Hollande naturalise tirailleurs sénégalais
Ces hommes ont combattu dans les rangs de l’armée, de la fin du XIXe siècle aux guerres coloniales. Ils seraient quelques dizaines encore en vie aujourd’hui
Réparer une « injustice » et quelques humiliations aussi : vingt-huit anciens tirailleurs sénégalais ont été « réintégrés », hier, dans la nationalité française par François Hollande sous les ors de l’Elysée, six décennies après en avoir été privés par l’indépendance des colonies africaines de la France. Fragiles octogénaires appuyés pour la plupart sur une canne, la poitrine bardée de médailles, ils s’étaient illustrés autrefois sous la bannière tricolore en Indochine ou en Algérie et ont entonné, certains avec les larmes aux yeux, la Marseillaise. François Hollande a célébré ces «retrouvailles » avant de remettre à chacun d’entre eux le décret qui en fait de nouveau un citoyen français. « Vous êtes l’histoire de France » et celle-ci a une « dette de sang » à votre égard, a-t-il lancé devant ces anciens combattants nés dans les années 30. Parmi eux figurent 23 Sénégalais mais aussi deux Congolais, deux Centrafricains et un Ivoirien. « C’est l’aboutissement d’un long combat », s’est réjouie dans les mêmes termes Aïssata Seck, adjointe à la maire de Bondy (SeineSaint-Denis) et dont la pétition signée par 60 000 personnes, dont de nombreuses célébrités, était à l’origine de cette cérémonie. « Ces Français par le coeur sont dans des situations terriblement précaires. Munis de simples cartes de séjour, ces retraités n’ont d’autre choix que de rester seuls sur le territoire français. Partir finir leur vie au Sénégal, près de leurs familles, signifierait perdre leurs faibles pensions », expliquait-elle dans sa pétition. D’autres cérémonies similaires devraient suivre, dans le cadre moins solennel de préfectures. « Tous les anciens tirailleurs qui résident en France et qui en feront la demande bénéficieront de la même réponse » positive, a assuré François Hollande. Ils seraient encore quelques dizaines, selon l’Elysée.
« Couverts de gloire »
Les 28 tirailleurs honorés à l’Elysée (dont l’un s’était fait représenter) incarnent la « dernière génération » d’une longue lignée de combattants africains, engagés volontaires ou enrôlés d’autorité dans les rangs de l’armée française. Si les premiers régiments ont été formés au Sénégal, ces « tirailleurs sénégalais » à la célèbre chéchia rouge étaient originaires de toutes les colonies françaises, de l’Afrique de l’ouest et du centre, jusqu’à Madagascar. « On sait qu’ils étaient plus de 200 000 hommes lors de la Première Guerre mondiale, 150 000 pour la Seconde, 60 000 en Indochine… », explique l’historien Julien Fargettas, auteur d’un ouvrage consacré à ces « soldats noirs ». Ils se sont « couverts de gloire sur tous les fronts », a souligné, pour sa part, François Hollande, rappelant qu’il serait, aujourd’hui au Chemin des Dames pour commémorer le centenaire de cette offensive, où figuraient « en première ligne » ces tirailleurs venus de si loin.