« Chaque année, la population carcérale croit alors que la criminalité stagne »
Isabelle Rome, actuelle conseillère à la cour d’appel de Versailles, a été la plus jeune juge de France. Juge d’application des peines ou d’instruction, elle connaît tous les rouages de la justice et de la pénitentiaire. Elle en connaît les dysfonctionnements et les besoins en terme de réforme. « Mais ce n’est jamais le bon moment de parler de ce sujet, ni d’entreprendre des réformes audacieuses et courageuses », dénonce-t-elle. Alors que la surpopulation atteint % à Fresnes, % à Villepinte, la magistrate évoque une réaction nécessaire. « Certes, on parle de construire dix à quinze mille places de prison. Mais si on engageait plutôt une réflexion sur le sens de la prison ? Chaque année, la population carcérale progresse, alors que la criminalité stagne ! On peut se poser des questions… »
Numerus clausus de places
Si l’on construit, remarque-t-on, on ferme aussi des établissements pour cause de situations d’indignité. « Peut-être devrait-on définir un numerus clausus du nombre de places de prison en France », lance Isabelle Rome. Pour résorber la surpopulation, il existe des alternatives à l’incarcération, « mais il faut les rendre crédibles avec du personnel éducatif, des actions en relation avec la personne, l’humain. Pas forcément des choses spectaculaires ».
Mineurs : l’exemple allemand
On lui fait alors remarquer qu’en Allemagne, la détention des mineurs est orientée vers une véritable prise en charge : les placements s’accompagnent de cours, de véritables formations diplômantes. Avec, à la clef, dès l’obtention du diplôme (allant jusqu’au niveau universitaire) ou de la formation, la disparition de la mention sur le casier judiciaire. « En France, il existe six prisons pour mineurs, toujours en cours d’évaluation des résultats obtenus avant de lancer d’autres projets .» Fermement, Isabelle Rome souligne que « la prison fait partie de la société. Ce n’est pas une décharge pour mettre des encombrants. Des individus ont transgressé et il faut leur permettre de ne pas récidiver. C’est l’intérêt de la société ».