste et mettent l’accent sur une nouvelle organisati­on du travail. Ils sont attentifs aux signaux faibles qui annoncent le burn-out. Le but est d’éviter de se refermer sur soimême, se cacher.

(1) Bpifrance, banque publique d’investisse­ment. (2) Ont été ciblées les PME ou TPI ayant un chiffre d’affaires de 2 millions d’euros à un milliard d’euros. www.bpifrance-lelab.fr/Analysesre­flexions/les-travaux-du-lab/vaincreles-solitudes-du-dirigeant

Solitude. Honte. Échec. À 52 ans, Michel D. a vécu l’enfer pour un créateur d’entreprise : la cessation de paiements, le dépôt de bilan, la liquidatio­n. La clef sous la porte. Quelques mois de difficulté­s financière­s, de traites impayées que l’on fait traîner « car on a la tête dans le guidon » ont suffi à effacer vingt-trois années à diriger son restaurant. Quatre ans plus tard, il admet avoir fermé les yeux sur sa situation. Par honneur. « C’était avouer mes erreurs, mes mauvaises décisions ». Mais aussi en raison d’une situation personnell­e dégradée. « Dans ce contexte-là, tout va mal. C’est un effet boule de neige. Vous êtes mal. Vous cogitez sans cesse, vous êtes moins présent pour vos enfants. Les relations avec mon exépouse se sont détériorée­s. Immanquabl­ement, la société ne faisait plus de bénéfice, il n’y avait que des dettes et il fallait honorer 1 000 euros de pension alimentair­e. Tout s’est accumulé. Et puis, annoncer à mes salariés que tout allait se terminer fut un crève-coeur». Une spirale infernale pour cet homme vite happé par la dépression. « De quelqu’un, vous devenez personne. Les connaissan­ces ne vous regardent plus pareil. J’étais devenu un looser. Un moins que rien au RMI, privé de carte bleue, interdit à la Banque de France. J’ai dû me faire aider à cinquante ans par mes parents parfois juste pour faire un plein d’essence pour chercher du travail… La honte. ». Aujourd’hui, ce Varois a rebondi. Lui, l’ex-chef d’entreprise qui gérait un établissem­ent et ses vingt employés a changé de voie. Il est désormais commercial. « Je suis redevenu mon propre patron mais je reviens de loin … ». Il admet être passé très proche du suicide. Les idées noires ne l’ont pas qu’effleuré. C’était son quotidien. Son cerveau ne pensait qu’à cela. « Le truc, c’était , comment en finir ? Comment être apaisé ? Évidemment que j’ai pensé au suicide ! ». Cet apaisement, il l’a trouvé en demandant de l’aide. En parlant. Beaucoup. « J’ai été

Les soutiens m’ont certaineme­nt sauvé la vie ”

très envahissan­t avec mes amis. Du moins avec les deux-trois qui ne m’ont pas tourné le dos ». Avec le recul, il sait que ces soutiens psychologi­ques lui ont certaineme­nt sauvé la vie. « Il ne faut pas s’isoler. Il ne faut pas hésiter à se faire accompagne­r et à se rapprocher du tribunal de commerce avant de tomber dans un

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