Une octogénaire maltraitée à Cannes : deux ans ferme
Le matelas répugnant du petit studio du Cannet, couvert d’urine et d’excréments, se retrouvait fréquemment à sécher sur le balcon. Agressant, sans surprise, l’odorat des voisins. L’intérieur du logement était à l’avenant. Crasseux, voire répugnant. Dans le frigo, quasi vide, un poisson périmé. Voici dans quelles conditions Marcel Zinno, 59 ans, faisait vivre et dormir une octogénaire quasi impotente. Et pas n’importe quel logement, mais celui de la malheureuse ! Le prévenu, lui, prenait soin de ne pas utiliser cette couche infâme. Certains voisins le décrivaient pourtant comme « gentil », «aimable». Ton posé, chemise à carreaux, il comparaissait hier pour «violences habituelles sur une personne vulnérable » devant le tribunal correctionnel de Grasse. Cette femme il l’aurait rencontrée par hasard il y a six ans dans un parc.
L’homme squattait depuis six ans
À la barre, ce Parisien de naissance se présente un peu comme le protecteur de cette grabataire sans famille proche.
« Je m’occupais très bien d’elle.» S’il comparaissait hier, c’est pourtant qu’un automobiliste a vu Marcel Zinno, le 5 mai dernier à Cannes, traîner la malheureuse par le nez dans la rue et la gifler par deux fois. Il sera interpellé quelques minutes plus tard. Comme trop souvent, la justice a hier côtoyé le sordide. La dame est bossue, incontinente, diabétique, et ne jouit pas de toutes ses facultés mentales. Présentant des marques de violence, elle a depuis été prise en charge en milieu hospitalier. Interrogée, elle ne se souvient même pas de son prétendu bienfaiteur, ni de comment il s’est retrouvé à faire, comme le coucou, son nid chez elle.
Captation d’héritage ?
L’enquête a révélé que l’homme, sans lien de parenté, squattait depuis six ans. La découverte d’un confortable pécule de 400 000 euros sur le compte en banque de la dame a rendu la justice suspicieuse. Marcel Zinno, qui dit avoir été comptable, espérait-il rafler la mise ? Il retirait 1200 euros par mois sur le compte de la vieille dame, «pour les courses ». L’homme n’est pourtant pas sans ressources. Chaque mois, il touche 1 000 euros de loyer d’un appartement lui appartenant dans la capitale. Pour explorer la voie d’une possible tentative de captation d’héritage, une enquête incidente a été ouverte pour des faits «d’abus d’ignorance ou de faiblesse». Elle est toujours en cours. Détraqué ou manipulateur ? Marcel Zinno se baladait avec la culotte d’une autre femme dans la poche arrière de son short. «Elle avait une valeur, c’est du fétichisme », affirme-t-il à la barre. Il dément toute violence contre l’octogénaire. « Je la laissais parfois pour aller faire une course, elle a pu se blesser seule.» À l’audience, Marcel Zinno sourit franchement des accusations. Ce qui fait bondir le président, Marc Joando : «Arrêtez-vous de suite, les faits sont graves. » Le procureur, évoquant une « atteinte à la dignité humaine», a requis deux ans avec maintien en détention. «Ilnesait pas reconnaître qu’il n’arrive pas à s’occuper d’elle, a plaidé Me Sandrine Zepi pour sa défense. Il n’a pas pris la mesure de la dégradation de son état de santé en six ans. » Le tribunal n’entendra pas l’argument et suivra les réquisitions. Le coucou va devoir refaire son nid en prison.