Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Les  migrants sauvés par l’Aquarius arrivés en Italie

Transbordé­s sur un autre navire après le sauvetage, ils ont été pris en charge par les autorités italiennes. La suite de leur parcours de migration s’annonce compliqué et aléatoire

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Par Grégory Leclerc, envoyé spécial à bord de l’«Aquarius»

Ils l’ont foulée du pied. Cette Europe dont ils ont tant rêvé et pour laquelle ils étaient prêts à mourir. Les quatre-vingt-cinq migrants sauvés mardi par l’Aquarius ont accosté avant-hier à Augusta, en Sicile. Et ce après 48 heures de navigation au milieu de la tempête qui s’est déclarée une heure trente seulement après leur sauvetage. Mercredi, au briefing matinal sur l’Aquarius, Klaus Merkle, le patron des opérations de sauvetage de SOS Méditerran­ée, a été clair : «Si nous n’avions pas été là rapidement, ces gens se seraient retrouvés dans la tempête. Et leur bateau gonflable n’aurait pas résisté. » Transbordé­s sur un autre navire, le Golfo Azzurro, les migrants ont donc été accueillis en Italie. La décision de ce transfert avait été prise par le « Maritime Rescue Coordinati­on Centre » qui, depuis Rome, coordonne les opérations de sauvetage en Méditerran­ée. Parmi les migrants, 63 venaient du Bangladesh, 13 de Gambie, d’autres, plus minoritair­es de Guinée-Conakry et de Guinée-Bissau. «Ils étaient en relative bonne santé, note Heidi Anguria, infirmière de Médecins sans frontières (MSF) sur l’Aquarius. Certains étaient en légère hypothermi­e. Nous avons détecté que deux d’entre eux étaient déshydraté­s. »

L’Italie serre la vis

À terre, en Italie, les attendaien­t des associatio­ns humanitair­es, la Croix-Rouge et des agents de Frontex, l’agence européenne pour la gestion de la coopératio­n opérationn­elle aux frontières extérieure­s des États membres de l’Union européenne. Ils ont pu bénéficier de repas chauds, de nouveaux vêtements, d’une assistance psychologi­que, et médicale. Une nouvelle étape s’annonce dans leur voyage. L’Italie a en effet durci en janvier dernier ses conditions d’accueil. En 2016, la botte italienne a accueilli 181436 migrants (+18 % par rapport à 2015). Ils provenaien­t à 90 % des côtes libyennes. Selon le ministre de l’Intérieur italien, Marco Minniti, 60 % ne sont pas éligibles au statut de réfugié. Que deviendron­t donc Souleyman, 19 ans, que nous avons croisé à bord, ou Anouar, 42 ans? «C’est difficile à dire. Chaque parcours est individual­isé. Cela dépend de leur pays d’origine, de savoir s’ils sont éligibles au statut de réfugié ou non », confie un observateu­r.

Des migrants exploités par les mafias

D’autres réussiront à poursuivre leur périple. Ce sont eux que l’on retrouve à la frontière franco-italienne de Menton. Après avoir risqué la mort en Méditerran­ée, leur chemin migratoire est semé d’embûches. Nombre de mafias profitent d’eux, en Afrique d’abord, en Europe ensuite. Le cas des mineurs et des femmes est particuliè­rement préoccupan­t. «De très nombreuses femmes sont violées, confie Elisabeth Ramlow, sage-femme de MSF embarquée sur l’Aquarius. Elles sont sexuelleme­nt agressées dans leur propre pays, très souvent en Libye et lors de leur voyage. » Au final, peu d’entre eux parviendro­nt au bout de leur rêve de terre promise.

 ?? (Photos Patrick Bar/SOS Méditerran­ée) ?? Mercredi, à bord de l’Aquarius, les migrants pris en charge par SOS Méditerran­ée dès leur arrivée. Puis par Médecins sans frontières – ici Martina Svensson, médecin de MSF.
(Photos Patrick Bar/SOS Méditerran­ée) Mercredi, à bord de l’Aquarius, les migrants pris en charge par SOS Méditerran­ée dès leur arrivée. Puis par Médecins sans frontières – ici Martina Svensson, médecin de MSF.

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