Var-Matin (La Seyne / Sanary)

OKJA, VERSION NETFLIX De l’art ou du cochon ?

La polémique sur le film produit par la plateforme Internet Netflix a forcément investi la Croisette, hier matin, après la projection d’Okja, comme si, à l’image du cochon, il s’agissait d’un cinéma « génétiquem­ent modifié »!

- par ALEXANDRE CARINI acarini@nicematin.fr

I l était écrit que l’on ferait une idée fixe sur Netflix. Depuis que la sélection officielle a fait une place à deux films produits par la plateforme Internet, qui ne seront pas distribués dans les salles en France. Hier matin, c’est Okja, qui a essuyé les plâtres de la polémique, avant The Meyerowitz Stories demain. Ça commence par les huées d’une «fausse alerte» (?). Des cris et sifflets tombés du balcon, dès l’apparition du sigle Netflix puis du visage de l’actrice Tilda Swinton (coproductr­ice du film) sur l’écran du Grand Auditorium. Avant que des applaudiss­ements d’une autre partie de la salle ne leur fassent écho. Dialogue improvisé qui couvre ceux du long-métrage « outrage », jusqu’à l’interrupti­on de la projection, pour une quinzaine de minutes.

« Incident technique », justifie le Festival. Mais la coïncidenc­e du brouhaha avec l’objet du débat met déjà les pieds dans le plat de porcidé OGM! Du coup, entre deux questions de fond ou de forme sur Okja, sorte d’ E.T. à la sauce Miyazaki, c’est évidemment Netflix qui est revenu très vite sur le tapis (rouge). D’abord par la voix rapportée de Pedro Almodóvar, pour lequel Palme d’or doit forcément aller de pair avec salles obscures. Aussi sèche que la sorcière blanche de Narnia malgré sa diplomatie toute britanniqu­e, l’anglaise Tilda tire la première : « C’est une déclaratio­n du président, c’est important qu’il soit libre de la faire, c’est le jeu. Mais ça pose problème de coller une étiquette sur des gens invités à participer à la fête cannoise [et toc !] et c’est justement une bonne opportunit­é de voir ce film sur grand écran [et tuc !]. En vérité, je pense que toute chose a sa place en ce monde ». Le temps de recharger ses munitions, et Miss Swinton balance une deuxième salve, plus vacharde que cochonne : « Dans le monde, des gens pourront peut-être voir Okja au cinéma. Mais des milliers de films ont été montrés à Cannes, qui n’ont jamais été diffusés sur grand écran ». Sous-entendu, Okja est grand public, lui...

Ça t’en bouche un groin ? Plus embarrassé, Bong Joon-ho loue la liberté totale dont il a pu jouir pour faire son film avec Netflix (« Je pouvais mettre autant de sang que je voulais ! »), avant de se montrer faussement fataliste : «Je suis un très grand fan de Pedro Almodóvar, c’est toujours bon qu’il parle de mon film, en bien ou en mal, et je suis très content qu’il le voit ce soir [hier soir, ndlr] ». Jake Gyllenhaal voit au-delà, car « ces nouvelles plateforme­s permettent de communique­r un message à un plus grand nombre, et quelque soit sa forme, l’expression artistique joue un rôle essentiel ». Le message écolo-anticapita­liste d’Okja prend alors définitive­ment le pas, avec la petite Ahn Seo-hyeon, son héroïne, qui a décidé de manger moins de charcuteri­e depuis. Cochon qui s’en dédie ?

« LA SÉANCE INTERROMPU­E, CE N’ÉTAIT PAS UN SABOTAGE ANTI-NETFLIX »

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Bong Joon-ho,Tilda Swinton, Ahn Seo-hyeon et Jake Jake Gyllenhaal n’ont pu éviter les questions sur la polémique Netflix hier après la projection d’Okja.

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