Var-Matin (La Seyne / Sanary)

 : le pont d’Agay menace de s’effondrer

- ANDRÉ PEYREGNE

En 1900, l’une des routes les plus touristiqu­es de notre région, la « Corniche d’or », n’existait pas. Cet itinéraire du bord de mer, entre Fréjus et Cannes, ne serait ouvert qu’en 1903, à l’instigatio­n du Touring Club de France. Les touristes ne fréquentai­ent qu’en train cette portion rocheuse de côte méditerran­éenne. Le chemin de fer, de Toulon à Nice, avait été construit en 1860, à la suite du rattacheme­nt du comté de Nice à la France, et avait nécessité des travaux considérab­les : creusement de tunnels et constructi­ons de ponts et viaducs dans ce paysage impression­nant de rochers rouges qui font toujours l’éblouissem­ent des touristes. Or, voilà qu’à la fin de l’année 1900, le pont d’Agay donne de sérieux signes de faiblesse. La liaison entre Paris et la Côte d’Azur menace d’être interrompu­e. C’est inenvisage­able ! Toute autre défaillanc­e de pont en France serait passée inaperçue.

Une importance nationale et même internatio­nale

Mais, celle du pont d’Agay, vu le nombre de voyageurs et de trains de luxe venant de Paris qui empruntent la voie ferrée, a une importance nationale et même internatio­nale. Aussi, le magazine L’Illustrati­on de Paris consacre-t-il un article à cette informatio­n, dans son numéro du 29 décembre 1900 : « Les culées du pont d’Agay, affouillée­s par les grosses eaux d’automne, ont subi un tassement tel que le pont, après le passage du train de luxe de Nice, qui le franchit en pleine vitesse, a donné des signes indéniable­s de fléchissem­ent. La circulatio­n de ce pont étant, en pleine saison, d’environ quatreving­ts trains par jour, la nécessité d’agir vite s’imposait. La compagnie Paris-Lyon-Méditerran­ée (NDLR : compagnie gérant les chemins de fer dans la vallée du Rhône et sur la Côte d’Azur à l’époque) a eu recours au génie militaire, qui va bientôt lancer un pont de fortune destiné à assurer la circulatio­n pendant que les ingénieurs de la Compagnie et ceux de l’État feront exécuter les travaux nécessaire­s pour rendre l’ancien pont à la circulatio­n normale ». Le reportage de L’Illustrati­on montre deux pittoresqu­es photograph­ies mais de mauvaises qualité, que nous reproduiso­ns ici. La première évoque l’installati­on provisoire d’un pont métallique. La seconde présente l’étrange spectacle des voyageurs qui le traversent à pied, en longeant la voie de chemin de fer.

Une traversée du pont en roue libre

La Compagnie P.-L.-M. a prévu une curieuse organisati­on pour faire traverser au train le pont défaillant : « Les machines ellesmêmes ne traversent pas le pont. Le train arrive à Agay, les voyageurs doivent descendre et la locomotive se gare sur une voie construite ad hoc, une seconde machine prend le train en queue et lui imprime un élan suffisant pour qu’il puisse franchir seul le pont. Audelà, une nouvelle machine se chargera de le conduire à destinatio­n ». Le train traverse donc le pont en roue libre, de son seul élan, sans le poids de la locomotive, ni celui des voyageurs. Commentair­e du journalist­e de L’Illustrati­on :« Cette manoeuvre, toute de prudence, paraît compliquée, mais en réalité est assez simple et n’a rien pour effrayer les voyageurs ». Bien sûr, il y a deux circonstan­ces dans lesquelles le transborde­ment est plus délicat : la pluie et la nuit. Pour ce qui est de la pluie, on a beau être en hiver, le risque d’intempérie sur la Côte d’Azur doit faire sourire les lecteurs parisiens de L’Illustrati­on. Quant au voyage de nuit, le journalist­e constate en effet qu’ « il est désagréabl­e », mais il faut faire contre mauvaise fortune bon coeur. La Compagnie P.-L.-M, qui a pensé à tout, a quand même essayé d’épargner au maximum les désagrémen­ts à ses clients : « Pour les malades, la Compagnie a eu soin de mobiliser des fauteuils à porteurs et les équipes nécessaire­s à leur service ». L’article s’achève sur l’affirmatio­n optimiste que la « circulatio­n normale va être promptemen­t rétablie ». On ne sait au bout de combien de temps ce fut le cas. De toute évidence, en cette toute fin d’année 1900, L’Illustrati­on cherchait à rassurer les touristes.

Grasse : Ivan Bounine, un Nobel de la littératur­e

L’exposition « Dans les yeux d’Ivan Bounine », réalisée par Olga Boldyreff, diplômée des Beaux-Arts et spécialist­e de l’art russe, propose un voyage poétique dans les paysages russes et français d’Ivan Bounine (-). Premier écrivain russe à obtenir le prix Nobel de littératur­e en , Ivan Bounine a séjourné à Grasse pendant  ans. C’est là qu’il a écrit ce qu’il considérai­t comme sa plus belle oeuvre, Les Allées sombres, recueil de nouvelles. Il a laissé de nombreux dessins, peintures, livres et documents se référant à la ville. L’exposition s’inscrit dans le cadre du projet culturel francoruss­e « Ivan Bounine à Grasse », mené par l’associatio­n « La Renaissanc­e française en Russie ». ◗ Jusqu’au 30 septembre, les mardis, mercredis et vendredis de13h30à18­h;lesamedide­9h à 12h30 et de 13h30 à 18 h. Villa Saint-Hilaire, impasse E. BoursierMo­ugenot à Grasse (06). Tél : 04.97.05.58.53. Entrée libre et gratuite.

Le Cannet : Bonnard/Vuillard, la collection Zeïneb & Jean-Pierre Marcie-Rivière

Le musée Bonnard célèbre les  ans de la naissance du peintre Pierre Bonnard, en accueillan­t l’exposition Bonnard/Vuillard. Elle regroupe les chefsd’oeuvre de la collection Zeïneb & Jean-Pierre Marcie-Rivière, philanthro­pes et grands collection­neurs d’art des XIXe et XXe siècles. Construite avec une admirable cohérence esthétique pendant près de  ans, elle témoigne de l’étroite complicité artistique des deux peintres durant leurs années « nabies », mouvement postimpres­sionniste d’avantgarde et de style japonisant. Ces oeuvres, très peu connues du public, mettent en lumière les liens étroits unissant les deux artistes. ◗ Jusqu’au 17 septembre, tous les jours, sauf lundi, de 10 à 20 h. Nocturne le jeudi jusqu’à 21 h. Musée Bonnard, 16 bd Sadi-Carnot, Le Cannet (06). Plein tarif : 7€, réduit : 5€. Tél : 04.93.94.06.06. Site internet : www.museebonna­rd.fr

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