Repenser le modèle des prisons : au-delà des murs
Eric Moretti, substitut du procureur de Toulon et ex-directeur de prison, a participé à une réflexion sur la refonte de la pénitentiaire. Aux côtés d’une magistrate et d’un journaliste
La vie réelle du monde pénitentiaire à l’inverse de l’image que s’en fait la société. Certainement. La prison, l’incarcération, le système des (remises de) peines alimente les conversations, les rumeurs. Mais que sait-on vraiment ? Lors de la mise en oeuvre de la contrainte pénale, l’opinion publique imaginait la libération de détenus par milliers. Les prisons allaient se vider. Il n’en a rien été. Lors d’une conférence, organisée samedi, dans le cadre du deuxième salon « Livres, justice et droit » à Toulon, les idées reçues ont été balayées. Et notamment en ce qui concerne le nombre de détenus, qui a augmenté. Il atteint en 2016, 69 375 personnes (soit + 3,8% en un an) pour 58 311 places.
Double vision
Ancien directeur d’établissement pénitentiaire (l’établissement public de santé national de Fresnes), Eric Moretti est passé de l’autre côté de la scène judiciaire : il est actuellement substitut du procureur de la République de Toulon. Un cheminement professionnel qui lui permet d’avoir cette double vision du parcours d’un prévenu ou d’un condamné. Particulièrement en ce qui concerne la surpopulation carcérale. «À La Farlède, deux cents personnes sont sur un matelas posé au sol. Est-ce que plus on construit de places, plus on incarcère ? Quand on requiert, on ne s’interroge pas sur la disponibilité des places. On réprime. La question se pose sur l’incarcération d’individus multirécidivistes en matière de conduite sous l’empire d’un état alcoolique. Il n’y a pas d’autre possibilité que la prison. Il faudrait des structures spécifiques pour une prise en charge. » Un livre blanc sur la création de structures alternatives ou expérimentales est en cours d’élaboration. Aux côtés d’Isabelle Rome, magistrate, et de Matthieu Delahousse, journaliste (lire ci-dessous), Eric Moretti a tenté de définir les contours de ce qui pourrait être la prison de demain. En détaillant les failles et en proposant des alternatives. François Falletti, avocat et ex-procureur de la République de Paris