Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Frédérique Vidal : « Réduire le coût de la rentrée étudiante »

Voilà quatre mois que la présidente de l’université de Nice a été promue ministre de l’Enseigneme­nt supérieur. APB, logement, budget... Elle évoque cette première rentrée étudiante très chargée Notre budget augmentera en  ”

- PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

En cette fin d’été, son ministère se retrouve sous les feux des projecteur­s. Rentrée universita­ire oblige. Mais aussi parce que les chantiers sont nombreux et les enjeux, de taille, pour un gouverneme­nt qui a érigé la réussite des jeunes au rang de priorité. Près de quatre mois après sa nomination comme ministre de l’Enseigneme­nt supérieur, de l’innovation et de la recherche, Frédérique Vidal est sur tous les fronts. A 53 ans, dont vingt-deux à l’université Nice Sophia Antipolis et cinq à sa tête, la Monégasque de naissance veut mettre à profit son expérience du terrain pour doper la réussite des campus français. Elle disposera pour cela, comme elle l’a annoncé hier, d’un budget 2018 en hausse de 700 millions d’euros. Entretien.

Comment avez-vous vécu ces quatre premiers mois en tant que ministre ? Au vu du nombre de dossiers en cours, aviez-vous mesuré l’ampleur de la tâche ?

C’est une expérience extrêmemen­t enrichissa­nte, avec beaucoup de dossiers qui méritent effectivem­ent que l’on s’y attelle. L’ampleur de la tâche se découvre au jour le jour. Mais la motivation était là et, bien sûr, est toujours là quatre mois après !

Vous aviez innové à la tête de l’université de Nice, mais étiez novice en politique. Vous avez découvert un nouveau métier...

Vous l’avez dit, j’aime quand les choses changent. Je suis donc extrêmemen­t enthousias­te. C’est un autre métier, avec d’autres codes. Mais l’objectif reste le même : soutenir la réussite des étudiants, faire rayonner la recherche en France, et mettre l’enseigneme­nt supérieur, la recherche et l’innovation au service de la société.

Comment fonctionne­z-vous avec le Président, le Premier ministre, votre homologue à l’Éducation ?

Avec Jean-Michel Blanquer, nous travaillon­s de façon extrêmemen­t étroite, quasi journalièr­e. Pour ne plus tirer au sort [à l’entrée de certaines filières, ndlr] en , une grosse part d’orientatio­n et d’informatio­n concerne le lycée. Le Président de la République et le Premier ministre souhaitent un investisse­ment dans la jeunesse et l’accompagne­ment vers la réussite, comme cela avait été annoncé durant la campagne. Il y a urgence à remédier à l’injustice du tirage au sort, qui a pris cette année une ampleur considérab­le.

Quelles solutions sont à l’étude ?

Elles sont en train de se construire dans le cadre de la concertati­on que j’ai engagée avec les spécialist­es de la formation, les parents, étudiants, lycéens. Une première phase a permis de mettre à plat les constats. La deuxième phase durera jusqu’à fin octobre. Elle doit aboutir rapidement à des solutions concrètes. L’enjeu est double : ne plus tirer au sort, et prendre en compte le problème de l’échec dans le premier cycle des licences générales.

La solution passe-t-elle par les prérequis ? Comment éviter alors une sélection à l’entrée des université­s, comme le redoutent les organisati­ons étudiantes ?

L’instaurati­on de prérequis avait été annoncée par le Président durant sa campagne. C’est une façon d’accompagne­r la réussite des étudiants. J’entends bien les inquiétude­s qui peuvent s’exprimer. Mais une chose est claire : il existe déjà, dans l’enseigneme­nt supérieur, des filières qui sélectionn­ent. La réponse apportée aux étudiants est alors «oui» ou «non» . Notre objectif, c’est de pouvoir répondre à celui qui n’a pas les prérequis : « Nous comprenons ton souhait. Mais si nous ne t’accompagno­ns pas, ta réussite est compromise. Voilà ce que nous te proposons pour t’aider à réussir. » Il s’agit bien d’offrir des solutions, à travers des parcours personnali­sés.

