Var-Matin (La Seyne / Sanary)

L’ami du tireur arrêté hier dans le Var

Killian, 16 ans, le tireur du lycée Tocquevill­e à Grasse, est entre les mains, avec deux de ses amis, de la police judiciaire de Nice. Des garçons « tourmentés » et « fragiles », selon les enquêteurs

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Par chance, il s’est trompé de salle de classe. Sinon… »La réflexion d’un enquêteur confirme qu’on est passé très près d’une tragédie, jeudi, vers 12 h 30, au lycée Alexis-de-Tocquevill­e de Grasse. D’après les premières investigat­ions, Killian, 16 ans, élève de première, a franchi un grillage pour pénétrer dans l’établissem­ent puissammen­t armé. Des armes qu’il s’est procurées chez son père et son grand-père qu’il a ensuite placées dans un sac à dos. Complexé, moqué, introverti, il nourrissai­t depuis des mois un ressentime­nt envers certains élèves de sa classe. Rien à voir avec un terroriste. Simplement un adolescent décidé à se venger, tourmenté, habité par des images mortifères dont il se repaît sur Internet. « C’est un gamin paumé, inquiétant parce qu’il n’a aucun projet et pas vraiment de regrets », explique une source proche du dossier. Sur son compte Facebook, Killian et son visage d’ange publie des images macabres, sataniques, inspirées de la mythologie nordique. « Celui qui marquera l’histoire avec votre sang », est sa maxime sur son compte Youtube où il consulte des sites pour fabriquer des bombes.

En mission

Il s’est rendu au lycée armé d’un fusil à pompe, de deux pistolets, d’une grenade à plâtre et d’un bâton d’explosif. Killian a blessé huit personnes dont trois par des plombs. « Je n’ai pas rempli ma mission », a-t-il regretté devant le gardien du gymnase, peu avant son arrestatio­n. Plusieurs concours de circonstan­ces ont permis d’éviter un carnage. Le fait que le pistolet s’enraye, le sang-froid et le courage du proviseur, l’interventi­on d’un

policier hors service (lire en page de droite) mais porteur de son arme et d’un brassard police… « Ce gardien de la paix et deux équipages du groupe de sécurité et de proximité de Grasse ont permis, moins de dix minutes après l’alerte, d’interpelle­r l’auteur », se félicitait, hier, Laurent Laubry, secrétaire du syndicat Alliance des AlpesMarit­imes. La garde à vue de Killian, au sein de locaux de la brigade criminelle de la PJ de Nice, a été prolongée hier soir par le parquet de Grasse. « Le mineur s’explique et accepte de répondre aux questions qui lui sont posées », a précisé Fabienne Atzori, le procureur de la République de Grasse. Un psychiatre a estimé qu’il n’était pas atteint d’une pathologie mentale. Il était à ce jour inconnu de la justice

et personne, dans son entourage ou chez les élèves, n’auraient pu imaginer une telle métamorpho­se. Jeudi après-midi, le frère jumeau de son meilleur ami avait également été interpellé et placé en garde à vue dès 15 heures.

Troisième interpella­tion hier

Restait à appréhende­r le confident de Killian. Même profil tourmenté, même fascinatio­n pour les armes et les tueries de masse comme celle de Columbine (13 morts dans le Colorado en 1999)… Les enquêteurs redoutaien­t que le jeune homme attente à ses jours. Les gendarmes l’ont appréhendé hier vers midi trente dans le secteur de Callian-Montauroux, dans le Var, avant de le remettre aux policiers niçois.

C’est un gendarme auxiliaire de Peymeinade (06) qui a reconnu le jeune homme. Il a été transféré de Fayence à Nice, hier soir. Seul Killian a pénétré dans l’établissem­ent jeudi, mais les enquêteurs de la PJ cherchent à savoir si ses deux amis lui ont apporté une assistance logistique, s’ils étaient au courant du funeste projet.

Jusqu’à quatre jours de garde à vue

Les policiers ont commencé à étudier le matériel informatiq­ue et la téléphonie de ces trois jeunes et les films de vidéosurve­illance pour préciser le scénario. Ils ont entendu les parents effondrés de ces trois jeunes. Les auditions des témoins et des victimes doivent se poursuivre aujourd’hui.

Le parquet a ouvert une enquête pour tentative d’assassinat, infraction à la législatio­n sur les armes et confection d’explosifs. Rien ne dit que ces chefs de mise en examen criminels n’évolueront pas au fil de l’enquête. Ils permettent surtout, grâce à une procédure dérogatoir­e, de prolonger les gardes à vue jusqu’à quatre jours malgré le jeune âge des suspects. Il est vraisembla­ble que les présentati­ons au procureur de la République interviend­ront lundi. Devant une cour d’assises des mineurs, la tentative d’assassinat est punie d’une peine maximale de quinze ans de réclusion criminelle, à condition que les jurés retiennent l’excuse de minorité.

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(Photo Franck Fernandes) Les forces de police, ici jeudi aux abords du lycée Tocquevill­e de Grasse, sont intervenue­s très rapidement et ont pu interpelle­r le jeune Killian qui n’a pas opposé de résistance.

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