Cannes : des fautes déontologiques mais pas de délit à l’encontre d’un ex-policier
C’est l’histoire d’un policier cannois qui fréquentait trop les cercles de jeux, jouait trop au poker, avait trop d’amis peu recommandables et se déplaçait trop souvent avec son arme de service, alors que la France n’était pas encore en état d’urgence. Pour rendre service à une connaissance qui venait de se laisser séduire par un chimérique placement financier, A. M. est allé récupérer 5 000 € auprès d’escrocs notoires. C’était en 2014. Les 5 000 € récupérés ont été dilapidés par son colocataire, lui aussi joueur invétéré. Cela a valu au policier une mise en examen en octobre 2016 pour « extorsion de fonds » et 54 jours de détention aux Baumettes à Marseille. À sa libération, il a été mis en disponibilité sans solde. Entre-temps l’ami du policier a remboursé les 5 000€.
« Il a gâché sa carrière »
Jugé mardi en correctionnelle à Grasse, A. M. a les larmes aux yeux. Sa carrière dans la police, institution qu’il chérissait, a été brisée. Sa mutation disciplinaire à Orléans (Loiret) est restée lettre morte. Il est aujourd’hui suivi par un psychiatre et cherche à se reconvertir. Le procureur Valérie Talonne dénonce « le comportement infantile, immature » de ce fonctionnaire de police. « Les magistrats se doivent d’avoir confiance. Comment voulez-vous que le parquet puisse travailler dans ces conditions ? » L’accusation requiert six mois de prison avec sursis et s’oppose à toute demande de non-inscription au casier judiciaire. Pour Me Joël Blumenkranz, son client a déjà été durement sanctionné : « Le ministère de l’Intérieur n’a pas attendu votre délibéré. A. M. est déjà révoqué. Par son inconséquence, il a gâché définitivement sa carrière. »
Problème de qualification juridique
La défense reconnaît les fautes déontologiques – « évidentes » – du brigadier. Elle insiste sur « la serviabilité » d’un homme, « très investi dans son travail », encore aujourd’hui soutenu par des collègues. Me Blumenkranz rappelle que l’individu, auprès duquel les 5 000 € ont été récupérés, « qui ose se constituer partie civile », a été condamné pour escroquerie : « A. M. a voulu se donner le beau rôle. Certainement. Mais ce n’est pas une infraction pénale », plaide l’avocat niçois qui taille en pièce la procédure : « Pour qu’il y ait extorsions de fonds, il faut une contrainte. Où est-elle dans ce dossier ?» Le parquet avait d’ailleurs hésité sur la qualification du délit : extorsion puis corruption puis escroquerie et finalement extorsion. L’argument juridique a pesé, puisque la présidente du tribunal correctionnel, Célestine Siracusa, a relaxé le prévenu.