Entre populisme et simplisme démagogique
Il avait dit que, s’il faisait connaître son choix, il le ferait après le premier tour de la présidentielle. Et d’ailleurs, il n’est pas certain que, s’il avait donné le nom de son favori, cet adoubement ait été bénéfique à celui-ci. Si François Hollande a multiplié les interviewes, depuis une semaine, avant le avril, c’est que, face à cette campagne, qui juge-t-il « sent mauvais », il ne se résout pas à se taire. Quatre candidats se disputant les deux premières places, c’est du jamais vu sous la Ve République. Que deux de ces candidats s’érigent en candidats de l’anti-système, que tous deux, portés par la vague de désarroi, de frustration ou de colère, par la volonté de « dégagisme » ambiante, voilà qui, d’un coup, change la donne et justifie la volonté du Président sortant d’intervenir dans le débat. La qualification de Marine Le Pen pour le second tour ne serait pas une surprise pour François Hollande. Mais il pensait que les différents candidats se chargeraient eux-mêmes de combattre ses idées et son programme. La campagne a tourné autrement : peu de place pour les débats programmatiques, beaucoup de temps en revanche accordé par les hommes politiques – et les journalistes – aux polémiques autour de François Fillon. De remise en cause profonde, efficace, du programme de Marine Le Pen, il n’a à peu près pas été question, sauf à l’occasion de quelques prises de becs pendant les débats télévisés, à ou à candidats. Ou dans des interventions ponctuelles, comme celles de Christian Estrosi, qui n’ont pas été reprises à leur compte par les candidats.
« Le leader de la France insoumise, s’il a du talent, ne représente pas la gauche “qui permet de gouverner” ».
Là est la raison essentielle des récentes interventions de François Hollande qui juge devoir avertir les Français du danger qu’ils courent, en sortant, surtout de l’Europe et de l’euro. Ne serait-il pas, dans ce cas, jugé en partie responsable de la montée du Front national ? La question lui serait posée, mais, surtout, il ne pourrait pas éviter de se la poser à lui-même. Différente mais grave aussi, est sa mise en garde contre Jean-Luc Mélenchon, deuxième cible des récentes interventions du chef de l’État. Que celui-ci se hisse dans le peloton de tête, qu’il ait même une chance de coiffer sur le poteau Emmanuel Macron et François Fillon, voilà quelque chose que François Hollande, il y a encore une dizaine de jours, n’avait pas prévue. Il le dit aujourd’hui nettement : le leader de La France insoumise, s’il a du talent, ne représente pas la gauche « qui permet de gouverner ». La qualification de Mélenchon au second tour serait un formidable désaveu pour François Hollande, qui a passé son quinquennat à devoir lutter contre tous ceux, frondeurs ou « mélenchoniens » l’ont sans cesse accusé de trahir ses engagements. D’autant que depuis , c’est ce combat entre gauche de gouvernement et gauche protestataire, qui a dominé la vie politique. François Hollande le souligne aujourd’hui. Populisme de Marine Le Pen, simplisme démagogique de Jean-Luc Mélenchon, la France peut-elle n’avoir que ce choix?