À la Sainte-Baume, avec les catholiques varois
Depuis mercredi et jusqu’à ce midi, les Universités d’été de la Sainte-Baume se déroulent au pied de la grotte de Marie Madeleine. Thème retenu pour cette 7e édition : faut-il se libérer du libéralisme ?
Après un déjeuner dans les champs, à l’ombre des pins et sous la protection de l’imposant et majestueux massif de la Sainte-Baume, il est l’heure de reprendre les débats. La petite centaine de participants – tous des chrétiens, sinon des catholiques, pratiquants – se dirige dans le calme vers une ancienne grange aménagée en salle de réunion. Au programme de cet après-midi de fin d’été : «le libéralisme est-il un appauvrissement anthropologique ? » Deux ans après la fièvre médiatique qui s’était emparée des lieux, dans la foulée de l’annonce de la participation de Marion Maréchal Le Pen, l’Hôtellerie de la SainteBaume, gérée par l’ordre des Dominicains, a retrouvé tout son calme. Mis à part une poignée de représentants de la presse locale, les journalistes n’ont pas remis les pieds sur ce plateau calcaire situé entre Mazaugues et le Plan-d’Aups. Si, deux ans après les faits, il « assume parfaitement d’avoir invité » celle qui était encore députée FN, le père Louis-Marie Guitton, l’un des organisateurs, n’est pas mécontent d’avoir retrouvé un peu de quiétude en cette 7e édition. Car le but de ces universités d’été n’est pas de faire le buzz, mais de « promouvoir l’engagement des chrétiens dans la cité », rappelle l’ecclésiastique.
Des dificultés à se situer politiquement
Mais revenons au débat. La Manif pour tous a quelque peu changé l’image des catholiques, les caricaturant en électeurs de droite, forcément libéraux et conservateurs. C’est oublier les attaques répétées du pape François contre le système économique libéral. La réalité est beaucoup plus subtile. « Pour les catholiques, il est souvent très difficile de se déterminer de droite ou de gauche. Si on est contre les OGM, on est de gauche. Mais si dans le même temps, on est contre les manipulations génétiques, on nous classe à droite, et une droite plutôt dure… », fait remarquer le père Guitton, dans un sourire. Aude illustre parfaitement ces difficultés à se situer politiquement. Venue à la Sainte-Baume pour « chercher une formation à titre individuel », cette Parisienne, catholique pratiquante, a voté Fillon, souvent présenté comme le candidat de la droite chrétienne, au 1er tour, s’est abstenue au second, mais avoue «ne pas avoir de préjugés sur Emmanuel Macron», mais plutôt « de fortes attentes » à son égard. À l’inverse, Serge Papin, P.d-g du groupement de commerçants indépendants Système U (1 600 magasins et 70 000 collaborateurs), est venu témoigner de son expérience de « grand patron ». Un qualificatif dans lequel il ne se reconnaît pas. « Je suis plutôt celui qui fédère le vivre ensemble, qui essaye de convaincre, sans contraindre, une communauté de femmes et d’hommes à travailler à un projet commun ». Pour Serge Papin, « il ne faut pas avoir peur de conjuguer les paradoxes». Et de prôner « un libéralisme régulé », d’appeler à « une transformation des entreprises ayant une dimension éthique, privilégiant la réconciliation au rapport de forces ». Une évolution qu’il croit Emmanuel Macron « capable de mener car il a cette envie de réconciliation dans son ADN ».
Comment jugent-ils l’action de Macron ?
Rédacteur en chef du mensuel catholique La Nef, Christophe Geffroy n’a pas du tout le même avis. Pour lui, « le libéralisme n’est pas compatible avec la foi chrétienne dans la mesure où il refuse toute notion de bien et de bien commun». Quant à Macron, s’il salue « son arrivée au pouvoir en à peine 2 ans », il n’attend rien de quelqu’un « avant tout amoureux de lui-même et sans aucune conviction ». Le mot de la fin à Axel, artisan relieur à Paris. Un peu comme Aude, il est venu à La Sainte-Baume chercher « non pas un débat idéologique, mais des éléments pour élargir le champ de ma conscience ». Le libéralisme ? « Je n’aime pas trop les « ismes » synonymes d’idéologie. Or, il n’y a pas d’idéologie compatible avec la foi chrétienne… » À méditer. Les Universités d’été se termineront ce matin par une table ronde politique à laquelle participeront Serge Passerieux (ex PS), Christophe Billan (LR), Djordje Kuzmanovic (France insoumise) et Mgr Dominique Rey.