Christophe: «Ne m’appelez pas monument, je connais ma valeur»
Rencontrez Christophe vingt fois dans l’année, et vous aurez toujours une nouvelle paroi par laquelle escalader celui qui, l’an dernier, revenait au sommet avec Les Vestiges du chaos. Une perpétuelle recomposition façon puzzle. Sauf que ce vendredi soir, sur son voilier de location aligné à Port-Grimaud depuis le début du mois, le tableau est en morceaux… En rade de wi-fi, le chanteur retranché derrière ses multiples mini-synthés et autres pédales d’effets ferraille avec son ordinateur pour transmettre des fichiers, fruits de ses explorations sonores de la nuit passée. A défaut de connexion, il envoie dans les enceintes Lebanon Hanover, trouvaille cold wave anglosuisse aux réminiscences Siouxsie, Cure, Bauhaus, Xmal Deutschland, dans lesquelles il s’identifie. C’est un fait, son syncrétisme musical à la chromatique infinie fait trôner le dernier des Bevilacqua bien au-dessus du « monument de la chanson française ». Au moment de la photo, ce sera donc en «statue vivante» qui prend l’eau dans une piscine gentiment mise à disposition par des voisins, que le Beau bizarre prendra la pose, impassible. Le meilleur pied de nez à ce statut rance auquel certains, par manque d’imagination, voudraient le cantonner…
Alors comment va le « monument » ?
J’aime pas le terme, parce que je connais ma valeur… Et je connais les monuments. C’est comme le mot « star », c’est gênant… De l’ego… Même Bowie ne se prétendait pas star.
Où en est le casting de l’album de duos sur vos classiques ?
Il a pas mal changé mais je garde Julien Doré, Jeanne Added, Raphaël – un pur –, Sébastien Tellier et Camille qui veut absolument faire Petite fille du soleil. J’ai d’autres noms mais j’attends de voir [les noms de Laetitia Casta, Juliette Armanet et Daft Punk circulent…].
À propos de Julien Doré, quel verdict sur les arènes de Nîmes que vous avez partagées cet été ?
Pas un beau souvenir. C’était tout ce que j’aime pas… Je l’ai fait pour l’anniversaire de Julien [le juillet, Ndlr] mais c’est terminé. Le pointage, c’est pas ma came… Et le son n’avait aucun intérêt. Moi, je suis dans la technologie avancée, tu sais [il lâche tout pour faire écouter son dernier joujou, un synthé lilliputien aux touches lumineuses].
Port-Grimaud, une éternelle oasis de bien-être ?
Je connais pas le mot « vacances ». J’suis comme Godard, y’a pas de coupure. Mais ces deux mois en voilier avec le studio à bord, je les attends chaque année… C’est comme lorsque j’arrive à l’aéroport de Tanger. Même si je n’y vais plus aussi heureux, ça me procure un truc terrible. Je suis inconscient de tout le reste…
Rouler de nouveau, même si c’est en auto électrique sans permis, est-ce la liberté retrouvée?
C’est un coup de hasard qui, depuis l’an dernier, a changé ma vie ! Je marche à km/h mais je suis autonome. J’étais content de retrouver le voilier, mais cette caisse, la Twizy… Elle est mignonne. Elle m’attend et je peux aller dîner au resto à Saint-Tropez ou Ramatuelle… Filer dans mes endroits… Rentrer à heures du mat comme hier… J’en suis amoureux. Je la regarde comme je regardais mes Ferrari ou mes Américaines quand j’avais le permis. C’est bizarre, hein…