Déportation : l’enfer au coeur de la fabrication de l’arme secrète d’Hitler
Dans les tunnels glacés de Dora, en ex-RDA, près de résistants français ont été employés de force à la fabrication de l’arme secrète d’Hitler, la fusée V, des travailleurs de « l’enfer » auxquels va rendre hommage une somme d’historiens en préparation. D’ici , le Centre d’histoire et de mémoire de La Coupole à Helfaut, près de Saint-Omer dans le Pas-de-Calais, devrait en effet retracer, dans une encyclopédie, la vie de ces combattants, qui s’est souvent arrêtée dans cette usine de « Mittelbau-Dora » : n’en revinrent pas, un taux de mortalité bien supérieure aux autres camps de concentration. Si La Coupole s’intéresse à cette page méconnue de l’histoire de la Résistance, c’est parce que le V, produit à Dora, devait ensuite être acheminé et tiré à Helfaut, depuis un immense bunker nazi dont on visite aujourd’hui les entrailles de béton. En ligne de mire : Londres, que cette première fusée stratosphérique de l’histoire devait atteindre en minutes. Le débarquement allié de en Normandie et un manque de temps pour achever les travaux en décidèrent autrement... « Mais comment peut-on avoir l’idée de détruire un pays? », s’interroge encore Georges Jouanin. À ans, sa mémoire est encore à vif : « À Dora, j’ai vécu un enfer. Nous dormions
sur des châlits infectés de poux et travaillions h par jour à percer la roche. On voyait nos compagnons mourir. Un travail de forçat... ».
« Redonner un visage aux disparus »
D’abord déporté à Buchenwald, en décembre , après son arrestation par la Gestapo à Paris, il est transféré deux mois plus tard au Kommando de Dora, à km de là. C’est dans ces deux tunnels de km de long, que les nazis entreprirent à marche forcée la création ex nihilo d’une immense usine souterraine, cachée de l’aviation alliée. Elle prenait le relais du site de Peennemünde, sur la Baltique, bombardé. Plus du tiers des internés – majoritairement des Russes – périrent « au mépris complet des conditions de travail », relate Laurent Thiery, historien de La Coupole, chargé de mettre en place, avec une vingtaine d’autres collègues, cet ouvrage visant « à redonner un visage et une vie à ces personnes disparues ». Parcours professionnel, familial, politique, militant, et bien sûr conditions de leur déportation et leur mort : chaque détenu aura sa notice biographique.