Contrefaçon: faux produits mais vrais dangers
Des animateurs sillonnent cet été le littoral du Sud de la France à la rencontre des consommateurs. L’objectif: leur faire prendre conscience des dangers de la contrefaçon
Hervé est un père de famille de 40 ans. L’an dernier, il a passé quelques jours de vacances en Italie. Il en a ramené quelques souvenirs: entre autres, un porte-clés pour chacun de ses enfants, une bouteille de vin pour son beau-père et… un vêtement pour lui. Un polo blanc tout ce qu’il y a de plus classique, orné d’un crocodile. Une contrefaçon. Il a toutefois un peu de mal à assumer son geste. Il s’est laissé tenté par le faux car c’était trois fois moins cher mais aussi d’une qualité trois fois moindre. On ne l’y reprendra plus jure-t-il.
Déni des normes sociales, sanitaires...
Chaque année, ils sont des milliers ces consommateurs à se laisser tenter, pas toujours en connaissance de cause. « Un acheteur de contrefaçon sur deux croit qu’il s’agit de produits authentiques », souligne Christian Peugeot, président de l’UNIFAB (Union des fabricants) alors qu’il lançait officiellement, le mois dernier à Nice et Saint-Tropez, la campagne de sensibilisation du public contre la contrefaçon. Car aujourd’hui, les imitations ressemblent à s’y méprendre aux originaux. D’apparence seulement. Puisque les risques sont, eux, bien réels. «Tout produit a une histoire. Or les contrefaçons sont fabriquées dans le déni des normes environnementales, sociales, sanitaires…», prévient le patron de l’UNIFAB. «Sur le plan économique, on estime que 38 000 à 40 000 emplois directs sont perdus chaque année en France et autant d’emplois indirects. »Lespécialiste de la question se veut franc et n’hésite pas à rappeler que les contrefacteurs sont liés à la grande criminalité et au terrorisme. Des financements douteux pour des marchandises qui le sont tout autant. «Aucun secteur n’est épargné, souligne Romain Soubeyran, directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi). Nous disposons de différents outils parmi lesquels la réglementation, le renforcement des titres de propriété industrielle, la répression mais aussi la sensibilisation du consommateur final. »
Vêtements, jouets, médicaments…
La lutte contre la contrefaçon résulte donc d’une démarche à laquelle participent plusieurs entités. La réflexion est, elle aussi, conjointe : « Nous étudions l’opportunité de mettre en place une juridiction qui traiterait des offenses les moins importantes afin de simplifier et d’accélérer le processus. Il existe un tribunal similaire à Londres qui règle plus de 100 cas par an. Il n’y a pas de copyright pour les bonnes idées ! », lance avec humour Richard Yung, sénateur des Français à l’étranger et président du Comité national anti-contrefaçon. Une juridiction aurait manifestement du pain sur planche: «9,2 millions d’articles contrefaits ont été saisis en 2016 par la douane pour une valeur marchande de 284 millions d’euros. De nombreuses filières organisées ont ainsi été démantelées en coopération avec la gendarmerie», assure Annick Bartala, directrice régionale de la douane. Et aucun produit n’est épargné par la copie : vêtements, jouets, mais aussi médicaments. Or ils peuvent être très dangereux car fabriqués en dehors de tout contrôle, et à partir de matières premières de mauvaise qualité. Hervé a d’ailleurs fini par jeter son polo contrefait : dès le premier lavage il s’était déformé et avait perdu un bouton.