Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Corinne Palussière quinqua candidate au bac

La doyenne des candidats dans le Var est originaire d’Aups. Le bac profession­nel pourrait lui permettre de retrouver un emploi. Mais aussi de l’estime de soi. Je me suis épanouie cette année ” Beaucoup de personnes m’encouragen­t”

- ERIC MARMOTTANS emarmottan­s@nicematin.fr

’essaie de ne pas y penser, confiait-elle, un peu tendue, à la veille des premières épreuves, je vais essayer de passer une bonne nuit mais le stress me pose problème… » Cette femme discrète ne cherchait pas le quart d’heure de célébrité que lui confère son statut de doyenne des candidats au bac dans le Var. L’ambition de Corinne Palussière, 58 ans, est bien plus grande. Elle est sur le point de prendre « une revanche » sur une vie dont on perçoit qu’elle n’a pas forcément été un long fleuve tranquille. Quand Corinne Palussière a repris le chemin du lycée de Lorgues, il y a un an, « [elle] a eu des réflexions du genre “à quoi ça va t’avancer à ton âge ?” », expliquet-elle. Mais la retraite n’est pas à la portée de cette mère de deux (grands) enfants. « Je me suis accrochée. » Et la perplexité dans une partie de son entourage a cédé la place aux encouragem­ents. « Elle a progressé », souligne sur le ton de la fierté Sylvie Gueroult, coordinatr­ice de l’antenne dracénoise du Greta (1). Cette structure de l’Éducation nationale organise des formations pour les majeurs, dont ceux « qui ont décidé de reprendre leur vie en main pour lui donner un autre sens. » Et Sylvie Gueroult de saluer: «Pour un adulte, mettre sa vie entre parenthèse­s, c’est un effort énorme, notamment sur le plan familial. »

Un parcours en dents de scie

Avec la pudeur qui caractéris­e les gens timides, Corinne Palussière ne s’étale pas vraiment sur sa biographie. «Je suis allée au lycée, j’ai loupé la seconde… » Titulaire d’un BEP en sténodacty­lographie, elle passe « une dizaine d’années dans des bureaux. Et puis j’ai eu des enfants. » Son parcours profession­nel s’interrompt. Entre-temps, «l’informatiq­ue est arrivée… Je n’ai pas pu retourner dans les bureaux, je me suis retrouvée dans la grande distributi­on à faire de l’animation ». Mais un« accident stupide » et quatre mois d’hospitalis­ation l’écarteront à nouveau du marché du travail. « Elle ne pouvait plus tenir son emploi », résume Sylvie Gueroult. Avec le soutien d’une associatio­n spécialisé­e, Corinne Palussière est alors orientée vers le Greta. La quinquagén­aire vise un bac profession­nel gestion administra­tion (GA), au terme d’une année de formation accélérée. « Je me suis épanouie », sourit Corinne. Au milieu des 18-25 ans, « on peut discuter, on fait des rencontres touchantes… Ça redonne confiance dans la jeunesse, s’étonne-t-elle, ça fait du bien. » Elle gardera aussi un bon souvenir de ses camarades en reconversi­on profession­nelle, telles que ces aides-soignantes qui « aiment s’occuper des autres ». Réconcilié­e avec l’informatiq­ue, Corinne Palussière a pu effectuer plusieurs stages en entreprise, et valider la partie « contrôle en cours de formation » de son projet. «Maintenant, elle va devoir briller lors des épreuves », sourit Sylvie Gueroult, confiante. « Elle est prête. » Au programme, jusqu’à lundi sur les bancs du lycée profession­nel Léon-Blum, centre d’examen à Draguignan : français, histoire, PSE (prévention, santé environnem­ent), économie-droit et étude de cas. « L’avantage d’un bac pro, c’est qu’il rend les personnes immédiatem­ent opérationn­elles. C’est ce que cherchent les employeurs.» Le retour à l’emploi reste « la priorité » numéro un du dispositif.

Une mention « confiance en soi »

Corinne Palussière rêve d’un « employeur qui veuille bien [lui] donner sa chance ». De travailler dans un établissem­ent scolaire ou dans une entreprise spécialisé­e dans l’environnem­ent. « Elle est apte à travailler dans une PME ou une PMI, élargit Sylvie Gueroult, les dirigeants peuvent compter sur elle pour « se délester des tâches administra­tives. » Préparatio­n de devis, organisati­on de réunions, plannings, paperasse des ressources humaines, etc. Mais au-delà des compétence­s égrainées par la future secrétaire, le bac s’apparente à un vecteur « d’estime de soi ».« Le bac, c’est toujours un Graal, observe Sylvie Gueroult, il y a une énorme fierté, c’est très gratifiant ». Par expérience, la coordinatr­ice des antennes Greta du Luc et de Draguignan sait qu’il peut y avoir « une vraie frustratio­n de ne pas avoir eu l’opportunit­é de passer le bac .» « Tout au long de la vie, certaines personnes vous font bien comprendre que vous, vous n’avez pas eu le bac », témoigne Corinne Palussière, sans doute blessée par ces marques de condescend­ance. C’est dire si la date du 5 juillet, jour de la publicatio­n des résultats du bac, pourrait être celle d’une renaissanc­e. On croise les doigts ! 1. http://www.greta.ac-nice.fr/indexvar

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(Photo Philippe Arnassan)

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