G. Darmanin: «Comprendre le monde dans lequel on vit»
Le ministre de l’Action et des Comptes publics, qui avait fait campagne pour Sarkozy à la primaire de la droite, vient à Nice pour soutenir la candidate macroniste qui se présente contre Eric Ciotti
A34 ans, il est le vice-benjamin du gouvernement, après Mounir Mahjoubi. Ministre de l’Action et des Comptes publics, le maire de Tourcoing, Gérald Darmanin, est l’une des prises de guerre d’Emmanuel Macron chez Les Républicains. Ce petit-fils de harki et fils de femme de ménage, tenant d’une droite sociale, fut le coordinateur de la campagne de Nicolas Sarkozy lors de la primaire de la droite. Ce samedi, il vient à Nice et Grasse, en compagnie du ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, pour soutenir les candidats de La République en marche ! engagés aux législatives face à ses anciens amis (1)…
Il y a un an, vous vous prépariez à faire la campagne de Nicolas Sarkozy avec Eric Ciotti. Vous venez aujourd’hui soutenir son adversaire aux législatives. Ne marche-t-on pas sur la tête ?
Je ne le crois pas. Il y a aujourd’hui une situation inédite de renouvellement politique avec un Premier ministre de droite dans un gouvernement de recomposition nationale. Je regrette que les dirigeants des Républicains n’aient pas choisi, en nombre, de saisir la main tendue par le président de la République. Dans les Alpes-Maritimes, il y a ceux qui répondent à la main tendue, comme mon ami Christian Estrosi, et ceux qui n’y répondent pas. C’est leur droit et je le respecte, comme je respecte Eric Ciotti. Je ne viens pas dans les Alpes-Maritimes pour aller contre lui ou Jérôme Viaud que j’apprécie, mais il me paraît normal de soutenir ceux qui veulent donner à ce gouvernement une chance de faire avancer la France. A ce titre, j’apporterai aussi mon soutien à Marine Brenier (la candidate LR dans la circonscription, l’ancien fief de Christian Estrosi, ndlr).
N’est-ce pas aussi cela que les Français reprochent aux politiques : l’adaptation de leurs convictions à leur ambition ?
Vous avez sans doute raison mais je ne me sens pas concerné. J’ai quitté la campagne de François Fillon notamment parce que je trouvais que son projet ne protégeait pas les classes populaires. C’est d’ailleurs aussi ce que disait Christian Estrosi. D’autres ont continué à soutenir l’augmentation de la TVA, heures payées moins que heures, ce qui est le contraire du message du « travailler plus pour gagner plus » de Nicolas Sarkozy. J’ai donc pris mes distances, tout en restant loyal à ma famille politique jusqu’au premier tour de la présidentielle et à l’élimination de François Fillon, qui était prévisible… Je constate par ailleurs qu’entre le projet défendu pour la présidentielle par les dirigeants des Républicains et celui qu’ils présentent désormais, il y a un monde. Ils ont supprimé l’augmentation de la TVA, ont changé de politique fiscale, ne parlent plus du déficit. Tout cela n’est pas très sérieux. J’ai plutôt l’impression que le changement de convictions est chez ceux qui sont restés à défendre l’indéfendable, depuis le meeting du Trocadero.
Après le Penelopegate, vous aviez souhaité que François Fillon se retire de la course à l’Elysée. Richard Ferrand peut-il, lui, rester ministre ?
La règle édictée par le Premier ministre est claire et juste : quand on est mis en examen ou battu dans les élections, on quitte le gouvernement. Aujourd’hui, Richard Ferrand n’est ni l’un ni l’autre. Et lorsque j’ai souhaité que François Fillon passe la main, c’est parce qu’il avait lui-même dit que s’il était mis en examen, il partirait. Cela n’a rien à voir avec la situation de Richard. François Fillon l’avait dit par trois fois : d’abord en se mesurant au général de Gaulle face à Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, puis publiquement à deux autres reprises. Ce qui pose problème, c’est la non-tenue de la parole publique.
Ministre des Comptes publics, cela signifie-t-il ministre de la rigueur ? Quelle est votre feuille de route ?
