Marek Halter “le biblique” a prêché au Brusc

Pour la clôture, jeudi, des “Entretiens de l’été” organisés à par Jérôme Lévy, l’écrivain Marek Halter a parlé des religions et du temps qui file, devant un public passionné.

Six-Fours

Abraham aurait pu avoir ce visage. Avec sa barbe de patriarche et ses traits à la fois rieurs et empreints de sagesse, Marek Halter, 81 ans, fait penser à un ancêtre biblique, tout droit sorti de l’Ancien Testament. Il se présente au public du Brusc comme un « juif polonais et écrivain français ». Enfoncé dans un fauteuil vert foncé, il fait face à l’assemblée, une centaine de personnes, réunies sur le port du Brusc. A sa gauche, Jérôme Lévy, l’hôte des “Entretiens de l’été”, mène l’interview.

Le temps qui passe

Ce n’est pas la première fois que l’écrivain mondialement connu foule la côte varoise. Jérôme Lévy rappelle qu’il n’était pas le bienvenu, en 1996, pour le Salon du Livre de Toulon. La mairie, FN à l’époque, s’opposait à ce qu’on rende hommage à Marek Halter. Un contresalon avait été organisé, l’auteur était venu. « J’aime bien les conflits. Les conflits permettent de réfléchir », commente-t-il. Derrière lui, les bourrasques de vent font cliqueter les mâts des bateaux aux couleurs pastel. L’homme, qui parle dix langues, n’est pas qu’écrivain. Il oeuvre beaucoup dans le caritatif – il a co-fondé “Action contre la faim” – et rencontre les grands de ce monde. « Vous êtes un messager de la paix » lui dit une femme, émue, au moment du dialogue avec le public. Il raconte à ses lecteurs – ou futurs lecteurs – des épisodes de sa vie, avec Golda Meïr, Yasser Arafat, Simone Veil, ou encore sa fuite du ghetto de Varsovie. Le temps file. « Le monde est beaucoup plus rapide aujourd’hui », dit-il, en parlant du succès de la “start-up” Macron… « qui devra nous proposer une autre “startup” dans un an et demi. » Le temps passe, oui. « Ce qui reste, – nos ancêtres qui ont conçu des livres magnifiques comme la Bible le savaient – c’est nous. Il y a toujours une sorte de permanence qui ne va pas nous détacher de ceux qui nous ont précédés. La littérature en témoigne ».

Lire la Bible et le Coran

Jérôme Lévy revient sur la “marche des musulmans contre le terrorisme”, du 8 au 14 juillet, qui s’est terminée dans la cour de l’Elysée. Une marche qui a fait polémique. Accompagné d’imams et de scouts musulmans, entre autres, il est allé rendre hommage aux victimes de « ceux qui tuent au nom d’Allah » , à Toulouse, Marek Halter (à g.), en compagnie de Jérôme Lévy, a passionné les Varois par ses récits bibliques.

à Londres, à Berlin, à Paris et à Nice. « Je me bats depuis des années, avec les ministres de l’Education qui se succèdent, pour que l’on introduise l’histoire des religions à l’école. Je n’arrive pas à obtenir gain de cause car nous sommes un pays particulier », souligne-t-il. Son bel accent yiddish, d’un autre temps, fait tressaillir ses mots, leur donne une sagesse rabbinique. Il insiste sur la nécessaire connaissance de l’histoire des religions. L’écrivain invite à lire ou à relire les Évangiles, le Coran. « Lisez le Coran, c’est en livre de poche, ça ne coûte rien ! » plaisante-t-il.

La force des femmes

A un Six-Fournais qui lui pose une question, il l’appelle, avec un sourire sincère : «monami» . L’assemblée grossit et boit, en silence,

passionnée, paroles de l’auteur. Alors que le soleil descend sur Six-Fours, il confie son rêve le plus fou : « J’aimerais donner rendez-vous à

les 100 000 femmes palestiniennes et israéliennes à Jérusalem. Pour qu’elles montent ensemble dans la ville. Et la guerre serait terminée.» Marek Halter s’est longuement penché sur le rôle des femmes dans la religion. De la Torah au Coran, il a écrit le récit de ces femmes. Avec trois tomes de La Bible au féminin, il raconte Sarah, Tsippora et Lilah. Il écrit aussi Marie, puis les femmes de l’islam en trois tomes : Khadija, Fatima et Aïcha .Et,le dernier de cette série consacrée aux femmes, Eve. Caïn et Abel, Josué, Marie, Eve, Moïse… en une soirée, l’écrivain a raconté personnages bibliques et politiques, pour le plus grand plaisir du public qui se souviendra encore longtemps de cette barbe flamboyante et de cet accent entêtant.