Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Barbara sort en salles aujourd’hui

- PAR PHILIPPE DUPUY pdupuy@nicematin.fr

BARBARA

De Mathieu Amalric (France). Avec Jeanne Balibar, Mathieu Amalric, Vincent Peirani Durée : h  Genre : Drame Notre avis : ★★★

Compagnons à la ville jusqu’en 2003 (ils ont eu deux enfants), Jeanne Balibar et Mathieu Amalric se retrouvent à l’écran pour Barbara, vrai faux biopic présenté au Certain Regard à Cannes, où il a reçu le très judicieux Prix de la poésie du cinéma, créé quasiment pour lui. Elle y joue une actrice qui joue Barbara (et devient Barbara), lui un metteur en scène qui prépare un film sur Barbara. Un jeu de miroir et de mises en abyme à l’infini, dont ils nous parlent avec une égale passion…

Pourquoi un film sur Barbara ?

Mathieu Amalric : C’est Jeanne à qui on avait proposé le rôle qui est venue me demander de le réaliser. L’idée était dans l’air depuis des années, mais aucun scénario satisfaisa­nt n’émergeait. Jeanne a pensé qu’on pouvait s’y atteler ensemble. Jeanne Balibar : On était rabibochés depuis au moins  mois et demi (rires) .Jele connais par coeur, mais on partage le goût des surprises.

Un biopic, ça ne vous effrayait pas ?

M.A. : C’est effectivem­ent un genre difficile à aborder. Il fallait trouver une nécessité intime pour le faire... Mais Citizen Kane, Lola Montes, Amadeus, Last Days, Spinal Tap… ce sont des biopics. En fait, je me suis aperçu que j’adorais ça. Barbara n’est pas un biopic classique, non plus. Plutôt un bio-utopique ! J.B. : Un biopic, c’est Vertigo, c’est la réincarnat­ion, c’est Jésus Christ ! Mais ça peut vite devenir frivole… Avec Barbara, c’était plus facile. On pouvait papillonne­r autour, elle tenait la barre.

Quel rapport aviez-vous avec Barbara ?

J.B. : Elle fait partie de mes proches , comme mes grands parents, mes parents, mes amies d’enfance et Brian Ferry, Bernadette Laffont, Jeanne Moreau, Delphine Seyrig, Marlene Dietrich, Pierre Clémenti, Thomas Mitchell… Des divinités sympathiqu­es qui m’ont fait l’amitié d’atterrir sous forme de disques dans ma chambre, ou de passer à la télé quand je me trouvais devant. Il faut toujours faire attention d’aimer les bonnes personnes , on les porte en soi toute sa vie.

Vous chantiez du Barbara ?

J.B. : Sur scène, ça ne me serait pas venu à l’idée et je ne le ferai pas même si on me le demande. Je chantais ses chansons à mes copines qui avaient des chagrins d’amour. Je me les chantais aussi. Comme dit Depardieu, c’est une consolatri­ce…

Vous avez vu le spectacle Depardieu-Barbara ?

J.B. : Oui et c’est une des plus belles choses que j’ai vues de ma vie entière. J’ai regretté de ne pas l’avoir vu avant de tourner. Il fait apparaître tellement de choses d’elle que je n’avais pas vues et qui auraient pu me servir…

Comment avez-vous abordé le rôle ?

J.B. : J’ai choisi de passer par la technique musicale et les costumes. Le costume c’est toujours une voie d’entrée dans les personnage­s. Pour Barbara, étudier la technique musicale permettait de comprendre beaucoup de choses sur elle : sa versatilit­é, ses origines juives, sa complexité. Il y a jusqu’à  changement­s d’accords dans ses chansons…

Vous avez appris à tricoter aussi ?

J.B. : Non, ça je savais déjà. Le tricot , c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas (rires).

Comment s’est passé le tournage ?

J.B. : C’était comme une séance de spiritisme de six semaines. On attendait le moment ou elle allait nous faire la surprise de débarquer, ou pas. Barbara est un film Proustien, sur notre jeunesse et la persistanc­e du temps et des personnage­s dans nos vies . Il montre qui nous avons été, avec cette femme qui était la. Comme un mash up. M.A. : On l’a fait comme un geste. Jeanne en était la muse. Elle était parfois jalouse de Barbara, me disait : “Tu lui donnes les meilleures scènes !”. A la fin, on peut se dire qu’avec ce film on n’a pas tout à fait raté notre vie à deux.

Recevoir le Prix de la poésie du cinéma à Cannes, ça vous allait ?

J.B. : Ils auraient mieux fait de me donner le prix d’interpréta­tion ! (rires). C’est bien parce que c’est un prix collectif : tous ceux qui ont participé à l’aventure en sont porteurs et responsabl­es. Il récompense exactement ce qui nous faisait jubiler dans ce film M.A. : C’est le juste prix : on ne voit pas le travail.

Vos projets ?

J.B. : J’ai un album qui va sortir (Balibazar), une pièce en Allemagne sur Frankenste­in (La Fabrique des monstres )etun film avec Apichatpon­g Weerasetha­kul qu’on va tourner en Colombie avec Tilda Swinton. J’y serai une archéologu­e. Je vais revoir tous les Indiana Jones pour préparer mon rôle (rires). M.A. : Les amis m’ont sucé le sang ces dernières années pour que je joue dans leurs films. J’en ai fait une fracture de fatigue l’an dernier et j’ai dû terminer le tournage en chaise roulante. Donc, l’an prochain, je serai en jachère. Là, je pars au Canada rejoindre une autre chanteuse que j’aime et qui se prénomme aussi Barbara (Barbara Hannigan N.D.L.R).

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(Photo Production)
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