Cela signifie ministère du sérieux. Du sérieux budgétaire mais aussi du sérieux vis-à-vis des millions de fonctionnaires qui font un travail formidable pour la République. Ma feuille de route est triple. Elle est d’abord de rétablir les comptes publics, dont la Cour des comptes dit qu’ils n’ont pas été suffisamment bien tenus jusqu’à présent. Il faut sortir de la procédure de déficit excessif de la Commission européenne. C’est une question de souveraineté nationale et il faut le faire sans assommer les entreprises et les ménages de nouveaux impôts, mais au contraire en les allégeant pour rendre du pouvoir d’achat aux Français et relancer la croissance. Je veux ensuite mener la transformation de notre fonction publique et son adaptation aux nouvelles attentes des Français. Enfin, je suis le ministre de la modernisation de l’Etat et, à ce titre, celui de la simplification de la vie des Français. « Arrêtons d’emmerder les Français », disait le Président Pompidou. On va notamment mettre en place le grand projet d’Emmanuel Macron qui est le droit à l’erreur. L’idée est que l’administration favorise le conseil aux usagers, aux entreprises et aux collectivités, avant le contrôle et la sanction.
Vous prônez « un dialogue social original». C’est-à-dire?
Il faut comprendre le monde dans lequel on vit. Au-delà des organisations syndicales que je respecte et que j’ai tenu à recevoir dès la première semaine après ma nomination, chaque agent doit pouvoir donner son avis sur les méthodes de travail, la façon d’accueillir le public, l’organisation de la transition écologique… Je fais confiance à l’expertise du terrain, à l’intelligence du quotidien. Je suis un maire, j’aime le bon sens. Des fonctionnaires et des agents publics écoutés sont des fonctionnaires qui rendent un meilleur service à la population. Ce dialogue est quelque chose de concret, en lien direct avec le terrain sur lequel je me rends et je me rendrai en permanence.
Concernant les fonctionnaires, l’objectif est-il toujours de réduire leur nombre de ?
Le Président considère qu’il faut réduire de les postes d’agents publics sur cinq ans. Nous allons y arriver en modernisant l’Etat, en simplifiant les procédures, en diminuant les réglementations, en faisant des économies grâce au numérique. Cela, tout en renforçant par ailleurs les services dont les Français ont besoin : il n’y aura pas de diminution de postes chez le personnel soignant à l’hôpital et, à l’inverse, il y aura une augmentation des effectifs de police et de gendarmerie avec le recrutement de forces de sécurité supplémentaires. Sur ce point comme sur la loi Travail qui sont des priorités pour le gouvernement, je ne comprends pas qu’on ne soutienne pas son action quand on vient de la droite. Ce qu’aucun gouvernement n’avait fait, Emmanuel Macron le fait.
Vos anciens amis de LR n’arrêtent pas de taper sur la hausse de la CSG voulue par Emmanuel Macron. En quoi sera-ce une mesure utile ?
Les Républicains proposaient avec François Fillon une augmentation des impôts et aujourd’hui ils font comme s’il n’y avait plus d’équilibre budgétaire et européen à respecter. Ce n’est pas très sérieux. Il y a une réforme fiscale proposée par le Président et le Premier ministre qui consiste à supprimer des taxes, dont la taxe d’habitation, à remettre en oeuvre les heures supplémentaires défiscalisées, à baisser l’impôt sur les sociétés, les cotisations et les charges. Ce qui permettra tout simplement aux salariés français d’avoir plus de pouvoir d’achat. La démagogie a toujours existé en campagne électorale, c’est dommage que certains la pratiquent encore alors que madame Le Pen dépasse les dix millions de voix. 1. Les deux ministres rencontreront ce matin en mairie de Nice Christian Estrosi puis des familles de victimes de l’attentat du 14-Juillet. A 11 h 30, ils partiront ensuite de la place Masséna vers la Maison des associations, 12 ter, place Garibaldi, pour assister à 12 h au meeting de Caroline ReversoMeinietti. A 14 h enfin, à Grasse sur le cours HonoréCresp, ils viendront soutenir Loïc Dombreval.