Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Hamon à la dérive

- Par DENIS JEAMBAR

« Le vainqueur de la primaire de la gauche a perdu beaucoup de terrain, et n’a réussi ni à imposer son projet ni à rassembler les siens. »

La gauche ne le dit pas, mais elle devrait se réjouir du feuilleton à rebondisse­ments que connaît la candidatur­e Fillon depuis les révélation­s du Canard enchaîné le  janvier dernier. Il a masqué, en effet, les terribles difficulté­s de Benoît Hamon et le grand bazar qui règne dans la famille socialiste. Premier constat, le vainqueur de la primaire de gauche a perdu beaucoup de terrain. Début février, dans le sondage quotidien IfopParis Match-Sud Radio, il obtenait  % des intentions de vote au premier tour. Il avait alors creusé un écart significat­if – que certains jugeaient même décisif – avec Jean-Luc Mélenchon ( %). Il talonnait même Emmanuel Macron, crédité de  %. Six semaines plus tard, sa situation est pour le moins préoccupan­te : dans la même enquête, il était retombé hier soir à  %, avec deux points et demi seulement d’avance sur Mélenchon et onze points de retard sur Macron ! En dépit de la tempête qu’il traverse depuis un mois et demi, même François Fillon a accru son avance sur le portedrape­au du PS : elle était de trois points le

février, elle est désormais de cinq points. Deuxième constat, qui éclaire le premier : Benoît Hamon n’a pas réussi, tout au long de cette période, à imposer son projet et à rassembler les siens. On aura même vu François de Rugy, candidat écologiste à la primaire de la gauche, se parjurer et rallier Macron alors qu’il s’était engagé à soutenir le vainqueur de ce scrutin de sélection. Manuel Valls n’est pas allé jusque-là, mais il a laissé ses soutiens libres de leur choix. Le clan des hollandais continue, lui, à faire profil bas. Quant à Claude Bartolone, le président socialiste de l’Assemblée nationale, il a avoué hier ses hésitation­s entre Hamon et Macron. Bref, un flottement généralisé et un affaisseme­nt dans les sondages que le désistemen­t du candidat Vert Yannick Jadot n’a pas permis d’enrayer. Pas plus, d’ailleurs, que les rappels à l’ordre adressés à ses troupes défaillant­es par Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS. Si la droite est un bateau ivre, la gauche est, elle, un navire en perdition qui prend l’eau de toutes parts. La faute à qui ? D’abord, bien sûr, à Benoît Hamon, qui a perdu du temps en négociatio­ns inutiles avec les Verts et Mélenchon. Plus grave encore, il n’a pas su amender à temps son programme pour rassurer et arrimer l’aile réformiste du PS, qui a eu le sentiment d’être à la fois abandonnée et méprisée. Ainsi a-t-il perdu nombre de soutiens sur sa droite, sans pour autant en gagner sur sa gauche. De fait, Jean-Luc Mélenchon occupe cet espace et ne lâche rien. Mais, lorsque viendra l’heure des comptes d’une probable Bérézina, nul doute que François Hollande sera convoqué le premier au tribunal des responsabi­lités car c’est son quinquenna­t qui a conduit à cette implosion du Parti socialiste.

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