Plus Marianne que Mireille
Mireille Darc monte au petit paradis des Moccots par l’entrée des artistes. Une entrée qui ressemble à la porte de l’Arsenal. En la traversant avant elle, Félix Mayol, Jules Raimu ou Gilbert Bécaud ont esquissé un dernier pas de danse avant de se fondre dans l’éternité. Toulonnaise, oui, mais loin, très loin du cinéma de Pagnol. Cette Mireille-là n’est pas celle des félibres et de Frédéric Mistral. Plus Marianne que Mireille, elle incarne à l’écran comme dans la vie, une image glamour de la Française époque seventies, de la femme moderne des Trente glorieuses. Elle est la plus belle des fausses ingénues, à ne surtout pas confondre avec les ravissantes idiotes. Objet de tous les fantasmes, oui, mais jamais femme objet. Les vieux «Barbouzes» se laissent berner dès – elle n’a que ans – Pierre Richard, grand blond avec une chaussure noire, en tombe à la renverse, huit ans plus tard, quand elle tourne le dos aux conventions dans une petite robe noire signée Guy Laroche. Ses formes épousent alors les statistiques de l’économie nationale: elles font rêver. Krachs pétroliers, chômage: la France a ensuite connu quelques soucis. Mireille Darc aussi. Beaucoup d’accidents de la vie. Coeur qui lâche, corps abîmé, coeur brisé. Toujours, elle s’est relevée, parce qu’elle avait acquis cette capacité à «dédramatiser les choses», au cours de cette vie hors-norme qui lui a donné le goût de l’humain, le sens de l’engagement. Qui était-elle vraiment? Une femme à l’écoute, ouverte aux autres, libre, surtout. Pour mieux la cerner, il faut revoir ses documentaires, sur le pardon ou le cancer qui fonctionnent depuis ans comme un jeu de miroirs fidèle. Le reflet de toute une époque.