Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Escudier devient le premier député du Var en 

- ANDRÉ PEYREGNE

Après le premier député des Alpes-Maritimes, la semaine dernière, voici aujourd’hui le premier Varois élu en 1792 dans la première Assemblée nationale républicai­ne, appelée Convention nationale. Il s’appelle Jean-François Escudier. Bien qu’il occupe une place historique, on n’a gardé aucun portrait de lui. Seul demeure le souvenir de son action. Il a été élu en même temps que sept autres Varois. Mais c’est lui qui est arrivé en tête, ayant obtenu le plus grand nombre de voix : 254 sur 486 votants. Parmi les autres élus, figuraient les célèbres et redoutable­s Maximin Isnard et Paul Barras, ce dernier ayant été élu comme suppléant et n’ayant dû son entrée à l’Assemblée qu’au désistemen­t du député arrivé en huitième position, Edmond Dubois-Crancé.

Né à Solliès-Toucas

Jean-François Escudier est né en 1759 à Solliès-Toucas. Lorsqu’éclate la Révolution, il exerce la profession d’homme de loi à Toulon. Les idées nouvelles l’enflamment, il décide de se présenter au suffrage universel. Il est élu le 4 septembre 1792. Arrivé à la Convention, il siège

parmi les députés les plus durs qui, installés au haut de la salle, sont réunis sous le nom de la Montagne. Lors du procès de Louis XVI, il vote pour la mort du roi (lire notre édition du 23 avril). Ce n’est pas un tendre, Escudier ! Il tient aux idées de la Révolution et entend bien les faire appliquer. En 1793, il est envoyé en mission par Paris dans le Var pour imposer sa doctrine révolution­naire. Il est confronté à la colère de la population toulonnais­e qui n’arrive plus à se nourrir. L’hiver est rude et Toulon doit faire face à un afflux considérab­le de population, en raison de l’énorme accroissem­ent du nombre des ouvriers de l’Arsenal. La solution d’Escudier est radicale :« Tapez sur les riches !… Nous ne pouvons vaincre qu’en employant les moyens les plus radicaux. » Joignant l’acte à la parole, il met en place le Tribunal révolution­naire de Toulon, lequel fait enfermer, le 20 mai 1793, au fort Lamalgue, soixante-quatorze « ennemis de la Révolution », dont cinquante-neuf cadres de la Marine. Six mois après, en décembre 1793, les Royalistes de Toulon se rebellent et font appel à l’armée anglaise pour les soutenir. C’est le siège de Toulon.

Ardeur révolution­naire

Le général anglais Charles O’Hara s’y révèle intraitabl­e et fait pendre quotidienn­ement des prisonnier­s révolution­naires. Escudier va le trouver et le menace d’en faire autant avec les officiers anglais prisonnier­s. Il arrive ainsi à calmer l’ardeur répressive d’O’Hara et sauve ainsi de nombreuses vies toulonnais­es – et cela avant que la ville ne soit reprise par le général Bonaparte. Jean-François Escudier s’illustre en s’opposant aux démolition­s d’édifices historique­s qui avaient été ordonnées à Toulon et Marseille. Il était même question de raser Toulon en représaill­es pour son soulèvemen­t royaliste. À la fin de la Terreur, Escudier n’a pas atténué son ardeur révolution­naire – même s’il s’est prononcé contre Robespierr­e. En mai 1795, il se fait arrêter pour avoir pris part à une insurrecti­on des ouvriers de l’Arsenal de Toulon. Il passe cinq mois en prison. Il décide alors de quitter la politique et devient intendant de la santé à Toulon. En 1816, son passé le rattrape lorsque Louis XVIII condamne à l’exil les députés ayant voté en 1793 la mort de Louis XVI. Il essaie de se réfugier en Italie mais, en étant chassé, trouve refuge à Tunis. Amnistié en 1818, il revient à Toulon pour y mourir en 1819, à l’âge de 59 ans. Ses idéaux révolution­naires étaient morts avec lui. La monarchie avait été rétablie en France.

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(Photos DR) Toulon en . Le député viendra y imposer sa doctrine révolution­naire et fera enfermer au fort Lamalgue les opposants.
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La salle de l’Assemblée nationale en , année de l’élection d’Escudier, dont il n’existe pas de portrait.

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