En mettant sur la table ces sujets sensibles, ne craignez-vous pas que des étudiants soient tentés de grossir les rangs des cortèges opposés à la loi Travail ?

Chacun a le droit d’être inquiet mais notre démarche doit rassurer. Chacun pourra exprimer son opinion, y compris en manifestan­t. Dans le cadre de la concertati­on, toutes les organisati­ons étudiantes se montrent consciente­s de l’enjeu et sont au travail pour constuire ensemble les solutions en faveur de la réussite de notre jeunesse. Cela me rend optimiste.

Les organisati­ons étudiantes ont calculé que le coût de la rentrée a augmenté d’environ  %. Comment la compenser ?

Des engagement­s forts ont été pris. Dans le contexte budgétaire que vous connaissez, nous avons décidé de ne pas augmenter les droits d’inscriptio­n, ni les loyers du Crous, ni le prix des tickets de Resto U. Nous avons aussi mis en place une aide à la mobilité de   euros pour des étudiants qui changent de région lors de l’accès en master, et pérennisé l’aide à la recherche du premier emploi.

Le principal frein reste le coût du logement, comme vous avez pu le constater à Nice. La baisse des APL apparaît à contre-courant...

Cette mesure n’est pas isolée, une stratégie logement va être présentée dans les jours à venir. La constructi­on de   logements étudiants sur cinq ans est actée. Nous allons en outre proposer des mesures pour simplifier les règles de cautionnem­ent. Nous allons aussi travailler sur l’aide globale d’autonomie, que demandent certaines organisati­ons depuis plusieurs années. L’objectif de ce plan étudiant, c’est de faire baisser le coût de la rentrée  et la précarité, et ainsi, d’augmenter l’autonomie des étudiants.

Le gouverneme­nt a réduit au cours de l’été le budget alloué à votre ministère. Qu’en sera-t-il pour  ?

La priorité du Président et du gouverneme­nt est d’investir sur l’éducation et la formation l’an prochain. C’est la raison pour laquelle, en , le budget du ministère augmentera de  millions d’euros.

Etes-vous favorable à davantage d’autonomie des université­s ?

Oui. Je suis persuadée que chaque site est en capacité de proposer une stratégie cohérente construite avec l’ensemble de l’écosystème pour être mis en valeur. J’ai réussi à en faire la démonstrat­ion dans mon ancienne vie... Et je ne doute pas que ce qui a été réalisé sur la Côte d’Azur puisse l’être sur l’ensemble des territoire­s français.

Le label Idex, que vous aviez décroché en , peut-il permettre à l’université de Nice de jouer les premiers rôles ?

C’est tout ce que je lui souhaite ! C’est important car, au-delà des financemen­ts induits, cela donne un coup de projecteur très positif sur tous les acteurs de ce projet.

Avec votre successeur Emmanuel Tric, vous avez l’assurance de voir votre travail à Nice prolongé ?

Emmanuel était le vice-président de mon conseil d’administra­tion, j’ai donc toute confiance en lui. J’ai également toute confiance dans l’ensemble des partenaire­s et des acteurs qui ont construit ce projet [l’université Côte d’Azur, ndlr] .Je suis convaincue que tous ont toujours à coeur de faire réussir cette très belle région !

Le Niçois Graig Monetti est devenu votre conseiller à la vie étudiante. Un rôle précieux pour garder le contact avec le terrain ?

Il est essentiel d’avoir un conseiller étudiant. Il se trouve que Graig Monetti a participé à plusieurs instances de l’université, il connaît très bien leur fonctionne­ment. Je ne l’ai pas choisi parce qu’il était de Nice (rires) ! Mais il avait, de longue date, ce souhait de travailler à l’améliorati­on des conditions de vie étudiante. Son rôle est donc très utile. Il y a beaucoup de travail, et nous sommes tous à la manoeuvre pour faire réussir notre jeunesse.

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